Par une décision du 2 mars 2018, le Conseil constitutionnel [1] s’est prononcé sur une Question Prioritaire de Constitutionnalité posée par l’Agence France Presse à la suite d’un arrêt rendu par la Chambre criminelle de la Cour de cassation ayant prononcé l’annulation d’une perquisition judiciaire en raison de la présence d’un journaliste qui avait pourtant été autorisée par l’autorité judiciaire. [2]
A cette occasion, le Conseil constitutionnel a rappelé les principes régissant les liens entre le secret de l’instruction et la liberté d’expression protégée par l’article 11 de la DDHC.
Selon l’article 11 du code de procédure pénale :
« Sauf dans le cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure au cours de l’enquête et de l’instruction est secrète. Toute personne qui concourt à cette procédure est tenue au secret professionnel dans les conditions et sous les peines des articles 226-13 et 226-14 du code pénal. Toutefois, afin d’éviter la propagation d’informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à un trouble à l’ordre public, le procureur de la République peut, d’office et à la demande de la juridiction d’instruction ou des parties, rendre publics des éléments objectifs tirés de la procédure ne comportant aucune appréciation sur le bien-fondé des charges retenues contre les personnes mises en cause ».
L’une des limites au secret de l’instruction est donc directement liée à la mission de défense des avocats. Le Conseil constitutionnel l’a d’ailleurs rappelé dans sa décision récente :
« 11. Enfin, il ressort des dispositions contestées que le secret de l’enquête et de l’instruction s’entend « sans préjudice des droits de la défense ». Les parties et leurs avocats peuvent en conséquence communiquer des informations sur le déroulement de l’enquête ou de l’instruction ».
La juridiction constitutionnelle ne s’est toutefois pas prononcée sur cet aspect du secret de l’instruction qui n’était pas le sujet de sa saisine.
Il n’en demeure pas moins que cette problématique est d’une importance considérable dans la société actuelle en raison de l’hyper médiatisation des procès pénaux qui menace les droits de la défense. L’avocat, acteur majeur du procès, fer de lance de la défense pénale, est de plus en plus confronté à l’exposition publique de son client.
En outre, il est souvent dans l’intérêt de la défense de pouvoir s'exprimer publiquement, particulièrement dans les affaires sensibles qui subissent un traitement « particulier », .
L’avocat se trouve alors pris en étau entre deux impératifs, d'une part, celui de respecter les obligations légales attachées à sa fonction, étant dépositaire d’informations confidentielles couvertes par le secret professionnel et le secret de l’instruction, d'autre part celui des besoins de la défense de son client.
L’article 5 du décret n°2005-790 du 12 juillet 2005 relatif aux règles de déontologie de la profession d’avocat (modifié par le décret n°2007-932 du 15 mai 2007 portant diverses dispositions relatives à la profession d’avocat) est ainsi libellé :
« L’avocat respecte le secret de l’enquête et de l’instruction en matière pénale, en s’abstenant de communiquer, sauf pour l’exercice des droits de la défense, des renseignements extraits du dossier, ou de publier des documents, pièces ou lettres intéressant une enquête ou une information en cours.
Il ne peut transmettre de copies de pièces ou actes du dossier de la procédure à son client ou à des tiers que dans les conditions prévues à l’article 114 du code de procédure pénale ».
L’avocat n’est donc pas à proprement parler tenu au respect du secret de l’instruction dans la mesure où il ne figure pas parmi les personnes qui concourent à la procédure d’instruction ou à l’enquête.
Ce sont les règles de la profession d’avocat qui assimilent la violation du secret de l’instruction à une violation du secret professionnel (ex. article 160 du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991, désormais article 5 du décret no 2005-790 du 12 juillet 2005).
Or, la violation du secret professionnel est un délit pénal réprimé par l’article 226-13 du code pénal :
« La révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire, est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende ».
Ce délit est caractérisé lorsque l’avocat a sciemment révélé à une personne étrangère à la procédure le contenu d'un acte couvert par le secret de l'instruction. [3] En principe, l'avocat ne peut donc communiquer à quiconque, sauf à son client pour les besoins de sa défense, des renseignements concernant des procédures pénales. [4]
§I- La violation du secret de l’instruction pour les besoins de la défense
1) L’ensemble des dispositions précitées comporte une importante exception : la violation du secret de l'instruction s'opère « sans préjudice des droits de la défense » ou encore « sauf pour l’exercice des droits de la défense ».
L’interprétation de cette exception à la règle du secret a donné lieu à une divergence d’appréciation entre les juridictions françaises et la Cour européenne des droits de l’Homme.
L’affaire de Maître Gisèle X, avocate des parents d'une enfant décédée d'une maladie survenue après sa vaccination contre l'hépatite B, qui fut renvoyée devant les juges correctionnels et condamnée pour violation du secret professionnel, illustre cette divergence d’approche.
En 2002, Le Parisien publia un article intitulé « Vaccin hépatite B : le rapport qui accuse», accompagné de l'interview de cette avocate. Le laboratoire pharmaceutique en cause déposa plainte pour violation du secret de l'instruction et violation du secret professionnel.
En 2007, l'avocate fut reconnue coupable de violation du secret professionnel mais dispensée de peine par le tribunal correctionnel de Paris. La cour d'appel de Paris confirma ce jugement en 2008 et la Chambre de criminelle de la Cour de cassation rejeta le pourvoi de l’avocate.
Selon les juridictions françaises, « il n'était pas discuté que les propos tenus par Gisèle X... reflétaient la teneur des conclusions de l'expert commis par le magistrat instructeur » de même que « la matérialité du délit n'est donc pas contestable, du fait de la révélation par la prévenue à la presse d'informations contenues dans le rapport d'expertise du docteur Y... et couvertes par le secret de l'instruction ».
Néanmoins, le moyen de défense qu’excipait l’avocate était d’une importance décisive car elle invoquait « que la divulgation d’informations dans les médias …était faite dans l’intérêt des parties civiles » et soutenait que « la Cour d’appel ne pouvait se borner à affirmer qu’il n’était pas démontré que la diffusion en question n’était pas nécessaire à l’exercice des droits de la défense ».
Il est vrai que la jurdiction d’appel s’était très peu expliquée sur ce moyen de défense pourtant essentiel en se contentant d’affirmer « qu'il n'est aucunement démontré que les révélations en cause, au demeurant favorables à la thèse des clients de Gisèle X..., aient été nécessaires à l'exercice des droits de ceux-ci, lesquels droits pouvaient pleinement s'exercer dans le cadre de l'information en cours, sous le contrôle du magistrat instructeur ».
La Chambre criminelle avait, quant à elle, considéré que l’appréciation des faits par la Cour d’appel était souveraine. [5]
2) Mal lui en a pris car saisie par l’avocate, la Cour européenne des droits de l’Homme a condamné la France pour violation de l’article 10 de la Convention garantissant la liberté d’expression. [6]
L’arrêt rendu le 15 décembre 2011 s’inscrit dans une longue tradition jurisprudentielle européenne conférant une protection très forte à la liberté d’expression en y incluant le droit des avocats de s’exprimer sur une affaire en cours dans l’intérêt de leur client, moyennant le respect de certaines règles.
Des instances représentatives de la profession d’avocat étaient intervenues dans la procédure jugée par la CEDH pour rappeler les principes généraux, en particulier le Conseil National des Barreaux (CNB) :
« Le CNB soutient que si, dans le cadre du droit interne, le respect du secret professionnel est un droit pour le client et un devoir pour l’avocat, il peut connaître des exceptions et doit être concilié avec la garantie des droits de la défense ou le droit à l’information, de sorte que la sanction de sa violation doit toujours être justifiée et proportionné.
(…)
Cependant, l’avocat ne peut être sanctionné pénalement s’il a agi dans l’intérêt des droits de la défense de son client. Le CNB ajoute que le droit au secret professionnel est prévu en droit européen et qu’il connaît des exceptions ».
L’avocat « intermédiaires entre les justiciables et les tribunaux » est considéré par la CEDH, comme par la loi française, comme un auxiliaire de justice, ce qui lui confère une position particulière dès lors qu'il « joue un rôle clé pour assurer la confiance du public dans l’action des tribunaux ».
La Cour européenne souligne qu’ «une ingérence dans la liberté d’expression de l’avocat ne peut qu’exceptionnellement passer pour "nécessaire dans une société démocratique’" (voir, notamment, Nikulaet Kyprianou, précités, respectivement §§ 55 et 174) » (§.44).
Certes, le respect du secret de l’instruction est légitime «compte tenu de l’enjeu d’une procédure pénale, tant pour l’administration de la justice que pour le droit au respect de la présomption d’innocence des personnes mises en examen (voir, notamment, Dupuis et autres c. France, req. 1914/02, § 44, 7 juin 2007) ». (§.48)
Toutefois, une ingérence dans la liberté de parole de l’avocat doit être «proportionnée au but légitime poursuivi » et « les motifs invoqués par les juridictions internes, à savoir la nécessité de garantir la non-divulgation d’informations confidentielles », doivent d’être «pertinents et suffisants ». (§.49)
En l’espèce, plusieurs facteurs ont mené à la condamnation de la France.
Tout d’abord le prétendu secret du rapport d’expertise judiciaire avait disparu depuis longtemps. L’avocate n’était pas à l’origine de la divulgation dudit document puisque « l’auteur de la divulgation du rapport en tant que tel à la presse n’a pas été identifié ». Ainsi, « lorsque la requérante a répondu aux questions des journalistes, la presse était déjà en possession de tout ou partie du rapport d’expertise, dont elle voulait révéler l’existence et son contenu au public, en y ajoutant les commentaires de l’avocate des victimes » (§.51).
L’avocate n’avait donc violé aucun secret et la CEDH a d’ailleurs fait part de son incompréhension quant à « l’intérêt qu’il y aurait à exiger de la requérante de ne pas commenter des informations déjà connue des journalistes : ces derniers s’apprêtaient en effet à les diffuser dans leurs médias de manière imminente, et ce manifestement avec ou sans les commentaires de la requérante, (voir, notamment, Weber c. Suisse, 22 mai 1990, § 51, série A n° 177, Vereniging Weekblad Bluf c. Pays-Bas, 9 février 1995, § 41, série A no 306‑A, Fressoz et Roire c. France [GC], no29183/95, § 53, CEDH 1999‑I, et Dupuis et autres, précité, § 45) » (§.56).
A cet égard, la CEDH a démenti la jurisprudence de la Chambre criminelle en s’appuyant sur la protection des droits de la défense :
« Dès lors, la Cour estime qu’au regard des circonstances de l’espèce la protection des informations confidentielles ne pouvait constituer un motif suffisant pour déclarer la requérante coupable de violation du secret professionnel. En particulier, elle considère que la jurisprudence de la Cour de cassation, aux termes de laquelle la connaissance par d’autres personnes de faits couverts par le secret professionnel n’est pas de nature à enlever à ces faits leur caractère confidentiel et secret (paragraphe 31 ci-dessus), ne saurait dispenser les juridictions internes de motiver de façon pertinente et suffisante toute atteinte à la liberté d’expression d’un avocat. La protection de cette liberté doit prendre en compte l’exception prévoyant que l’exercice des droits de la défense peut rendre nécessaire la violation du secret professionnel » (§. 57).
Ainsi, contrairement à ce que juge la Cour de cassation, la révélation préalable d’informations couvertes par le secret de l’instruction doit être prise en compte pour mesurer la liberté de parole de l’avocat, notamment lorsque son discours médiatique est effectué dans l’intérêt des droits de la défense.
Il en est d’autant plus ainsi lorsque, comme en l’espèce, « les déclarations de la requérante s’inscrivaient dans le cadre d’un débat d’intérêt général, s’agissant d’une procédure diligentée pour homicide involontaire à l’initiative de victimes de maladies survenues après une vaccination contre l’hépatite B ». (§.53)
On sait, en effet, que les questions relatives à la santé publique sont considérées depuis longtemps comme étant d’intérêt général, le public étant en droit d’être informé à cet égard. [7]
Cette jurisprudence fait écho à celle relative à la re-divulgation d’informations confidentielles par la presse ; dans ce cas, la protection du secret de l’instruction perd de son importance car l’information est déjà publique et la nécessité de la sanction devient de moins en moins justifiable. [8]
Enfin, l’avocate avait dénoncé les pressions exercées sur l’expert judiciaire par le laboratoire pharmaceutique fabriquant du vaccin litigieux, la CEDH reconnaissant « que les familles des victimes – représentées par la requérante – avaient un intérêt certain, pour leur défense et l’instruction sereine et indépendante de leur plainte, quatre ans après le dépôt de celle-ci, à rapporter au public d’éventuelles pressions extérieures exercées sur l’expert dont l’importance des conclusions n’est pas contestée en l’espèce » (§.59).
La juridiction européenne a donc conclu que « de telles pressions, à les supposer avérées, étant inacceptables et incontestablement de nature à nuire à la bonne marche d’une instruction, la Cour estime que les déclarations de la requérante ne pouvaient passer comme susceptibles de troubler le bon fonctionnement de la justice ou de porter atteinte à la présomption d’innocence de personnes mises en cause. Au contraire, la défense de ses clients pouvait se poursuivre avec une intervention dans la presse dans les circonstances de l’espèce, dès lors que l’affaire suscitait l’intérêt des médias et du public (Alfantakis c. Grèce, no 49330/07, § 33, 11 février 2010) ». (§.59)
Ainsi, compte tenu du contexte hautement médiatique de l'affaire, l'intervention publique de l'avocate relevait d'une intention de défendre les thèses de son client en participant à un débat d’intérêt général, dans une affaire où le secret de l’instruction était déjà largement ébréché.
L'appréciation de la violation du secret de l'instruction par un avocat est donc éminemment conjoncturelle et dépend des circonstances particulières à chaque affaire.
§.II- La présomption d’innocence comme limite à la liberté d'expression
Si les droits de la défense qui autorisent l’avocat à s’exprimer publiquement sur une affaire couverte par le secret de l’instruction sont largement reconnus, la CEDH rappelle régulièrement que le secret de l’instruction a notamment pour but le respect « de la présomption d’innocence des personnes mises en examen (voir, notamment, Dupuis et autres contre France, n°1914/02, §.44, 7 juin 2007), laquelle est une autre composante du procès équitable.
Cette règle régit à la fois la libre expression des avocats mais également celle des journalistes qui s'expriment sur une affaire pénale, ce qui a été rappelé de manière très marquée par la Grande Chambre de la CEDH dans une affaire jugée le 29 mars 2016. [9]
Réformant une décision de chambre rendue le 1er juillet 2014 qui avait décidé que la condamnation d’un journaliste pour violation du secret de l’instruction portait atteinte à la liberté d’expression, la grande chambre de la CEDH admet que l’affaire en question relevait bien d’un débat d’intérêt général, mais considère néanmoins que la condamnation pénale ne heurte pas la liberté d’expression du journaliste.
Dans cette affaire, le tribunal fédéral suisse avait confirmé la condamnation pour violation du secret de l'instruction en relevant notamment que :
« La mise en situation des extraits des procès-verbaux des auditions et la reproduction de lettres du prévenu au juge étaient révélatrices des mobiles qui avaient animé l’auteur des lignes litigieuses, qui s’était borné à faire dans le sensationnel, ne cherchant par son opération qu’à satisfaire la curiosité relativement malsaine que tout un chacun ressent pour ce genre d’affaires. En prenant connaissance de cette publication très partielle, le lecteur se faisait une opinion et préjugeait sans aucune objectivité de la suite qui serait donnée par la justice à cette affaire, sans le moindre respect pour la présomption d’innocence (arrêt entrepris, consid. 2, p. 9 s.) ». (§16)
La CEDH a souligné d’entrée « que le droit du requérant d’informer le public et le droit du public de recevoir des informations se heurtent à des intérêts publics et privés de même importance, protégés par l’interdiction de divulguer des informations couvertes par le secret de l’instruction : ces intérêts sont : l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire, l’effectivité de l’enquête pénale et le droit du prévenu à la présomption d’innocence ». (§.55)
Elle a relevé que « l’article mettait en exergue la vacuité des déclarations du prévenu et ses contradictions, qualifiées parfois explicitement de "mensonges à répétition", pour en conclure, sur le mode interrogatif, que par ‘"ce mélange de naïveté et d’arrogance’"M. B. faisait ‘"tout pour se rendre indéfendable’". La Cour souligne que ces questions faisaient précisément partie de celles que les autorités judiciaires étaient appelées à trancher, tant au stade de l’instruction qu’à celui du jugement », mettant ainsi en exergue une atteinte flagrante à la présomption d’innocence. (§ .60)
Cette violation de la présomption d’innocence était d’autant moins justifiée que la nature des informations divulguées par le journaliste n’apportait rien au débat public, comme le soulignait une fois encore le tribunal fédéral suisse :
« Un tel intérêt public fait en outre manifestement défaut en ce qui concerne les correspondances publiées. On a vu ci-dessus (v. supra consid. 7.3) que ces correspondances ne concernaient quasiment que des critiques émises par l’inculpé à l’adresse de son conseil et des problèmes pratiques tels que des demandes de mise en liberté provisoire et d’accès à des effets personnels, de changement de cellule ou d’autorisation de téléphone. De telles informations n’apportent aucun éclairage pertinent sur l’accident et les circonstances l’entourant. Elles ressortissent à la sphère privée, voire intime, de la personne détenue préventivement et l’on perçoit mal à quel autre intérêt leur publication pouvait répondre qu’une certaine forme de voyeurisme. Il n’en va pas différemment des démarches entreprises par l’intéressé auprès du juge d’instruction en relation avec le choix de son défenseur. On ne discerne pas non plus, en ce qui concerne les procès-verbaux d’audition, quelle question politique ou d’intérêt général se serait posée ou aurait mérité d’être débattue sur la place publique ». (§16)
Or, c’était là une question décisive pour la solution du litige dans la mesure où « la question qui se pose est celle de savoir si le contenu de l’article et, en particulier, les informations qui étaient couvertes par le secret de l’instruction étaient de nature à nourrir le débat public sur le sujet en question (Stoll, précité, § 121 ; voir également Leempoel & S.A. Ed. Ciné Revue, précité, § 72) ou simplement à satisfaire la curiosité d’un certain public sur les détails de la vie strictement privée du prévenu (mutatis mutandis, Von Hannover c. Allemagne, n°59320/00, § 65, CEDH 2004-VI, Société Prisma Presse c. France (déc.), n°66910/01 et 71612/01, 1er juillet 2003, Hachette Filipacchi Associés (ICI PARIS), précité, § 40, Mosley, précité, § 114) ». (§.64)
En l’espèce, la CEDH a constaté le fait que les propos du journaliste « ne laissent aucun doute quant à l’approche sensationnaliste que le requérant avait entendu donner à son article ». (§.60)
En conséquence, la condamnation pour violation du secret de l’instruction a été validée comme non attentatoire à la liberté d’expression.
Selon l’article 11 du code de procédure pénale :
« Sauf dans le cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure au cours de l’enquête et de l’instruction est secrète. Toute personne qui concourt à cette procédure est tenue au secret professionnel dans les conditions et sous les peines des articles 226-13 et 226-14 du code pénal. Toutefois, afin d’éviter la propagation d’informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à un trouble à l’ordre public, le procureur de la République peut, d’office et à la demande de la juridiction d’instruction ou des parties, rendre publics des éléments objectifs tirés de la procédure ne comportant aucune appréciation sur le bien-fondé des charges retenues contre les personnes mises en cause ».
L’une des limites au secret de l’instruction est donc directement liée à la mission de défense des avocats. Le Conseil constitutionnel l’a d’ailleurs rappelé dans sa décision récente :
« 11. Enfin, il ressort des dispositions contestées que le secret de l’enquête et de l’instruction s’entend « sans préjudice des droits de la défense ». Les parties et leurs avocats peuvent en conséquence communiquer des informations sur le déroulement de l’enquête ou de l’instruction ».
La juridiction constitutionnelle ne s’est toutefois pas prononcée sur cet aspect du secret de l’instruction qui n’était pas le sujet de sa saisine.
Il n’en demeure pas moins que cette problématique est d’une importance considérable dans la société actuelle en raison de l’hyper médiatisation des procès pénaux qui menace les droits de la défense. L’avocat, acteur majeur du procès, fer de lance de la défense pénale, est de plus en plus confronté à l’exposition publique de son client.
En outre, il est souvent dans l’intérêt de la défense de pouvoir s'exprimer publiquement, particulièrement dans les affaires sensibles qui subissent un traitement « particulier », .
L’avocat se trouve alors pris en étau entre deux impératifs, d'une part, celui de respecter les obligations légales attachées à sa fonction, étant dépositaire d’informations confidentielles couvertes par le secret professionnel et le secret de l’instruction, d'autre part celui des besoins de la défense de son client.
L’article 5 du décret n°2005-790 du 12 juillet 2005 relatif aux règles de déontologie de la profession d’avocat (modifié par le décret n°2007-932 du 15 mai 2007 portant diverses dispositions relatives à la profession d’avocat) est ainsi libellé :
« L’avocat respecte le secret de l’enquête et de l’instruction en matière pénale, en s’abstenant de communiquer, sauf pour l’exercice des droits de la défense, des renseignements extraits du dossier, ou de publier des documents, pièces ou lettres intéressant une enquête ou une information en cours.
Il ne peut transmettre de copies de pièces ou actes du dossier de la procédure à son client ou à des tiers que dans les conditions prévues à l’article 114 du code de procédure pénale ».
L’avocat n’est donc pas à proprement parler tenu au respect du secret de l’instruction dans la mesure où il ne figure pas parmi les personnes qui concourent à la procédure d’instruction ou à l’enquête.
Ce sont les règles de la profession d’avocat qui assimilent la violation du secret de l’instruction à une violation du secret professionnel (ex. article 160 du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991, désormais article 5 du décret no 2005-790 du 12 juillet 2005).
Or, la violation du secret professionnel est un délit pénal réprimé par l’article 226-13 du code pénal :
« La révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire, est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende ».
Ce délit est caractérisé lorsque l’avocat a sciemment révélé à une personne étrangère à la procédure le contenu d'un acte couvert par le secret de l'instruction. [3] En principe, l'avocat ne peut donc communiquer à quiconque, sauf à son client pour les besoins de sa défense, des renseignements concernant des procédures pénales. [4]
§I- La violation du secret de l’instruction pour les besoins de la défense
1) L’ensemble des dispositions précitées comporte une importante exception : la violation du secret de l'instruction s'opère « sans préjudice des droits de la défense » ou encore « sauf pour l’exercice des droits de la défense ».
L’interprétation de cette exception à la règle du secret a donné lieu à une divergence d’appréciation entre les juridictions françaises et la Cour européenne des droits de l’Homme.
L’affaire de Maître Gisèle X, avocate des parents d'une enfant décédée d'une maladie survenue après sa vaccination contre l'hépatite B, qui fut renvoyée devant les juges correctionnels et condamnée pour violation du secret professionnel, illustre cette divergence d’approche.
En 2002, Le Parisien publia un article intitulé « Vaccin hépatite B : le rapport qui accuse», accompagné de l'interview de cette avocate. Le laboratoire pharmaceutique en cause déposa plainte pour violation du secret de l'instruction et violation du secret professionnel.
En 2007, l'avocate fut reconnue coupable de violation du secret professionnel mais dispensée de peine par le tribunal correctionnel de Paris. La cour d'appel de Paris confirma ce jugement en 2008 et la Chambre de criminelle de la Cour de cassation rejeta le pourvoi de l’avocate.
Selon les juridictions françaises, « il n'était pas discuté que les propos tenus par Gisèle X... reflétaient la teneur des conclusions de l'expert commis par le magistrat instructeur » de même que « la matérialité du délit n'est donc pas contestable, du fait de la révélation par la prévenue à la presse d'informations contenues dans le rapport d'expertise du docteur Y... et couvertes par le secret de l'instruction ».
Néanmoins, le moyen de défense qu’excipait l’avocate était d’une importance décisive car elle invoquait « que la divulgation d’informations dans les médias …était faite dans l’intérêt des parties civiles » et soutenait que « la Cour d’appel ne pouvait se borner à affirmer qu’il n’était pas démontré que la diffusion en question n’était pas nécessaire à l’exercice des droits de la défense ».
Il est vrai que la jurdiction d’appel s’était très peu expliquée sur ce moyen de défense pourtant essentiel en se contentant d’affirmer « qu'il n'est aucunement démontré que les révélations en cause, au demeurant favorables à la thèse des clients de Gisèle X..., aient été nécessaires à l'exercice des droits de ceux-ci, lesquels droits pouvaient pleinement s'exercer dans le cadre de l'information en cours, sous le contrôle du magistrat instructeur ».
La Chambre criminelle avait, quant à elle, considéré que l’appréciation des faits par la Cour d’appel était souveraine. [5]
2) Mal lui en a pris car saisie par l’avocate, la Cour européenne des droits de l’Homme a condamné la France pour violation de l’article 10 de la Convention garantissant la liberté d’expression. [6]
L’arrêt rendu le 15 décembre 2011 s’inscrit dans une longue tradition jurisprudentielle européenne conférant une protection très forte à la liberté d’expression en y incluant le droit des avocats de s’exprimer sur une affaire en cours dans l’intérêt de leur client, moyennant le respect de certaines règles.
Des instances représentatives de la profession d’avocat étaient intervenues dans la procédure jugée par la CEDH pour rappeler les principes généraux, en particulier le Conseil National des Barreaux (CNB) :
« Le CNB soutient que si, dans le cadre du droit interne, le respect du secret professionnel est un droit pour le client et un devoir pour l’avocat, il peut connaître des exceptions et doit être concilié avec la garantie des droits de la défense ou le droit à l’information, de sorte que la sanction de sa violation doit toujours être justifiée et proportionné.
(…)
Cependant, l’avocat ne peut être sanctionné pénalement s’il a agi dans l’intérêt des droits de la défense de son client. Le CNB ajoute que le droit au secret professionnel est prévu en droit européen et qu’il connaît des exceptions ».
L’avocat « intermédiaires entre les justiciables et les tribunaux » est considéré par la CEDH, comme par la loi française, comme un auxiliaire de justice, ce qui lui confère une position particulière dès lors qu'il « joue un rôle clé pour assurer la confiance du public dans l’action des tribunaux ».
La Cour européenne souligne qu’ «une ingérence dans la liberté d’expression de l’avocat ne peut qu’exceptionnellement passer pour "nécessaire dans une société démocratique’" (voir, notamment, Nikulaet Kyprianou, précités, respectivement §§ 55 et 174) » (§.44).
Certes, le respect du secret de l’instruction est légitime «compte tenu de l’enjeu d’une procédure pénale, tant pour l’administration de la justice que pour le droit au respect de la présomption d’innocence des personnes mises en examen (voir, notamment, Dupuis et autres c. France, req. 1914/02, § 44, 7 juin 2007) ». (§.48)
Toutefois, une ingérence dans la liberté de parole de l’avocat doit être «proportionnée au but légitime poursuivi » et « les motifs invoqués par les juridictions internes, à savoir la nécessité de garantir la non-divulgation d’informations confidentielles », doivent d’être «pertinents et suffisants ». (§.49)
En l’espèce, plusieurs facteurs ont mené à la condamnation de la France.
Tout d’abord le prétendu secret du rapport d’expertise judiciaire avait disparu depuis longtemps. L’avocate n’était pas à l’origine de la divulgation dudit document puisque « l’auteur de la divulgation du rapport en tant que tel à la presse n’a pas été identifié ». Ainsi, « lorsque la requérante a répondu aux questions des journalistes, la presse était déjà en possession de tout ou partie du rapport d’expertise, dont elle voulait révéler l’existence et son contenu au public, en y ajoutant les commentaires de l’avocate des victimes » (§.51).
L’avocate n’avait donc violé aucun secret et la CEDH a d’ailleurs fait part de son incompréhension quant à « l’intérêt qu’il y aurait à exiger de la requérante de ne pas commenter des informations déjà connue des journalistes : ces derniers s’apprêtaient en effet à les diffuser dans leurs médias de manière imminente, et ce manifestement avec ou sans les commentaires de la requérante, (voir, notamment, Weber c. Suisse, 22 mai 1990, § 51, série A n° 177, Vereniging Weekblad Bluf c. Pays-Bas, 9 février 1995, § 41, série A no 306‑A, Fressoz et Roire c. France [GC], no29183/95, § 53, CEDH 1999‑I, et Dupuis et autres, précité, § 45) » (§.56).
A cet égard, la CEDH a démenti la jurisprudence de la Chambre criminelle en s’appuyant sur la protection des droits de la défense :
« Dès lors, la Cour estime qu’au regard des circonstances de l’espèce la protection des informations confidentielles ne pouvait constituer un motif suffisant pour déclarer la requérante coupable de violation du secret professionnel. En particulier, elle considère que la jurisprudence de la Cour de cassation, aux termes de laquelle la connaissance par d’autres personnes de faits couverts par le secret professionnel n’est pas de nature à enlever à ces faits leur caractère confidentiel et secret (paragraphe 31 ci-dessus), ne saurait dispenser les juridictions internes de motiver de façon pertinente et suffisante toute atteinte à la liberté d’expression d’un avocat. La protection de cette liberté doit prendre en compte l’exception prévoyant que l’exercice des droits de la défense peut rendre nécessaire la violation du secret professionnel » (§. 57).
Ainsi, contrairement à ce que juge la Cour de cassation, la révélation préalable d’informations couvertes par le secret de l’instruction doit être prise en compte pour mesurer la liberté de parole de l’avocat, notamment lorsque son discours médiatique est effectué dans l’intérêt des droits de la défense.
Il en est d’autant plus ainsi lorsque, comme en l’espèce, « les déclarations de la requérante s’inscrivaient dans le cadre d’un débat d’intérêt général, s’agissant d’une procédure diligentée pour homicide involontaire à l’initiative de victimes de maladies survenues après une vaccination contre l’hépatite B ». (§.53)
On sait, en effet, que les questions relatives à la santé publique sont considérées depuis longtemps comme étant d’intérêt général, le public étant en droit d’être informé à cet égard. [7]
Cette jurisprudence fait écho à celle relative à la re-divulgation d’informations confidentielles par la presse ; dans ce cas, la protection du secret de l’instruction perd de son importance car l’information est déjà publique et la nécessité de la sanction devient de moins en moins justifiable. [8]
Enfin, l’avocate avait dénoncé les pressions exercées sur l’expert judiciaire par le laboratoire pharmaceutique fabriquant du vaccin litigieux, la CEDH reconnaissant « que les familles des victimes – représentées par la requérante – avaient un intérêt certain, pour leur défense et l’instruction sereine et indépendante de leur plainte, quatre ans après le dépôt de celle-ci, à rapporter au public d’éventuelles pressions extérieures exercées sur l’expert dont l’importance des conclusions n’est pas contestée en l’espèce » (§.59).
La juridiction européenne a donc conclu que « de telles pressions, à les supposer avérées, étant inacceptables et incontestablement de nature à nuire à la bonne marche d’une instruction, la Cour estime que les déclarations de la requérante ne pouvaient passer comme susceptibles de troubler le bon fonctionnement de la justice ou de porter atteinte à la présomption d’innocence de personnes mises en cause. Au contraire, la défense de ses clients pouvait se poursuivre avec une intervention dans la presse dans les circonstances de l’espèce, dès lors que l’affaire suscitait l’intérêt des médias et du public (Alfantakis c. Grèce, no 49330/07, § 33, 11 février 2010) ». (§.59)
Ainsi, compte tenu du contexte hautement médiatique de l'affaire, l'intervention publique de l'avocate relevait d'une intention de défendre les thèses de son client en participant à un débat d’intérêt général, dans une affaire où le secret de l’instruction était déjà largement ébréché.
L'appréciation de la violation du secret de l'instruction par un avocat est donc éminemment conjoncturelle et dépend des circonstances particulières à chaque affaire.
§.II- La présomption d’innocence comme limite à la liberté d'expression
Si les droits de la défense qui autorisent l’avocat à s’exprimer publiquement sur une affaire couverte par le secret de l’instruction sont largement reconnus, la CEDH rappelle régulièrement que le secret de l’instruction a notamment pour but le respect « de la présomption d’innocence des personnes mises en examen (voir, notamment, Dupuis et autres contre France, n°1914/02, §.44, 7 juin 2007), laquelle est une autre composante du procès équitable.
Cette règle régit à la fois la libre expression des avocats mais également celle des journalistes qui s'expriment sur une affaire pénale, ce qui a été rappelé de manière très marquée par la Grande Chambre de la CEDH dans une affaire jugée le 29 mars 2016. [9]
Réformant une décision de chambre rendue le 1er juillet 2014 qui avait décidé que la condamnation d’un journaliste pour violation du secret de l’instruction portait atteinte à la liberté d’expression, la grande chambre de la CEDH admet que l’affaire en question relevait bien d’un débat d’intérêt général, mais considère néanmoins que la condamnation pénale ne heurte pas la liberté d’expression du journaliste.
Dans cette affaire, le tribunal fédéral suisse avait confirmé la condamnation pour violation du secret de l'instruction en relevant notamment que :
« La mise en situation des extraits des procès-verbaux des auditions et la reproduction de lettres du prévenu au juge étaient révélatrices des mobiles qui avaient animé l’auteur des lignes litigieuses, qui s’était borné à faire dans le sensationnel, ne cherchant par son opération qu’à satisfaire la curiosité relativement malsaine que tout un chacun ressent pour ce genre d’affaires. En prenant connaissance de cette publication très partielle, le lecteur se faisait une opinion et préjugeait sans aucune objectivité de la suite qui serait donnée par la justice à cette affaire, sans le moindre respect pour la présomption d’innocence (arrêt entrepris, consid. 2, p. 9 s.) ». (§16)
La CEDH a souligné d’entrée « que le droit du requérant d’informer le public et le droit du public de recevoir des informations se heurtent à des intérêts publics et privés de même importance, protégés par l’interdiction de divulguer des informations couvertes par le secret de l’instruction : ces intérêts sont : l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire, l’effectivité de l’enquête pénale et le droit du prévenu à la présomption d’innocence ». (§.55)
Elle a relevé que « l’article mettait en exergue la vacuité des déclarations du prévenu et ses contradictions, qualifiées parfois explicitement de "mensonges à répétition", pour en conclure, sur le mode interrogatif, que par ‘"ce mélange de naïveté et d’arrogance’"M. B. faisait ‘"tout pour se rendre indéfendable’". La Cour souligne que ces questions faisaient précisément partie de celles que les autorités judiciaires étaient appelées à trancher, tant au stade de l’instruction qu’à celui du jugement », mettant ainsi en exergue une atteinte flagrante à la présomption d’innocence. (§ .60)
Cette violation de la présomption d’innocence était d’autant moins justifiée que la nature des informations divulguées par le journaliste n’apportait rien au débat public, comme le soulignait une fois encore le tribunal fédéral suisse :
« Un tel intérêt public fait en outre manifestement défaut en ce qui concerne les correspondances publiées. On a vu ci-dessus (v. supra consid. 7.3) que ces correspondances ne concernaient quasiment que des critiques émises par l’inculpé à l’adresse de son conseil et des problèmes pratiques tels que des demandes de mise en liberté provisoire et d’accès à des effets personnels, de changement de cellule ou d’autorisation de téléphone. De telles informations n’apportent aucun éclairage pertinent sur l’accident et les circonstances l’entourant. Elles ressortissent à la sphère privée, voire intime, de la personne détenue préventivement et l’on perçoit mal à quel autre intérêt leur publication pouvait répondre qu’une certaine forme de voyeurisme. Il n’en va pas différemment des démarches entreprises par l’intéressé auprès du juge d’instruction en relation avec le choix de son défenseur. On ne discerne pas non plus, en ce qui concerne les procès-verbaux d’audition, quelle question politique ou d’intérêt général se serait posée ou aurait mérité d’être débattue sur la place publique ». (§16)
Or, c’était là une question décisive pour la solution du litige dans la mesure où « la question qui se pose est celle de savoir si le contenu de l’article et, en particulier, les informations qui étaient couvertes par le secret de l’instruction étaient de nature à nourrir le débat public sur le sujet en question (Stoll, précité, § 121 ; voir également Leempoel & S.A. Ed. Ciné Revue, précité, § 72) ou simplement à satisfaire la curiosité d’un certain public sur les détails de la vie strictement privée du prévenu (mutatis mutandis, Von Hannover c. Allemagne, n°59320/00, § 65, CEDH 2004-VI, Société Prisma Presse c. France (déc.), n°66910/01 et 71612/01, 1er juillet 2003, Hachette Filipacchi Associés (ICI PARIS), précité, § 40, Mosley, précité, § 114) ». (§.64)
En l’espèce, la CEDH a constaté le fait que les propos du journaliste « ne laissent aucun doute quant à l’approche sensationnaliste que le requérant avait entendu donner à son article ». (§.60)
En conséquence, la condamnation pour violation du secret de l’instruction a été validée comme non attentatoire à la liberté d’expression.
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La conclusion qui s’impose est que l’avocat jouit d’une liberté de parole très étendue à condition que ses propos s’inscrivent dans un débat d’intérêt général et qu’ils tendent à la défense de son client, sans porter atteinte à la présomption d’innocence que tend à protéger le secret de l’instruction.
[1] CC, 2 mars 2018, n° 2017-693 QPC.
[2] 2 Crim, 10 janvier 2017, n°16-84740.
[3] Crim, 18 sept. 2001, no 00-86518, Bull. Crim, no 179 ; JCP 2001. IV. 2170 ; D. 2001. IR 3171.
[4] Crim. 18 déc. 2001, no 01-84.170 , Bull. crim. no 273 ; JCP 2002. IV. 1394 ; Crim. 27 oct. 2004, no 04-81.513, Bull. crim. no 259.
[5] Crim, 28 octobre 2008, n°08-81432.
[6] CEDH, MOR c. France, req. n°28198/09, 15 décembre 2011 ; CEDH, arrêt Mamère c. France, n°12697/03, 7 février 2007.
[8CEDH, arrêt Weber c/ Suisse du 22 mai 1990 ; CEDH, arrêt Vereniging Weekblad Bluf c. Pays-Bas du 9 février 1995.
[9] CEDH, arrêt du 29 mars 2016, Bedat c. Suisse, n°56925/08.







