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TROIS CONSTATATIONS CLES LORS D’UN DIAGNOSTIC D’EPAULE INSTABLE MULTIDIRECTIONELLE : RAPPORT D’INSTABILITE, D’HYPERMOBILITE ET TESTS D’EPAULES SPECIFIQUES D’UN PATIENT

Hegedus vient de publier ce mois-ci en février 2020 dans le JOSPT un article à travers un patient. On vous en propose sa synthèse.



Sonia est une frappeuse extérieure de 18 ans dans une équipe de volley-ball d’école secondaire. Elle joue également dans 2 équipes de voyage et pratique le volley-ball depuis 5 ans. Elle se plaint de douleurs intermittentes à l’épaule avec la sensation que son épaule « lâche ».

Comment aborder le diagnostic de son épaule ? 

DIAGNOSTIC : UNE BASE IMPORTANTE POUR FOURNIR DES SOINS DE HAUTE QUALITE

Le processus du diagnostic clinique repose généralement sur l’interrogatoire du patient à propos de ses antécédents, symptômes, sensations et sur un examen clinique. Notons que ses informations combinées à l’expérience clinique du thérapeute permettent d’émettre l’hypothèse qu’une ou plusieurs structures anatomiques sont susceptibles d’être à l’origine des douleurs du patient. Par exemple les tests pour mettre en évidence une déchirure au niveau des tendons de la coiffe des rotateurs reposent sur des tests actifs/résistifs afin de mettre en évidence une douleur ou faiblesse sur l’un des tendons incriminés. 

Toutefois il est difficile d’identifier avec certitude la source de la douleur par le biais de ces tests du fait de la proximité anatomique avec d’autre structures pouvant être affectées (proximité coiffe des rotateurs/bourse sous-acromial/labrum). Ces lésions tissulaires peuvent avoir une contribution moindre dans les symptômes du patient lorsque celui-ci présente une altération de la perception centrale ou une dominance de facteurs psychosociaux.
La qualité d’un examen clinique pour confirmer ou infirmer une pathologie a été évaluée en comparant les résultats à un gold standard (identification d’une lésion à l’imagerie ou chirurgie). Ainsi le diagnostic d’une rupture du ligament croisé antérieur est relativement précis, en revanche identifier les causes d’une lombalgie peut être plus difficile dû à l’interaction de plusieurs facteurs (augmentation de la prévalence avec l’âge, influence des facteurs psycho-sociaux, pauvre corrélation entre l’imagerie et les symptômes).

EXAMEN CLINIQUE DE SONYA
  • Score de Beighton 7/9
  • Rapporte le fait d’avoir toujours été « laxe ».
  • Amplitudes articulaires de la gléno-humérale excessives bilatéralement
  • Les tests résistifs sont normaux dans chaque plan
  • Appréhension test positif (douleur et appréhension)
  • Postérieur appréhension test positif (appréhension)
  • 110° d’hyper abduction uniquement dans la gléno-humérale : limité par des fourmillements le long du bras 

DIAGNOSTIC D’INSTABILITE MULTIDIRECTIONNELLE

L’épaule instable à des mécanismes de survenue (traumatique, atraumatique), direction (antérieure, postérieure, inférieure) et sévérités (luxation, subluxation) variables. Des systèmes de classification concernant les signes et symptômes ont été mis en place pour définir chaque groupe d’épaule instable. Malgré cela, l’instabilité multidirectionnelle (MDI)souffre d’un manque de clarté diagnostic au même titre que la lombalgie.
Étant donné que les traitements par l’exercice sont les plus fréquemment recommandés dans le cadre d’une MDI, le diagnostic clinique est essentiel pour orienter le traitement. Le diagnostic différentiel peut distinguer la MDI du syndrome d’hyper mobilité qui nécessitent des approches de traitements différentes.
3 points clés à aborder lors du diagnostic d’instabilité multidirectionnelle :
  • Interrogatoire du patient : 
  • Report d’un épisode traumatique ou non 
  • Patient souvent âgé de moins de 35 ans décrivant une « laxité »
  • Patient décrivant des épisodes récidivants de subluxations avec un faible niveau d’irritabilité 
  • Douleur ou sensation d’instabilité en fin d’amplitude de mouvement (un seul plan ou plusieurs plans)
  • Pratique de sport « overhead » pouvant être à l’origine de microtraumatismes répétés
 
  • Comorbidités médicales
  • Évaluation de l’hyper mobilité globale avec le score de Beighton. Le score de Beighton est une série de manœuvres visant à évaluer la mobilité des articulations aux membres supérieur et inférieur (1 point attribué pour chaque articulation, score total sur 9). Un score de 5/9 est considéré positif pour un syndrome d’hyper mobilité bénin. Toutefois un score supérieur devrait faire suspecter une hyper mobilité moins bégnine y compris pour les syndromes de Marfan, Ehler-danlos et Loeys-Dietz. Ces syndromes ayant leur propres critères diagnostics (Genth nosology pour le syndrome de Marfan par exemple) et nécessitant des investigations supplémentaires.
 
 
  • Mesures et tests d’épaules spécifiques 

  • Le test d’appréhension a un rapport de vraisemblance positif de 17
  • Le test d’appréhension postérieur a un rapport de vraisemblance positif de 19
  • Le test d’hyper abduction était utilisé initialement pour l’instabilité inférieure
Les auteurs suggèrent qu’un résultat positif sur 2 de ces 3 tests associés à un score de Beighton positif permettrait de diagnostic une instabilité d’épaule multidirectionnelle

L’évaluation de la translation de la tête huméral par l’examinateur était peu fiable. Les auteurs soulignent qu’une appréhension positive doit prendre le dessus pour le diagnostic sur la douleur (qui diminuerait probablement la précision du diagnostic)

DIAGNOSTIC DE LA PATHOLOGIE D’EPAULE DE SONYA

Basé sur les antécédents de surutilisation dans un mouvement « overhead », la sensation d’épaule « lâche », un score de Beighton supérieur à 5/9des tests d’appréhension positifs et un test d’hyperabduction positif(>105°), les auteurs ont diagnostiqué Sonya comme ayant une instabilité d’épaule multidirectionnelle.

De plus les sensations de picotements dans le bras ne sont pas un test spécifique de MDI mais suggèrent un empiètement de la tête humérale sur le plexus brachial. Notons également que l’apparence de la tête humérale lors du test d’appréhension postérieure n’est pas un test positif mais suggère une laxité de la capsule postérieure. 
Les auteurs suggèrent de renvoyer Sonya pour d’autres tests génétiques ou imageries qu’après application des critères de diagnostic pour des syndromes tels que Ehlers-Danlos ou Marfan

Il n’existe aucun test d’examen clinique validé pour le diagnostic de l’épaule instable multidirectionnelle. Par conséquent, les auteurs suggèrent de combiner les résultats rapportés par les patients et les examens cliniques. Le diagnostic de MDI est important car il permet de la différencier des instabilités unidirectionnelles, des syndromes d’hyper mobilité globaux ou encore la suspicion des syndromes, tel que Marfan afin d’avoir un traitement le plus efficace possible.


THREE KEY FINDINGS WHEN DIAGNOSING SHOULDER MULTIDIRECTIONAL INSTABILITY: PATIENT REPORT OF INSTABILY, HYPERMOBILITY AND SPECIFIC SHOULDER TESTS
ERIC J. HEGEDUS, LORI A. MICHENER, AMEE L. SEITZ
Journal of Orthopaedic & Sports Physical Therapy, 50(2), 52–54. doi:10.2519/jospt.2020.0602