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Rencontres

| DEYROLLE, LA MAISON D'HISTOIRES NATURELLES

Par Barbara Poirette

Si depuis sa fondation en 1831, par Jean-Baptiste Deyrolle, la maison éponyme n'a rien perdu de sa vocation pédagogique, les motivations qui conduisent nos pas jusqu'à son seuil ont connu de nombreux élans : trophées naturalisés, entomologie, nostalgie écolière, cabinet de curiosité… Depuis sa création l'enseigne continue d'attirer par son atmosphère hors du commun, collectionneurs, amateurs, curieux de leçon de choses et d'histoires naturelles…




L'histoire de Deyrolle s'écrit à la passion d'une famille. Avec son fils Achille, Jean-Baptiste Deyrolle développent un commerce de vente d'insectes, de matériel de chasse destiné aux collections d'histoire naturelle ainsi qu'une activité de taxidermie. Petit-fils du fondateur, Emile Deyrolle poursuit l'aventure et installe la maison familiale à son adresse actuelle. En 1866, il reprend le flambeau, développe le matériel d'enseignement et surtout l'édition de planches murales colorées. Des cours préparatoires aux classes universitaires, ces fameuses planches pédagogiques ont accompagné des générations d'élèves dans leur apprentissage des choses de la natures, botanique, zoologie, entomologie, géographie, anatomie…

A CHACUN SA NATURE


| DEYROLLE, LA MAISON D'HISTOIRES NATURELLES
Aujourd'hui encore, la vocation première de l'enseigne s'illustre dans une composition du genre naturel, abritée dans l'écrin de l'hôtel particulier de la rue du Bac. Pédagogie, goût de la collection et inspiration continuent de faire bon ménage entre ses murs. Collections d'entomologie, animaux naturalisés, minéraux, coquillages, planches pédagogiques, cet inventaire de choses variées prend des allures de cabinets de curiosité. Mais la curiosité de la nature des choses n'est jamais très éloignée de l'apprentissage. Exceptionnel à plus d'un titre, le lieu a inspiré et séduit nombre de générations mais aussi un cortège de personnalités, de peintres dont George Buffet, Salvador Dali, André Breton... d'écrivains comme Louise de Vilmorin ou de philosophes comme Théodore Monod.

En quête de sens ou d'inspiration, les artistes continuent de fréquenter le lieu pour son atmosphère si particulière. "Deyrolle n'a jamais eu la vocation d'un cabinet de curiosités, bien que cette maison l'évoque par la nature et l'assemblage de son contenu. Sa vocation première reste pédagogique, même si au fil des années la fréquentation montre un public varié dont les motivations vont de l'apprentissage au cabinet de curiosités", souligne Dominique Guéroult.
De tous temps les collectionneurs naturalistes ont trouvé ici matière à exprimer leur passion à travers les collections de minéraux, de coquillages, de papillons, d'insectes, d'herbier ou les matériels de récolte botanique ou zoologique. Si la taxidermie a longtemps servi de support à l'enseignement de la zoologie, elle a également attiré bon nombre de chasseurs venus faire naturaliser leurs trophées dans les règles de l'art. Bien évidemment les collectionneurs et les amateurs de curiosités ont de tous temps trouvé ici de quoi nourrir leur inspiration et leur collection… Particuliers et décorateurs portés par la tendance ou par leur goût des choses de la nature viennent régulièrement satisfaire leur passion ou aiguiser leur curiosité.

VOYAGES EXTRAORDINAIRES


| DEYROLLE, LA MAISON D'HISTOIRES NATURELLES
La lignée familiale s'arrête en 1970. Après plusieurs propriétaires, le Prince Louis Albert de Broglie reprend Deyrolle en 2001. Il épouse l'aventure de l'enseigne et s'attache à la perpétuer. Le lieu est rénové et la magie préservée. Au premier étage, les murs retrouvent leur couleur verte d'origine et les boiseries leur dorures d'antan. Dans ce lieu hors du commun, rien n'est jamais figé. Les rêveurs peuvent y voir les figures de Jean de La Fontaine, y croiser le lapin blanc d'Alice… Ici l'animal est roi, au point d'habiter l'espace d'une présence palpable et saisissante. Comme cette petite antilope d’Afrique de l’Est (petit Koudou) dont la peau tendue semble encore parcourue de frissons… Comme ce tigre dont la vue fait naître une fascination mêlée de crainte instinctive…
Dans un télescopage digne de l'Arche, un élan du Canada côtoie un babouin d'Afrique australe, un lapin et un mouton de nos campagnes, un ours polaire, un crocodile du Nil, un buffle d'Afrique, une grue couronnée… Plus d'une centaine d'animaux naturalisés peuplent la Galerie de l'Evolution. Les grandes vitrines prennent des allures de volières extraordinaires ou explorent les profondeurs silencieuses. Les meubles de métier se prêtent à l'accumulation. L'enfilade accueille petits mammifères et oiseaux de toutes espèces, chouettes Effraie, taupes, écureuils de Corées, poussins, œufs d'autruche décorés, corbeaux… "Les chouettes passionnent par toute la symbolique qu'elles incarnent, tout comme les corbeaux qui ont un énorme succès" explique Dominique Guéroult. Les meubles à plan recèlent dans leurs tiroirs des collections de coquillages, de minéraux et de fossiles sous l'œil des trophées, ici une tête de buffle equinoxalis, là une tête de taureau, plus loin une tête de waterbuck ou de springbok…

L'ÉCOLE DE LA NATURE


| DEYROLLE, LA MAISON D'HISTOIRES NATURELLES
Si les planches pédagogiques ont progressivement déserté les murs des écoles, une grande partie de ce patrimoine subsiste. Espace aménagé à la transmission des savoirs, la salle de classe abrite la collection de planches anciennes, leurs rééditions et les nouvelles planches qui se font l'écho de leur époque en soulignant la diversité et la protection de la nature. Ces tableaux de l'enfance toujours aussi appréciés, ravivent les souvenirs des anciens écoliers et s'affichent en décoration qui fait sens.

Le parquet Versailles également restauré, a pris de nouvelles fonctions et habille les murs rouges de sa chaleur. Sous nos pas le nouveau parquet rompt son rythme régulier. Recouvert d'une vitre, un espace découvert sous le plancher est désormais habité d'une faune aquatique et de coraux. Encadré d'un âne surplombé d'un faucon Gerfaut, d'une autruche impressionnante par sa stature extraordinaire et d'un paon, le vieux massicot accueille des éclatés de homard et de langouste sous globes ainsi qu'un bénitier. "Certains coquillages offrent des tailles exceptionnelles, d'autres comme les nautiles incarnent la perfection. Les gorgones, le corail sont également très prisés. Les coraux sont protégés, c'est pourquoi nous utilisons des branches de la steppe mexicaine, peintes et travaillées de manière à imiter le corail. Les œufs d'autruche plaisent beaucoup. Thème classique du cabinet de curiosités, ils sont aussi recherchés pour leur esthétique, d'autant que certains sont très sont très décorés" poursuit Dominique Guéroult.

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Sur un meuble de marqueterie, une mâchoire de requin encadre deux oiseaux, à coté d'un crabe à poids, d'un nautile et de squelettes d'oursins plats… Accumulations hétéroclites de minéraux étonnants, d'œufs d'autruche montés sur socle ou décorées, d'éclatés de crustacés, de pièces uniques et d'antiquité animalières… célèbrent l'esprit du cabinet de curiosité.

La dernière pièce est réservée à l'entomologie. Des centaines de papillons et d'insectes venus de tous horizons sont classés par famille et par continent. Un panel extraordinaire, riche de finesse, de beautés variées mais aussi de bizarreries : scarabée Goliathus-Goliathus du Cameroun, Goliathus Orientalys, Acheroncia Astrotos de Roumanie… Sur les murs, les boites entomologiques garnies d'insectes étonnants ou de papillons multicolores continue d'animer la passion des amateurs, tandis que de grands meubles comptoir conservent dans le secret de leurs tiroirs le matériel nécessaire à la chasse et à la conservation des espèces. "Ainsi se perpétue la philosophie de Deyrolle : connaître la nature pour mieux la préserver" conclut Dominique Guéroult.

Note aux lecteurs : les activités traditionnelles de taxidermie de Deyrolle se poursuivent aujourd'hui encore. Les animaux proviennent des collections anciennes de Deyrolle ou ont été naturalisés plus récemment par des taxidermistes de renom à partir d’animaux issus de réserves zoologiques, de cirques ou d’élevages pour les oiseaux. La Convention de Washington, qui veille à ce que le commerce international des animaux ne menace pas la survie des espèces, est scrupuleusement respectée dans les choix de l'enseigne.

Pour en savoir plus sur Deyrolle : www.deyrolle.fr


1 Janvier 2008



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