LA NÛR GALLERY, OU LE DESIGN DE LA DOUCEUR

27/08/2009

Sous les toits de Paris, entre ciel et terre, orient et occident, nuage et éclaircie… Cet atelier des rêves éveillés ouvre un univers comme d’un livre d’images d’où s’échappent des personnages de tissus. Y entrer c’est franchir un seuil et telle Alice, faire un songe éveillé dans cet univers onirique habité de coussins, de mobiles, de guirlandes et installations artistiques. Rencontre avec Cécile Princ.

LA NÛR GALLERY, OU LE DESIGN DE LA DOUCEUR
Des formes de tissus pleines et moelleuses, figuratives, primitives parfois. Des silhouettes portant effigies, reproductions de dessins anciens ou de photographies comme délicatement passées par le temps. Les nounours, lapins, canetons, poupées de la collection Jadis éveillent le souvenir des coffres à jouet d’un temps qui nous est étranger mais au doux parfum de nostalgie. Et nous voici transporté en innocence, à tourner les pages d’un livre d’image, à la découverte des univers multiples de Cécile Princ. Un design à livre ouvert qui nous conte des histoires décoratives peuplées de personnages attachants et rebondis. Un zest de Lewis Carroll, un soupçon de Tim Burton, Cécile Princ n’a pas laissé la vie dévorer ses rêves.
|Ci-dessus. Vol de papillons de la collection Museum, suspendus en guirlande et en coussin à poser, coussin papillon en tissu à pois de la collection Butterfly.

TENDRE ENFANCE
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| Ci-contre. Averse bienveillante suspendue à des nuages sans menace, dans la collection Nuage mobiles.
Sous des abords enfantins, les créations de Cécile Princ touchent tous les âges, comme un texte qui se laisserait lire entre les lignes. La création n’est que tendresse, délicatesse et poésie. Cécile Princ nous touche à l’innocence et l’adulte désarme sans pour autant régresser. Peut être parce que la voie que suit aujourd’hui la créatrice prend sa source à sa tendre enfance. Une vie comme un livre, où chaque chapitre s’ouvre sur une expérience nouvelle à laquelle elle se consacre pleinement. « Petite je voulais faire de la décoration et cette envie est restée dans un coin de ma tête. Déjà, je dessinais beaucoup. J’aime changer d’univers, de mode d’expression. Pour moi, la vie n’est pas linéaire, elle répond à des cycles. J’ai besoin de défis, de montagne à gravir et un jour j’ai eu envie de partir » explique Cécile Princ. Elle étudie l’arabe, en France tout d’abord, puis part en Égypte pratiquement trois ans, puis au Tchad et en Syrie. L’aventure linguistique et culturelle se poursuit jusqu’à l’agrégation. Elle enseigne, fait de la recherche, mais malgré sa passion pour la langue arabe, elle ne s'épanouie pas dans l’enseignement. Avec la naissance de sa seconde fille, elle se tourne vers la traduction et poursuit ses travaux de recherche. Cécile a besoin d’une autre forme d’expression, plus vivante, plus immédiate, plus en adéquation aussi avec sa vie de maman.

PREMIERS PAS
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| Ci-contre. Comme échappés d’un conte de notre enfance, les coussins lapin, poupée et nounours de la collection Jadis rivalisent d’une tendresse attachante.
Elle reprend le dessin, écrit des histoires qu’elle illustre, mais c’est par un presque hasard que Cécile Princ rencontre sa matière d’expression : le tissus. « Ma grand-mère était brodeuse et j’ai toujours eu une tendresse particulière pour le tissus, le tissage ou encore la broderie. » Tel un caillou dans la chaussure, c’est un trou dans la doudoune de sa fille qui agit en révélateur. « J’ai préféré lui faire une pièce qui a rapidement pris la forme d’une poupée russe. » De fil en aiguille et d’une pièce à l’autre, le dessin se perfectionne et l’autodidacte trouve sa voie d’expression. Une sensibilité peut être héritée de sa grand-mère, mais assurément aiguillonnée par l’envie de se confronter à une matière, à un travail qui résiste et ne se laisse pas maitriser facilement. Une envie de simplicité, peu de matière, elle fait de cette restriction sa force motrice, « il faut trouver le chemin. Cela oblige à réfléchir pour contourner l’obstacle » poursuit-elle. L’aventure prend forme avec la création de la Nûr Gallery en novembre 2008.

MARQUE D’AFFECTION
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Déjà des boutiques pour l’enfant sont tombées sous le charme de ces étoffes rebondies, illustrées de jouets anciens, de papillons ou de mammifères marins. Mais Cécile Princ ne se contente pas de charmer nos bambins, ni même de souffler sur les braises de notre innocence. Les ambitions comme les dessins ne manquent pas qu’il s’agisse de luminaires, de mobiliers, la créatrice ne souhaite pas s’imposer de limites de forme, d’usage, de matière, ni même dans l’âge du public auquel elle s’adresse. Mais si elle aime ce mélange de design et d’artisanat, elle travaille également à une exposition sur le thème des têtes, à travers des compositions de têtes peintes ou brodées. Là encore le tissu s’exprime, mais en art premier. Si ses idées de luminaires ont en partie présidé au choix du nom, Nûr (nour) signifie lumière en arabe, la notion de Gallery repose sur l’ambition de développer Nûr sur un chemin rassembleur. « J’aimerai accueillir d’autres créateurs, des artisans, des designers, venus de France mais pas seulement… une occasion de renouer avec l’Égypte et plus généralement le monde arabe avec lequel j’ai de profondes attaches. C’est un peu mon deuxième pays » souligne-t-elle.
|Ci-dessus. Avec la collection des mains, l’esprit s’évade, voyage, part dans une autre rêverie, plus méditative.

L’univers tendre créée par Cécile se peuple aujourd’hui d’objets coussins de tailles et de motifs différents à poser, collectionner, accumuler, qui parfois se laissent suspendre à une poignée, s’accrochent en guirlandes de tendresse ou se font mobiles en nuages goutant de pluie, mais toujours avec une destination décorative. « Bien sur c’est un peu parti du doudou, mais se sont les enfants qui font le doudou et souvent c’est un vieux carré de coton qui gagne leur indéfectible affection. J’avais envie d’objets de décoration pour les enfants mais progressivement le monde des adultes va faire son chemin dans les collections. » La sobriété s’exprime dans les formes comme dans les couleurs, « je cherchais une direction peut être plus contemporaine, sans pour autant négliger la poésie. Avec mes enfants, j’ai l’avantage d’avoir un public à demeure. Je vois si les pièces plaisent ou non, si elles accrochent leur attention ou si au contraire elles les laissent indifférents. J’écoute aussi leurs réactions et cette interaction avec eux est très agréable. La création n’en ait que plus vivante » poursuit Cécile Princ.

COFFRE AUX MERVEILLES
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|Ci-dessus. Bestiaire fantastique des grandes profondeurs ou papillon extraordinaire piqué à la curiosité du collectionneur, la collection Museum semble prélevée à un carnet d’aventures naturelles.

Tissus laissés au naturel de leurs imprimés ou illustrés de nounours, poupées, lapins, baleines, papillons, mains… les collections s’expriment en tonalités douces et neutres. Les papillons de toutes tailles des collections Butterfly et Museum, se posent, se suspendent ou s’accrochent seuls ou en guirlandes. Un cabinet de curiosités inspiré par les aspirations d’anthropologiste de son fils, « Deyrolle est un peu notre deuxième maison et pour lui j’ai voulu capturer une baleine, un hippocampe, mais aussi déposer quelques papillons dans son filets ».

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| Ci-contre. Les papillons colonisent fauteuils, canapés ou lit, alors pourquoi ne pas croiser les espèces de la collection Argent avec celle des collections Butterfly et Museum.

Les illustrations de la collection Jadis reproduisent des illustrations anciennes et des jouets anciens photographiés. Un coffre à jouets qui sera peut être complété de nouveaux personnages comme le cabinet de curiosité Museum qui verra peut être d’autres spécimens d’histoires naturelles. Mais le travail de la main et la variété des tissus employés à la fabrication de petites séries donnent à chaque pièce un caractère particulier, chaque fois la même, mais toujours différente. Des nuages charnus suspendent leurs gouttes, une bonne étoile accrochée à un croissant de lune veillent sur notre sommeil, et déjà un nouveau protagoniste s’avance, Nelson personnage longiligne, entre art primitif et univers à la Tim Burton. « J’aimerai aussi travailler à la commande, réaliser des pièces pour des particuliers ou pour des galeries. C’est très stimulant de réagir à une demande, de réfléchir à une envie qui ne vienne pas de soi » poursuit Cécile Princ.

Quant à ses influences, elles sont nombreuses toutes héritées de ses expériences de vie et d’expression, une richesse mêlée qui fait parti d’elle et se prolonge dans ses créations, une richesse apparentée à sa personnalité qui se mue en un style. « La culture musulmane fait la part belle aux motifs géométriques, aux décors floraux, aux courbes et aux arabesques. Je partage cette sobriété, elle me caractérise aussi » une autre part d’elle avec laquelle elle souhaite un jour renouer, à travers des échanges avec des filatures ou des tisserands locaux, mais aussi à travers les broderies, une passion dans la passion.

PLUS D'INFORMATIONS
Nûr Gallery - nurgallery.canalblog.com

QUELQUES ADRESSES OU LA TROUVER
Serendipity - www.serendipity.fr
Kids Love Design - www.kidslovedesign.com
Figue - www.figue.ch