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Cinq ans de prison pour avoir transmis le virus du sida

18 mois ferme pour un homme ayant transmis le sida à deux compagnes et un enfant

Bruno, qui se savait porteur du virus du sida, a contaminé trois de ses compagnes. Bruno, cet homme aujourd’hui âgé de 32 ans avait contracté la maladie à 17 ans, lors de rapports homosexuels non protégés avec un séropositif. Il avait ensuite, au cours des années 2000, transmis sa maladie successivement à trois jeunes femmes ...

SIDA : l'Obligation d’en informer son partenaire sexuel
Cinq ans de prison, dont dix-huit mois ferme, et trois ans et demi assortis d’un sursis avec mise à l’épreuve : la cour d’appel de Montpellier a confirmé intégralement hier la décision du tribunal correctionnel de Perpignan condamnant un jeune homme qui, se sachant porteur du VIH, avait contaminé plusieurs jeunes femmes lors de rapports sexuels non-protégés. « Cette décision prend parfaitement en compte l’état psychologique qui était celui de mon client au moment des faits. C’est une décision juste », a aussitôt déclaré Me Pierre-LouisBassole. « Mes premières pensées vont aux victimes, à toutes les victimes, dont mon client qui a lui-même subi une transmission du VIH. »

Cet homme aujourd’hui âgé de 32 ans avait contracté la maladie à 17 ans, lors de rapports homosexuels non protégés avec un séropositif. Il avait ensuite, au cours des années 2000, transmis sa maladie successivement à trois jeunes femmes.

SIDA : « C’est pas comme de dire à quelqu’un : voilà, j’ai la grippe. »
La première compagne, qui avait eu un premier enfant né avec le sida, n’avait pas porté plainte, et avait eu un second enfant avec lui. La seconde compagne, Magali*, qui l’a connu à 21 ans à Perpignan, est à l’origine de ce procès : elle a déposé plainte contre lui, en découvrant qu’elle et sa petite fille, née sourde, étaient contaminées, parce qu’il leur avait caché sa maladie. La troisième compagne, avec qui il a eu deux enfants ayant échappé au virus, s’était constitué partie civile, mais continue à partager sa vie avec lui. Pour expliquer son attitude, le jeune homme avait raconté qu’à l’époque des faits, il ne se soignait pas et avait peur d’en parler aux jeunes femmes qu’il fréquentait : « C’est pas comme de dire à quelqu’un : voilà, j’ai la grippe. »

Lors du premier procès, le 12 novembre 2010 devant le tribunal correctionnel de Perpignan, le parquet avait réclamé quatre ans de prison ferme, en qualifiant son attitude de « comportement criminel ». Les juges avaient rendu une décision contrastée, augmentant le quantum de la peine, mais en assortissant les trois quarts du sursis. Une décision dont le parquet avait fait appel, ainsi que l’avait expliqué l’avocat général Pierre Valeix à l’audience, le 19 octobre : « La décision du tribunal correctionnel de Perpignan m’apparaît en décalage complet avec la jurisprudence. » Les magistrats ont pourtant répondu le contraire, en refusant d’alourdir la peine à cinq ans dont quatre ferme, ainsi qu’il le réclamait.

Verdict : mise à l'épreuve de 3 ans avec obligation de soins
La cour d'appel de Montpellier a confirmé mardi la peine de 5 ans de prison, dont 3 et demi avec sursis, prononcée à l'encontre d'un homme ayant transmis le virus du sida, alors qu'il se savait atteint, à deux compagnes successives et à l'enfant qu'il avait eu avec l'une d'elles. Cette peine, assortie d'une mise à l'épreuve de 3 ans avec obligation de soins, avait été prononcée par le tribunal correctionnel de Perpignan, en novembre 2009.

A l'issue du délibéré, le parquet avait fait appel, le procureur ayant requis une peine de quatre ans de prison à l'encontre du prévenu, poursuivi pour "transmission de substance nuisible ayant entraîné une infirmité permanente". En appel, l'avocat général avait requis une peine de cinq ans de prison, dont un an avec sursis. Dans son arrêt, la cour d'appel souligne que le prévenu avait confirmé lors de l'audience avoir été contaminé en 2000 et avoir découvert sa séropositivité un an plus tard. Il avait confié n'avoir pas eu le courage d'informer ses compagnes de peur de les perdre, "voulant être comme tout le monde et oublier qu'il était malade". 

La personne atteinte du virus du Sida a l’obligation d’en informer son partenaire sexuel
Avocat de la compagne qui a donné naissance à une enfant contaminée, Me Fabien Large avait demandé, en vain, à la cour d'appel de constater la nature criminelle des faits et souhaité qu'elle se déclare incompétente. Pour Me Large, la transmission du virus s'était faite au détriment d'un "concubin", ceci devant être considéré comme une circonstance aggravante. Ainsi requalifiés, ces faits relevaient à ses yeux d'une cour d'assises. Me Large a annoncé à l'AFP sa décision de se pourvoir en cassation. "Il faut que la place de la victime soit restaurée", a-t-il commenté.

Lire la suite : Pénalisation de la transmission volontaire du Sida

* Prénom d’emprunt

Sida : la personne atteinte du virus a l’obligation d’en informer son partenaire sexuel
« Ça va, on n’est pas obligé de le dire », voilà la réponse provocatrice d’un sidaïque à sa partenaire à qui il avait transmis le virus du Sida, il y a plus de 10 ans.

Dans cette affaire, l’homme atteint du virus avait alors été condamné à deux ans de prison ferme pour délit « d’administration de substance nuisible ayant entraîné une infirmité ou une incapacité permanentes ».

La jurisprudence reste intransigeante sur la question de la transmission du VIH. Hier, la Cour d’appel de Montpellier a seriné aux malades que si, au contraire, ils ont le devoir d’expliquer leur état aux personnes avec lesquelles ils ont des rapports sexuels.

En l’espèce, l’homme ayant tu sa contamination par le VIH, a écopé d’une peine de prison ferme de 18 mois.

La pénalisation de la transmission volontaire du Sida
Comme tout un chacun, une personne atteinte du virus du sida jouit d’une liberté sexuelle. Cette liberté n’est pas consacrée per se par un texte, mais fait partie intégrante d’autres droits. Ainsi, la liberté sexuelle est une composante du droit de disposer librement de son corps, droit au respect de la vie privée (article 9 du Code civil), et du droit à une vie familiale ou conjugale normale. Toutefois, en France, le malade affecté du virus HIV voit sa liberté sexuelle amputée par un devoir d’information concernant sa maladie à l’égard de son partenaire sexuel.

En France, est donc pénalisé le fait de transmettre volontairement le sida par voie sexuelle. En l’espèce, un homme, clairvoyant sur son état, avait transmis le virus du sida à deux de ses maitresses ainsi qu’à l’enfant qui est né d’une de ces unions. Les victimes ont alors déposé plainte et en novembre 2009, le Tribunal correctionnel de Perpignan a prononcé à l’encontre de cet homme une peine de prison de 5 ans, dont 3 ans et demi avec sursis, assortie d’une mise à l’épreuve de 3 ans avec obligation de soins, pour le délit de « transmission de substance nuisible ayant entraîné une infirmité permanente ».

Le procureur de la république a fait alors appel de la décision, et requis une peine plus lourde à l’encontre du prévenu. Hier la Cour d’appel de Montpellier n’a pas accédé à la demande du parquet et a condamné le prévenu à 18 mois de prison ferme, en confirmant la décision des juges de première instance. L’homme dans cette affaire n’a rien d’un dangereux criminel. Il a justifié son silence, concernant sa maladie, à l’égard des ses partenaires, par la crainte de perdre les personnes qu’il a aimées au cours de sa vie. Il a également rappelé vouloir « être comme tout le monde et oublier qu'il était malade ».

Quant aux parties de l’autre côté de la barre, elles ne semblent pas céder à la compassion. La compagne qui a été contaminée par le virus, tout comme l’enfant qu’elle a portée, souhaiterait se pourvoir en cassation. Elle n’apparait pas satisfaite de la décision rendue par les juges du fond, et souhaiterait que l’homme qui l’a contaminée soit poursuivi pour des faits de nature criminelle. « Il faut que la place de la victime soit restaurée », a alors indiqué son avocat, Maître Fabien Large.

Transmission volontaire du Sida : C'est un Crime ?!!
Dans cette affaire, l’homme a été condamné pour le délit d’administration de substances nuisibles, sanctionné par l’article 222-15 du Code pénal. Dans l’état actuel de la jurisprudence, pour sanctionner la transmission volontaire du VIH par l’acte sexuel, les juges ne retiennent pas la qualification criminelle (telle que l’empoisonnement) mais uniquement délictuelle.

L’auteur de la contamination, jugé par le tribunal correctionnel et non par la cour d’assises, est donc poursuivi pour un délit qui débouche sur des peines d’emprisonnement et non sur de la réclusion criminelle. Dans arrêt du 28 juin 2004, le tribunal correctionnel de Strasbourg avait également condamné l’auteur d’une transmission de contamination du sida pour administration de substance nuisible suivie de mutilation ou infirmité permanente. Les juges avaient alors prononcé à son encontre six ans d’emprisonnement, jugement par la suite confirmé par les juges du fond. (Cour d’appel de Colmar 4 janvier 2005).

C’est pourquoi aujourd’hui, pour caractériser le délit d’administration de substances nuisibles, les juges retiennent que le virus du sida est l’élément matériel nocif incriminé et que le mode d’administration de ce virus est la relation sexuelle. Pour le Conseil national du sida, ainsi que les associations de séropositifs, la responsabilité d’une transmission du sida par l’acte sexuel doit être partagée par les deux partenaires. L’un devant communiquer sa maladie, l’autre devant prendre toutes les précautions nécessaires.

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Dossier thématique consacré au Virus du Sida