A défaut de revenu universel  ESPIONNAGE UNIVERSEL avec Grandes z'oreilles
u zinu :

L'article ci-après, ô miracle, va totalement "à contre-courant" de la pensée que nous sommes quotidiennement invités à partager par une presse dont « Le Monde » est le fleuron, mais auquel nous pourrions aisément adjoindre d’autres atlantistes distingués comme Libé ou Médiapart.
Ne parlons pas de l’incongruité de cette contribution par rapport aux commentaires et analyses que nous infligent avec insistance, redondance et persistance les radios et télés du paysage médiatique, qu’il soit d’État ou appartenant à des actionnaires bien identifiés.
Il n'est pas sûr que dans la rédaction même de Marianne l'on s'accorde sur l'opportunité de ce petit brûlot.
Quoiqu’il en soit, saluons ce papier qui nous invite à ne pas pratiquer béatement la liturgie ordinaire de l’orthodoxie dominante.

 

La CIA prise la main dans la sac de l'espionnage


Publié le 08/03/2017 - MARIANNE
Jack Dion
Directeur adjoint de la rédaction
Auteur du livre Le mépris du peuple (LLL).

 
Wikileaks a publié près de 9.000 documents de la CIA confirmant que les services américains pratiquent l’espionnage à grande échelle. Mais la presse s’en moque. Et si c’était les Russes, que dirait-on ?
Depuis des semaines, on nous rebat les oreilles avec les histoires d’espions venus des neiges, équipés du dernier cri de l’arme technologique. Comme au bon vieux temps de la guerre froide et des romans de John Le Carré, on voit la main de Moscou partout : derrière l’élection de Donald Trump, dans les difficultés d’Angela Merkel à la veille des législatives allemandes, et même dans la présidentielle française.
Tous les journaux, à de rares exceptions, ont repris la même antienne. Ils ont redécouvert l’ours russe, décrit comme s’il était toujours soviétique. Ils ont raconté avec moult détail les campagnes de déstabilisation attribuées au Kremlin. Signe particulier de ce dossier : aucune preuve tangible n’est jamais avancée, si ce n’est la mise en scène des informations fournies par les services de renseignement du grand frère américain, que l’on peut croire sur parole puisqu’ils se situent dans le camp du Bien.

Parlons-en, des services américains. Wikileaks a publié 8.761 documents provenant de la CIA. Il s’agirait de la plus importante publication de matériels secrets du renseignement jamais réalisée.
Interrogé sur leur validité, un porte-parole de la CIA, Jonathan Liu, n'a ni confirmé ni démenti l'authenticité de ces documents, ni commenté leur contenu, ce qui est une forme de confirmation par l’embarras.
De son côté, le porte-parole de la Maison Blanche, Sean Spicer, a déclaré lors de son point de presse : « C'est quelque chose qui n'a pas été entièrement évalué ». Quant au président la commission du Renseignement à la Chambre des représentants, Devin Nunes, il a affirmé que ces révélations semblaient « très très sérieuses », avant d’ajouter « Nous sommes très inquiets ».
Il y a de quoi. Le site créé par l'Australien Julian Assange parle d’une « collection extraordinaire, qui représente plusieurs centaines de millions de lignes de codes »dévoilant « la totalité de la capacité de piratage informatique de la CIA ». Ces archives auraient circulé parmi d'anciens pirates du gouvernement américain et sous-traitants, et l’un d'entre eux en aurait remis une partie à Wikileaks.
La CIA peut transformer n’importe quel poste de télévision en appareil d'écoute.
On apprend ainsi que la CIA peut transformer n’importe quel poste de télévision en appareil d'écoute, contourner les applications de cryptage et même contrôler le véhicule de monsieur tout le monde. Ces programmes ont pris pour cible en particulier des iPhone, des systèmes fonctionnant sous Android (Google), le populaire Microsoft ou encore les télévisions connectées de Samsung, pour les transformer en appareils d'écoute à l'insu de leur utilisateur. La CIA se serait également intéressée à la possibilité de prendre le contrôle de véhicules grâce à leurs instruments électroniques.
En piratant les smartphones, la CIA parviendrait à contourner les protections par cryptage de célèbres applications comme WhatsApp, Signal, Telegram, Weibo ou encore Confide, en capturant les communications avant qu'elles ne soient cryptées. Ce qui fait écrire à Wikileaks : « De nombreuses vulnérabilités exploitées par le cyber-arsenal de la CIA sont omniprésentes et certaines peuvent déjà avoir été découvertes par des agences de renseignement rivales ou par des cyber-criminels ».
Dans un communiqué, Julian Assange estime que ces révélations prouvent des « risques extrêmes » en raison de la prolifération hors de toute supervision des « armes » de cyberattaque, sans que les fabricants des appareils visés n’en soient informés. De son côté, Edward Snowden, ex employé de la NSA réfugié à Moscou a affirmé sur Twitter que ces documents semblaient « authentiques ».
Certes, il faut se méfier. En matière d’espionnage, on ne sait jamais qui manipule qui, et on ne peut jamais exclure un coup de billard à plusieurs bandes. On se gardera donc de tirer une conclusion définitive de cette troublante affaire. On rappellera cependant que la CIA, sans apporter le moindre élément de preuve, fait partie des agences qui avaient accusé la Russie d’ingérence dans la campagne présidentielle américaine, via le piratage du parti démocrate et la diffusion, par Wikileaks, des emails d'un proche conseiller de Hillary Clinton.
On remarquera enfin que ceux qui accusent Moscou tous les matins (et qui ont peut-être raison de le faire) devraient être un peu plus circonspects, a fortiori lorsque l’on prétend se méfier des « fausses nouvelles » (pardon : des « fake news »). Ce n’est pas parce que le président américain nage dans les eaux de la post vérité qu’il est le seul à goûter l’exercice.
A ne voir que l’espionnage russe, certains ont fini par oublier qu’il en existait un autre, largement sous estimé et peut-être autrement dangereux. On sait déjà que les services américains ont espionné leurs principaux alliés en piratant leur téléphone, à commencer par Angela Merkel et François Hollande. Tout le monde a passé l’éponge sous prétexte qu’on lave son linge sale en famille et qu’il est plus facile de taper sur Moscou.
Visiblement, l’affaire mériterait d’être examinée avec un peu plus d’attention et un peu plus de sens de l’indépendance nationale, si ce n’est trop demander. Or, pour présenter les dernières révélations de Wikileaks, Le Monde s’est contenté d’un modeste article technique titré : « Iphone, Android, télés : comment la CIA espionne ». On croirait lire des conseils pour des placements financiers ou pour un achat d’appartement. Pas une remarque critique, pas une once de protestation, pas la moindre accusation, pas de commentaire.
On imagine ce qu’aurait écrit Le Monde si c’était la Russie qui était mise en cause. A moins que l’on ne vienne nous expliquer que Julien Assange est un espion au service de Poutine ? Chiche ?

 



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