| ENCHERES, L'ESPACE NUMERIQUE DIABOLISE
24/03/2006
Schématiquement, les sites d'enchères en ligne sont à rapprocher des vide-greniers dans le sens où ils ne procurent aucune garantie d'authenticité. Le vendeur assume la responsabilité de la description. Mais l'espace majoritairement occupé par des particuliers, vendeurs occasionnels ou réguliers, est progressivement envahi de professionnels. La piste numérique apparaît comme un nouvel eldorado mais concentre également les méfiances.
Tout le monde est logé à l'enseigne du pseudo. Se déclarent professionnel qui veut et à ce jeu, bien malin qui devine avec qui ou contre qui il a affaire. Le problème tient au brassage et à la confusion des genres. Internet traverse un épisode rencontré avant lui par les vide-greniers, mais le nombre et la dématérialisation amplifient le phénomène. Les plus pessimistes estiment les transactions professionnelles a 60 % du volume, et intiment de reproduire les règles appliquées aux vide-greniers. La chasse aux faux particuliers apparaît alors comme le meilleur moyen d'éclaircir le marché.
Mécaniquement et sans grand discernement, les prix sont tirés vers le haut. Ici le tout venant côtoie des objets et mobiliers anciens. Les descriptifs se veulent vendeurs et la maladresse rivalise avec la naïveté : qu'il s'agisse de venter une "très jolie commode époque Louis Philippe en placage de noyer veiné datant de la fin du XIXe siècle" ou de faire référence à quelques noms porteurs du moment de Charlotte Perriand à Jielde en passant par Jean Prouvé. L'objet est prétendu "original", daté de 1950, avec un prix de réserve qui nécessiterait qu'il soit au minimum accompagné d'une authentification.
ENCHERE ET SUR-ENCHERE
Les belles pièces se font rares. Les rééditions font de l'ombre aux originaux et participent à la confusion générale, d'autant que la production de certains articles se poursuit aujourd'hui encore… Un meuble d'époque n'a pu être produit qu'à la dite époque, tandis qu'un meuble de style peut être de fabrication récente, tout cela sans compter les copies ! La valeur "estimée" reflète les aspirations du vendeur, le prix de départ ou de réserve est établi sur la base d'un meuble similaire vu quelques temps plus tôt sur le site… finalement pourquoi le meuble de l'un serait-il moins "original" que celui de l'autre !
Rangée de cinéma, fauteuil de coiffeur, brouette ancienne, siphons, assise de tracteur… l'improbable côtoie les mobiliers usuels et sans age tandis que d'autres semblent vouloir évoquer le style d'une époque. Certains surfent sur les tendances, d'autres se déchargent de la chambre Napoléon III de feu tante Bertille, sans s'attarder sur la description avec pour chaque meuble, un prix de départ à 1 euros et aucune réserve. Chacun peut y voir son mirage, y deviner une signature, supposer l'affaire… et oublier de questionner le vendeur. L'enchère s'emballe portée par la demande et atteint parfois des sommets sans que quiconque n'ait une idée précise de la valeur de l'objet.
FAUX PROCES
Les sites d'enchères n'ont ni la vocation, ni pas capacité d'avaliser les annonces publiées. Mais il ne faut pas négliger l'intérêt de ces sites à identifier et à éliminer très tôt les attitudes frauduleuses. Des recours sont proposés aux acheteurs comme aux vendeurs, en cas de non réception, de non-conformité avec la description ou si le règlement n'est pas effectué. Aucland procure une assurance aux acheteurs et aux vendeurs, accessible à partir d'un historique de dix transactions positives. Elle garantit les transactions et s'applique pour une valeur maximale de 193 € (moins 18 € de franchise). Il en va de même pour eBay qui, sans démarche particulière, indemnise les acheteurs jusqu'à 230 € (moins 28 € de frais de dossier), via son programme de protection. Il est complété de la "Protection des achats PayPal" : les enchères éligibles et signalées bénéficient gratuitement d'une protection jusqu'à 500 € en cas de non réception ou de non conformité. Dans tous les cas, la transaction doit avoir eu lieu sur le site et ne pas sortir des chemins balisés. Au-delà, il reste la voie légale traditionnelle.
Les évaluations fournissent un indicateur le plus souvent fiable, mais au-delà de leur caractère subjectif, il est toujours possible de créer un nouveau pseudo si la réputation du premier devient trop encombrante. Les apparences peuvent être trompeuses, au jeu de l'évaluation réciproque. Par ailleurs, l'échange dématérialisé et déshumanisé, donne le sentiment d'échapper à toute forme de responsabilité. Et pourtant, comparativement aux vide-greniers, les sites d'enchères en ligne offrent plus de matière à l'acheteur pour faire valoir ses droits, le descriptif peut être produit pour justifier d'une tromperie sur la marchandise, par exemple. Conservez l'historique de vos échanges.
Moralité… gardez la tête froide face aux enchères, fixez-vous une limite, écartez les mirages, questionnez le vendeur, ne vous engagez pas dans des tractations en dehors du site, ne soyez ni trop confiant, ni paranoïaque… aujourd'hui la majorité des fraudes atteignent des sommes supérieures à 500 € et concernent majoritairement des produits high-tech (informatique, home cinéma…), proposés à prix cassés… ne cherchez pas l'affaire.
eBay.fr - www.ebay.fr
Aucland.fr - www.aucland.fr
Instructif, le site du groupement Webarnaques est à visiter pour rompre avec la naïveté. Webarnaques, site de prévention et de défense des arnaqués du web - http://webarnaques.free.fr/
A lire…
Part. I - | LA FIEVRE 'VINTAGE' MODIFIE LA PERCEPTION DU CHINEUR|-LA-FIEVRE-VINTAGE-MODIFIE-LA-PERCEPTION-DU-CHINEUR_a102.html
Part. II - | L'ESPACE NUMERIQUE DIABOLISE
Part. III - | L'AFFAIRE EST UNE LEGENDE URBAINE|-L-AFFAIRE-EST-UNE-LEGENDE-URBAINE_a111.html