Culture

Un livre : "L’enfant réparé" ; Un auteur : Grégoire Delacourt


Par Gilette Aho - Publié le Dimanche 23 Juillet 2023 à 12:45

L’enfant réparé : c’est l’histoire autobiographique de Grégoire Delacourt. Aux premières lignes de son livre, il écrit « je suis un écrivain du hasard ». Les mots, les livres l’ont sauvé. Sauvé d’une enfance abimée. Un enfant mort… qu’il a enterré en lui-même.

Je découvrais qu'écrire c'était se rencontrer. C'était redresser un corps de traviole. Pouvoir s'écraser sur le toit d'une Ford Anglia en bas, dans l'avenue, et ne pas mourir.

Écrire c'était vivre et oublier - ce sont ceux qui n'écrivent pas qui se souviennent. C’est en lisant un portrait de lui paru dans le journal Libération qu’il se voit comme dans un miroir : « il y a un enfant mort chez Delacourt et cet enfant c’est lui ». Une phrase qui lui « cassera la gueule ». Il se lance alors dans une longue thérapie. Il se cherche. Cherche cet enfant mort.

Au fil du temps, il se rend compte que ses différents ouvrages écrits ont été comme des cailloux qu’il a semés au cours de son existence.

Au cours des divers chapitres et des séances chez son psy, Grégoire Delacourt mène l’enquête sur son passé. Une
quête de soi qui lui révèle les secousses, les négligences et les trahisons faites à son corps. Pourquoi ? Comment ? Où ? Qui ? L’auteur tire sur les fils des souvenirs, des non-dits. Avec un thérapeute pour guide, il tente et finit par comprendre, les abus, les silences de son père, de sa mère, de la fratrie.
"Il me fallut deux ans pour aboutir à L'Écrivain de la famille. Deux ans à tracer des lignes comme un paysan trace des sillons sans plus vouloir sortir du champ car dehors soudain tout paraît laid, les rues puent, les poubelles débordent de rats et les gens sont malfaisants, alors qu'ici, dans un livre, les mères flamboient, fument des menthols avec grâce, elles ne toussent pas ; vous êtes beau dans un livre, les châtaigniers se baissent jusqu'à terre pour vous caresser, vous flatter, et quand le loup à l'aube vous dévore, c'est un pas de deux, une musique de Schönberg." 

Grégoire Delacourt va comprendre comment la littérature l’a sauvé. Comment l’écriture de ses ouvrages ont été comme des marqueurs afin de ne pas perdre de vue l’enfant mort qu’il portait. Une écriture impressionnante, saisissante avec laquelle il va tenter de réparer l’enfant en lui.
"Pourquoi ce sujet. Pourquoi mes nausées. Pourquoi mon incompétence au bonheur. On ne peut pas se cacher de soi-même."

L’auteur émerge de la rédaction de son livre avec son cadavre d’enfant. Comprendre. Accepter. Se détacher. Au-
delà de la souffrance marquée au fer. Son seul regret ? N’avoir pas pu dire à sa mère « je sais que tu m’as aimée ». Une confession lucide, poignante pour retrouver un chemin calme et renaître.

En suivant ce lien, voici un extrait à lire : L’Enfant réparé  (liseuse-hachette.fr)
L’enfant réparé
Grégoire Delacourt
288 pages
Editions Grasset