La réunion de l’ICANN à Paris a connu deux lignes de tensions en filigrane des échanges, et je voudrais revenir sur celles-ci en m’appuyant sur deux articles de Milton Mueller, car elles sont assez révélatrices de l’évolution des rapports de forces inter-communautés au sein des différentes instances. L’intérêt de cette réunion à Paris est que l’on a pu vivre les choses sur place, à chaud, sans l’écran des formules policées des relevés de décision ou la sèche restitution des verbatim.
La première ligne de tension (1) n’est pas neuve, mais elle parait plus vive que jamais à l’approche de la création des nouvelles extensions. Elle concerne les relations souvent tendues entre le GAC, où sont réunis les gouvernements, et l’ICANN, avec une ambiguité supplémentaire liée au fait que le gouvernement américain est présent au GAC tout en ayant par ailleurs un rôle éminent de contrôle des décisions de l’organisme californien.
Faut-il donc croire au ton assez comminatoire de la représentante du gouvernement américain, demandant des comptes au management de l’ICANN, et à la fébrilité du staff revérifiant tel ou tel point pour préparer la réponse de Peter Dengate-Trush ? Un ancien membre du board m’a dit ne plus avoir participé à ces « réunions publiques » pour leur côté strictement théâtral, l’essentiel se faisant à huis clos. Aussi peut-on penser qu’il n’y avait pas de réelle surprise dans ces échanges mais qu’il fallait bien que le GAC montrât son mécontentement à l’égard de la manière dont ses avis sont – ou ne sont pas - pris en compte.
C’est là que la plaie est la plus vive, et depuis bien longtemps. Les anciens se souviendront que la première crise ouverte a eu lieu lors de l’ouverture des INFO, lorsque le GAC a formulé le souhait que soient protégés les « noms géographiques ». Ce souhait n’ayant ému personne, le GAC s’est étonné d’avoir à le réitérer, avant de prendre conscience de son rôle de « conseiller » dont les avis peuvent être – théoriquement – ignorés par le board.
Les gouvernements se sentent mal à l’aise avec / au sein de l’ICANN, et l’ICANN le leur rend bien. Leurs relations seront pourtant de première importance dans l’avenir, surtout si l’ICANN parvient à obtenir une plus grande indépendance vis-à-vis de Washington.
Seconde ligne de tension, qui semble s’être cristallisée à Paris : une divergence de visions et d’intérêts entre d’une part les registres d’extensions génériques et les registrars, et d’autre part les autres composantes de la generic Names Supporting Organization (gNSO), à savoir l’IPC (marques), les utilisateurs entreprises et les utilisateurs non commerciaux. Les divergences se manifestent autour des poids relatifs que chacun veut posséder en nombre de sièges au Conseil du gNSO, l’instance la plus puissante de l’ICANN après le board. Les débats en sont arrivés au point que le président de l’IPC a publiquement déclaré envisager la dissolution de sa « constituency » si le camp adverse obtenait gain de cause, les registres et registrars se défendant quant à eux de pouvoir imposer leurs décisions tout en devant admettre leur capacité de blocage.
Le board de l’ICANN a prudemment préféré ne pas statuer sur cette réforme du gNSO, renvoyant les parties dos à dos en les invitant à se mettre d’accord dans un délai de 60 jours. Peut-être une décision sera-t-elle prise au Caire en novembre...
A noter une phrase sibylline du communiqué du GAC, qui prend tout son relief dans le contexte exposé ci-dessus et montre dans quel sens vont les sympathies des gouvernements: “In particular, given the existing levels of concentration in the gTLD market, the GAC reiterates that ICANN needs to adopt an implementation procedure that further facilitates new entrants to the registry, registry-services and registrar markets and avoids unduly favouring those existing registries and registrars involved directly in the Policy Development Process”.
(1) ICANN Paris: a revealing exchange
http://blog.internetgovernance.org/blog/_archives/2008/6/25/3762356.html
(2) GNSO Reform: a Window into ICANN's Soul
http://blog.internetgovernance.org/blog/_archives/2008/6/30/3770339.html
La première ligne de tension (1) n’est pas neuve, mais elle parait plus vive que jamais à l’approche de la création des nouvelles extensions. Elle concerne les relations souvent tendues entre le GAC, où sont réunis les gouvernements, et l’ICANN, avec une ambiguité supplémentaire liée au fait que le gouvernement américain est présent au GAC tout en ayant par ailleurs un rôle éminent de contrôle des décisions de l’organisme californien.
Faut-il donc croire au ton assez comminatoire de la représentante du gouvernement américain, demandant des comptes au management de l’ICANN, et à la fébrilité du staff revérifiant tel ou tel point pour préparer la réponse de Peter Dengate-Trush ? Un ancien membre du board m’a dit ne plus avoir participé à ces « réunions publiques » pour leur côté strictement théâtral, l’essentiel se faisant à huis clos. Aussi peut-on penser qu’il n’y avait pas de réelle surprise dans ces échanges mais qu’il fallait bien que le GAC montrât son mécontentement à l’égard de la manière dont ses avis sont – ou ne sont pas - pris en compte.
C’est là que la plaie est la plus vive, et depuis bien longtemps. Les anciens se souviendront que la première crise ouverte a eu lieu lors de l’ouverture des INFO, lorsque le GAC a formulé le souhait que soient protégés les « noms géographiques ». Ce souhait n’ayant ému personne, le GAC s’est étonné d’avoir à le réitérer, avant de prendre conscience de son rôle de « conseiller » dont les avis peuvent être – théoriquement – ignorés par le board.
Les gouvernements se sentent mal à l’aise avec / au sein de l’ICANN, et l’ICANN le leur rend bien. Leurs relations seront pourtant de première importance dans l’avenir, surtout si l’ICANN parvient à obtenir une plus grande indépendance vis-à-vis de Washington.
Seconde ligne de tension, qui semble s’être cristallisée à Paris : une divergence de visions et d’intérêts entre d’une part les registres d’extensions génériques et les registrars, et d’autre part les autres composantes de la generic Names Supporting Organization (gNSO), à savoir l’IPC (marques), les utilisateurs entreprises et les utilisateurs non commerciaux. Les divergences se manifestent autour des poids relatifs que chacun veut posséder en nombre de sièges au Conseil du gNSO, l’instance la plus puissante de l’ICANN après le board. Les débats en sont arrivés au point que le président de l’IPC a publiquement déclaré envisager la dissolution de sa « constituency » si le camp adverse obtenait gain de cause, les registres et registrars se défendant quant à eux de pouvoir imposer leurs décisions tout en devant admettre leur capacité de blocage.
Le board de l’ICANN a prudemment préféré ne pas statuer sur cette réforme du gNSO, renvoyant les parties dos à dos en les invitant à se mettre d’accord dans un délai de 60 jours. Peut-être une décision sera-t-elle prise au Caire en novembre...
A noter une phrase sibylline du communiqué du GAC, qui prend tout son relief dans le contexte exposé ci-dessus et montre dans quel sens vont les sympathies des gouvernements: “In particular, given the existing levels of concentration in the gTLD market, the GAC reiterates that ICANN needs to adopt an implementation procedure that further facilitates new entrants to the registry, registry-services and registrar markets and avoids unduly favouring those existing registries and registrars involved directly in the Policy Development Process”.
(1) ICANN Paris: a revealing exchange
http://blog.internetgovernance.org/blog/_archives/2008/6/25/3762356.html
(2) GNSO Reform: a Window into ICANN's Soul
http://blog.internetgovernance.org/blog/_archives/2008/6/30/3770339.html