ARELACOR



Parmi les nombreuses questions

que soulève la statue de Praxitèle,

quel est le sens de cette épithète

"sauroctone"

accroché au dieu Apollon ?





L'Apollon "tueur de lézard" (sauroctone) est sans doute, après

l'Aphrodite de Cnide, l'une des statues les plus connues de Praxitèle.

Des sources littéraires nombreuses, (Pline, Martial...), des documents

de la numismatique, et un corpus de de vingt répliques romaines

en marbre et en bronze attestent de sa célébrité.


Pourtant la signification, la fonction, la datation soulèvent les

interrogations des archéologues et révèlent leurs divergences.

Pour Pline (Livre XXXIV de son Histoire Naturelle) "Praxitèle a exécuté

en bronze de très nombreux ouvrages, dont un Apollon quem

suaroctonon vocant" c'est à dire "qu'on appelle Sauroctone".


Cet Apollon, une flèche à la main, guette un lézard rampant vers lui.


De même Martial, dans un court poème, décrit un enfant "puer"

à qui il demande d'épargner le lézard qui grimpe vers lui

"il ne désire que périr sous tes doigts".






Apollon Sauroctone, copie du Louvre
Apollon Sauroctone, copie du Louvre






Les répliques présentent les mêmes

caractéristiques : une figure masculine

debout, nue, jeune et imberbe,

en appui sur la jambe droite,

la jambe gauche repliée, le pied gauche

placé derrière le droit, fortement

hanché, le buste basculant vers

la gauche, le bras gauche en appui

sur l'arbre, le droit replié, prêt à

l'action.

Le corps est jeune, presque féminin.



Apollon, tête, détail, copie du Louvre
Apollon, tête, détail, copie du Louvre







Coiffure sophistiquée,

des mèches en accroche cœur

sur les tempes retenues par

un bandeau au-dessus des

oreilles. La tête est inclinée en

direction du support, sans

regarder pour autant l'animal.








Malgré ces traits identiques apparaissent des différences

dans les nombreuses copies suscitant de profondes querelles

entre archéologues pour savoir quelle serait la plus ressemblante

à l'original ! Pour Jean Luc Martinez, la copie du Louvre serait

la réplique la plus fiable..."ce qui ne veut aucunement dire dire

qu'elle soit la plus proche de l'original". (Praxitèle, p.205)







Mêmes incertitudes pour ce qui est du contexte et du sens de la création.

Où cette œuvre a-t'elle été créée, pour qui ?

La signification exacte du geste et de l'épithète "sauroctone" reste tout

aussi mystérieuse.

"Cette appellation symboliserait la fonction d'un

dieu purificateur s'attaquant aux calamités naturelles qui détruisent

les récoltes et les champs. Le lézard ne serait pas le banal et

inoffensif lézard qui se dore au soleil, mais le cruel gros lézard vert

dont tous les paysans craignent la morsure" (Rolley Claude,

La sculpture grecque p.248)







Pour d'autres, la flèche que tient Apollon dans sa main droite,

symboliserait les rayons du soleil éveillant la nature, en l'occurrence

le petit lézard.


C. Picard imagine sur un mode mineur le combat entre Apollon

et le serpent Python.


A. Stewart voit une allusion claire à l'érotisme homosexuel.....


Les interprétations sont multiples et laissent toujours en suspens

l'objet qu'il tenait dans sa main droite.... Une flèche comme Pline

le mentionne? Mais comment tuer un si petit animal d'une flèche?

Que fait le bras gauche ? Barrer la route au lézard?

Que tient ce bras gauche ? L'arc ? La flèche ?

En opposition à ces interprétations meurtrières, se situent

"les romantiques" qui depuis J.J. Winckelmann, sont nostalgiques

d'un Apollon dont la main droite n'affecte aucun geste agressif.

Le regard rêveur est loin de la concentration nécessaire pour

attraper l'animal.

Cette nonchalance, pour J.L. Martinez, fait

penser à la même atmosphère que celle dans laquelle évolue

l'Aphrodite de Cnide.








Le nouveau Sauroctone est installé sur le "Supports/Surfaces de Claude Viallat.

La même forme abstraite répétée à l'infini, sorte d'osselet, sert de support

à Apollon.

Âgé aujourd’hui de 82 ans, C. Viallat, connaît depuis de longues années

une profonde reconnaissance qui lui vaut d'être exposé dans de nombreuses

galeries en France et à l'étranger, ainsi que d'être récompensé par

de nombreux prix.

Ce passionné de tauromachie vit dans sa ville de naissance, Nîmes.








Le nouvel Apollon Sauroctone
Le nouvel Apollon Sauroctone

Bernard Bouisset Lundi 26 Novembre 2018