La guerre d'Algérie d'un jeune appelé corse. Un roman-vérité de Gilles Zerlini.
Il faut un courage certain pour oser relater un triste épisode de la guerre d'Algérie impliquant de manière impartiale  les deux belligérants. C'est l'honneur de Gilles ZERLINI que d'avoir  pris le risque, au nom de la vérité, de rappeler l'horreur d'une guerre qui ne voulait pas dire son nom et d'une terrible répression longtemps occultée.
Guerre de libération coloniale pour les uns, simple "pacification" pour les autres, mais conflit entaché de cruautés respectives ayant marqué de leur empreinte toute une génération de jeunes appelés dont  plus personne n'ose nier qu'ils furent  en quelque sorte, dans leur immense majorité, des "malgré-nous"  jetés dans une guerre sans espoir car à contre courant de l'Histoire.
J.M
 
LETTRE A MES FANTOMES

Algérie 1955. Le gouvernement français qui vient de décréter l’état d’urgence, envoie le contingent pour « pacifier » l’Algérie en pleine insurrection. Le jeune appelé Ferracci débarque à Philippeville pour y découvrir l’ampleur d’une répression qui ne figurera dans aucun livre d’Histoire : massacres de populations civiles et torture systématique, avec son cortège de morts par milliers. L’auteur nous entraîne dans une œuvre de fiction bâtie sur l’expérience de ces jeunes appelés corses qui, rentrés dans leurs foyers, ne se remettront pas d’avoir participé à une telle violence. Il faut tout le talent de Gilles Zerlini pour rendre compte d’une histoire sensible, sans prendre parti entre les différents acteurs de cette tragédie, où tous sont les victimes d’une guerre injuste...

Gilles Zerlini vit à Bastia. Il est l’auteur de Mauvaises nouvelles (2012), de Chutes (2016) et de Sainte Julie de Corse et autres nouvelles (2019) parus aux éditions Materia Scritta. Épuration, paru en 2021 aux Éditions Maurice Nadeau, met en scène un épisode  dramatique de son histoire familiale. 
978-2-86231-434-1   18 €
 
 
Extrait 1

« Marseille-Philippeville direct en bateau. Sur la Feuille de route, il est écrit, affectation au 1er Régiment de Chasseurs Parachutistes, au 1er RCP, à Philippeville quartier Jeanne d’Arc. Mission maintien de l’ordre. L’Algérie c’est la France. C’est pas la guerre, puisque c’est la France, la guerre c’est avec l’étranger. Si on te le dit. C’est rassurant. Finalement, on est des espèces de policiers, des gardiens de la paix en quelque sorte, des pompiers si l’on peut dire, mais déguisés en soldats. Encore un carnaval qui démarre, une Drôle de guerre qui recommence ? Comme en 40 ? C’est quoi cette mascarade ?
Sauf que l’autre, François Mitterrand, ministre de l’intérieur, il a bien employé, le mot guerre dans son discours, lorsqu’il a déclaré à la fin de l’année dernière : «?Je n’admets pas de négociations avec les ennemis de la Patrie. La seule négociation c’est la guerre ! ». Bon.
Si on m’avait dit que c’était la gauche française qui allait me transformer en policier et en assassin, que c’est elle qui allait m’envoyer là-bas pour casser du Bougnoul. Quelle avanie. »
 
Extrait 2

«   Immédiatement les youyous se transforment en hurlements, en stridences aiguës, on tire d’autant plus. Des corps tombent. On tire. La foule tente de se disperser, beaucoup tombent, se piétinent, on avance en formation, tout doucement. Le soleil continue à nous regarder en face, il est un peu descendu sur les crêtes et nous fixe d’autant plus, nous sommes trempés de sueur, les yeux nous piquent, mon arme est brûlante, elle me glisse des mains. Le tissu de mon béret rouge est trempé d’une sueur acide qui pue.
Et puis à un moment donné, après les hurlements d’effroi, les youyous, les balles qui font danser ceux qui tombent, les corps qui s’effondrent et les supplications ; arrive une vague de sang qui descend sur nous, elle touche nos rangers, puis peu à peu le niveau monte, inexorablement. On garde notre position et plus ça crie et plus on tire, il faut le silence, il faut le silence, et plus le niveau monte, jusqu’aux genoux puis jusqu’à la taille et jusqu’à la gorge, la bouche, les narines… mourir noyé dans le sang des autres, dans le sang de l’adversaire. Sentir le liquide chaud couler dans sa gorge puis envahir le nez pour étouffer dans la chair de l’autre, jusqu’à la noyade.
Et puis tout d’un coup le silence enfin, comme la joie de l’apaisement, et puis plus rien, plus un cri, plus de vague de sang.  »

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À l'occasion de la sortie du nouveau roman de Gilles Zerlini, "Lettre à mes fantômes", Patrick Cargnelutti s'entretient avec l'auteur. Il aborde le contexte la vie d'un conscrit corse de vingt ans à Philippeville en 1955 confronté aux massacres et à la torture à grande échelle au début de la Guerre d'Algérie. Le traumatisme d'une génération embourbée dans une guerre qui ne disait pas son nom et dont l'évocation reste encore tabou aujourd'hui. À écouter à 34 minutes du début de l'émission  :
https://www.radioevasion.net/2022/08/11/des-polars-et-des-notes-91-troubles-apparences/

 
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Auteur :  Zerlini Gilles
Date de commercialisation     25/08/2022
Collection livre  Lettres nouvelles
Nombre de pages       128
EAN   9782862314341
ISBN  286231434X
Editeur :  Maurice nadeau

 


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