C’est beau, c’est rond, c’est coloré. Vue de la route, à la sortie de Bourg-Saint-Maurice, la yourte de Mélanie Bonato attire immanquablement le regard. C’est un joli pari, un rêve qui commence à prendre forme : faire du camping municipal du village de Seez un lieu de vacances atypique. Exit la formule classique du caravaning, de la tente pointue et du mobile-home, place à l’habitat exotique ! Au fil du temps, Mélanie compte bien enrichir son terrain de tentes berbères et de cabanes dans les arbres ; mais pour l’instant, l’aventure commence par trois yourtes.

Le choix de cet habitat est loin d’être anodin, ce n’est pas qu’une tocade ; c’est aussi faire de l’humanitaire : "l’achat de la première yourte a servi à financer une partie du développement d’un orphelinat à Ulan-Bator, la capitale de la Mongolie. Ce sont des amis qui ont eu cette idée. Au-delà de la beauté de cette habitation, il y a une volonté de partager et d’entretenir la culture du pays, de la comprendre, et d’amener ceux qui séjournent sous son toit à réfléchir différemment. J’ai, depuis toujours, un grand respect pour les peuples dits minoritaires, ils ont de vraies valeurs, dont l’homme occidental s’éloigne. La yourte, c’est la vie commune, renouer le dialogue et le partage avec la famille. C’est habiter un lieu où tout le monde se retrouve, où tout le monde est en interaction. On n’y vit pas comme on vivrait sous une simple toile de tente, c’est une vraie maison, mais une maison dans laquelle il n’y a pas d’angles. L’énergie circule librement et ne se heurte à rien. Vivre dans cet espace rond génère un bien-être particulier, propice au partage. Et puis, c’est tellement beau et harmonieux !".

C’est vrai que c’est beau. Vu de l’extérieur, c’est un dôme immaculé, pur, une véritable invitation au cocooning. A l’intérieur, une explosion de couleurs vous réchauffe les yeux ; des rouges, des orangés, un plancher de pin qui craque sous les pieds. On se sent ailleurs, et on s’y sent bien. Il fait tiède, malgré le froid du plein hiver. Je m’en étonne, et Mélanie sourit : "heureusement qu’il y fait chaud ! N’oubliez pas que les Mongols y vivent à l’année, dans des conditions climatiques bien plus rudes que les nôtres ! L’isolation est en laine de mouton, protégée par une toile imperméable en coton". Concernant le chauffage, Mélanie aurait aimé mettre un poêle à bois central, comme le veut tradition mongole. Mais, pour des raisons de sécurité, elle a préféré faire le choix de deux petits radiateurs électriques : "normalement, une yourte doit être montée et décorée dans le sens des coutumes. La porte doit toujours faire face au sud, et le poêle est placé au centre. En été, on découvre le haut de la tente, et la lumière est filtrée à travers un dôme de plexiglas, ce qui crée un puits de lumière le jour. La nuit, on peut regarder les étoiles, bien à l’abri. Chez les Mongols, l’espace est ritualisé, car régi par des forces cosmiques, de l’énergie pure, dont il ne faut pas briser l’équilibre".

Mélanie Bonato est très sensible aux énergies particulières qui se dégagent d’un lieu. Cette jeune femme étonnamment dynamique et chaleureuse s’orientait vers la naturopathie, mais le "destin" en a décidé autrement. Élevée au cœur du plateau de la Vanoise (sa maman y était gardienne de refuge), elle a cette facilité naturelle à communier avec la terre. Et choisir finalement de diriger un camping s’est imposé comme une évidence. Lorsque j’aurai reçu mes deux nouvelles yourtes, ce mois-ci, j’aimerais faire de la première un lieu où l’on pratiquera le yoga. Ce style d’habitat se prête particulièrement bien à ce genre d’activité. Petit à petit, je veux développer un nouveau concept de vacances : travailler en partenariat avec des organisations concernées par le développement durable, le respect de la nature et des civilisations".

Elle ferait elle-même volontiers ce choix d’habitat si elle devait quitter le camping. Il existe des yourtes contemporaines, parfaitement équipées, avec d’avantage d’ouvertures. Ces yourtes sont plus adaptées à notre culture. C’est un habitat naturel, qui s’intègre parfaitement dans le paysage. Et puis, on y retrouve cette notion du "vivre ensemble" que notre mode de vie a mis de côté. Il suffit d’avoir le terrain. Ce type de logis qui revient à environ 20 000 euros, est très confortable, original et parfaitement écologique. A l'instar des yourtes traditionnelles, tous les matériaux qui la composent sont naturels : bois, laine de mouton, coton et chanvre. Le développement durable et l’habitat passif, c’est l’avenir". Antoine de Saint-Exupéry ne disait-il pas que "nous n’héritons pas la terre de nos parents, nous la léguons à nos enfants" ?

Et les vacanciers du camping ne s’y trompent pas. Il n’est pas rare qu’ils se renseignent sur le prix d’une yourte traditionnelle (environ 3 500 euros), et envisagent d’en faire l’acquisition. Une sorte de résidence secondaire harmonieuse et écologique. "Certains d’entre eux sont simplement curieux. Lorsque je leur parle de yourte, ils comprennent yaourt, et se demandent ce que ça veut dire. Et finalement, ils adorent ça".
Vous voyez ? Pas besoin d’aller loin, ni de voyager longtemps. C’est aussi ça, l’aventure. Découvrir une autre culture, finalement, ne nécessite parfois qu’un peu de temps, et le désir de s’ouvrir à l’autre à travers son habitat… au cœur de la Savoie.

• Camping Le Reclus - www.campinglereclus.com
• Yourte Contemporaine - www.yourte-contemporaine.com