Après le Front de gauche, premier à proposer un plafond absolu à 360 000 eu-ros par an, soit 30 000 euros mensuels, tous les candidats y vont de leur proposition sur un thème qui fait un retour en force dans le débat politique.
«Salaire maximal ». L’expression est d’apparition récente dans le débat politique français, mais elle s’est imposée rapidement devant l’écart grandissant entre les rémunérations des hauts cadres et dirigeants d’entreprise, et celles de l’immense majorité. Une exigence éthique, mais pas seulement. Pour Jean-Luc Mélenchon, candidat à la présidentielle du Front de gauche, qui a été le premier acteur politique à la populariser, couplée à la création d’un taux d’écart maximal des salaires d’un à vingt, à l’échelle de chaque entreprise, la proposition obligerait à tirer l’ensemble des salaires vers le haut à chaque augmentation que s’octroieraient les dirigeants. Ou comment concilier justice et efficacité.
75 % des Français pour un salaire maximal
En fait, l’idée d’un salaire maximal n’est pas neuve. Elle serait même probablement née en France, sous la Commune de Paris, il y a près d’un siècle et demi, selon Claudine Rey, coprésidente des Amis de la Commune (voir l’Humanité du 30 mars 2011). Elle était présente dans la proposition du candidat communiste à la présidentielle de 1981, Georges Marchais, de taxer à 100 % les revenus supérieurs à 40 000 francs mensuels de l’époque. Elle revient en force aujourd’hui : 75 % des Français, selon un sondage Ifop pour l’Humanité publié le 11 janvier 2011, se déclaraient favorables à « la fixation d’un salaire maximal » pour les dirigeants des grandes entreprises. L’approbation montait à 84 % pour les sympathisants de gauche, une forte majorité (58 %) des sympathisants UMP l’approuvant également. Est-ce cette exigence, désormais partagée par l’électorat de gauche comme de droite, et dont il n’y a pas lieu de croire qu’elle se soit émoussée depuis, qui pousse tous les candidats à se situer sur ce terrain ? Après le Front de gauche qui propose un plafond absolu à 360 000 euros par an, soit 30 000 euros mensuels, équivalant à vingt fois le salaire médian, Europe Écologie-les Verts (EELV) s’est calé dans son sillage en se prononçant à son tour pour un revenu maximal acceptable (RMA), fixé à trente fois le Smic, soit un niveau à peu près identique à celui proposé par le Front de gauche et « au-delà duquel le taux d’imposition est d’au moins 80 % », explique Jérôme Gleizes, membre du bureau exécutif d’EELV. François Hollande, quant à lui, se prononce aussi pour un écart maximal d’un à vingt entre le bas et le haut de l’échelle, à la différence près que la mesure serait limitée aux dirigeants d’entreprises dont l’État est présent au capital, ce qui limite singulièrement son champ.
Le président candidat feint de réagir
Dernièrement, c’est Nicolas Sarkozy lui-même qui est revenu à la charge sur le sujet, mercredi soir, sur France 2, au terme d’un quinquennat de promesses de moralisation des pratiques des dirigeants quasiment toutes avortées (voir ci-contre). Après l’augmentation de 34 % que se sont accordée les patrons du CAC40 en 2010, soit une rémunération moyenne de 244 Smic par personne (4,1 millions d’euros), selon une étude du cabinet Proxinvest, le président candidat pouvait difficilement ne pas faire mine de réagir… comme la droite le fait régulièrement sur le mode de l’indignation étonnée, sans que cela ne soit suivi d’effet. Exemple : François Fillon, le 20 juin 2011, qui se disait « choqué de voir des progressions de salaires pour quelques-uns totalement déconnectées de la réalité économique de l’entreprise et des négociations salariales ». Qu’a-t-il fait par la suite pour y mettre fin ? Rien.
Pourtant, il y a urgence à agir. « Entre 2004 et 2008, le revenu des 0,01 % des plus riches a augmenté en moyenne de 180 400 euros par an, alors que le revenu des 50 % des plus modestes connaissait une augmentation moyenne de 900 euros par an », expliquait la députée PCF Marie-George Buffet dans l’Humanité du 3 février. Une proposition nécessaire, donc, mais non suffisante, rappelait l’économiste de la CGT, Nasser Mansouri-Guilani, dans nos colonnes, le 11 septembre 2010 : « Il y a besoin d’un volet politique, c’est évident. Bien sûr, la loi peut décider d’un certain nombre de choses. Mais il faut partir des réalités de terrain. (…) Il y a des comités d’entreprise. Dans certains cas, il y a aussi des administrateurs salariés. Alors il faut utiliser ces droits et il faut lutter pour les élargir. Si l’on ne procède pas ainsi, en développant des luttes à partir des droits existants, en créant les rapports de forces dans l’entreprise, la loi ne suffira pas. »
L’Amérique l’a fait... il y a 60 ans !
En 1942, Franklin Roosevelt avait imposé qu’aucun revenu après impôts n’excède 25 000 dollars par an, l’équivalent de 315 000 dollars aujourd’hui, soit 8,5 fois le revenu médian et 25 fois le plus bas salaire à plein temps. De 1951 à 1964, le taux d’imposition de la tranche de revenus la plus élevée était de 91 % ! Un argument à méditer par ceux qui agitent la menace de la fuite des capitaux à l’étranger. À partir des années 1980, il a chuté pour osciller entre 28 et 35 %, en même temps que prospéraient les paradis fiscaux.
Sébastien Crépel, L'Humanité, 24 février 2012
75 % des Français pour un salaire maximal
En fait, l’idée d’un salaire maximal n’est pas neuve. Elle serait même probablement née en France, sous la Commune de Paris, il y a près d’un siècle et demi, selon Claudine Rey, coprésidente des Amis de la Commune (voir l’Humanité du 30 mars 2011). Elle était présente dans la proposition du candidat communiste à la présidentielle de 1981, Georges Marchais, de taxer à 100 % les revenus supérieurs à 40 000 francs mensuels de l’époque. Elle revient en force aujourd’hui : 75 % des Français, selon un sondage Ifop pour l’Humanité publié le 11 janvier 2011, se déclaraient favorables à « la fixation d’un salaire maximal » pour les dirigeants des grandes entreprises. L’approbation montait à 84 % pour les sympathisants de gauche, une forte majorité (58 %) des sympathisants UMP l’approuvant également. Est-ce cette exigence, désormais partagée par l’électorat de gauche comme de droite, et dont il n’y a pas lieu de croire qu’elle se soit émoussée depuis, qui pousse tous les candidats à se situer sur ce terrain ? Après le Front de gauche qui propose un plafond absolu à 360 000 euros par an, soit 30 000 euros mensuels, équivalant à vingt fois le salaire médian, Europe Écologie-les Verts (EELV) s’est calé dans son sillage en se prononçant à son tour pour un revenu maximal acceptable (RMA), fixé à trente fois le Smic, soit un niveau à peu près identique à celui proposé par le Front de gauche et « au-delà duquel le taux d’imposition est d’au moins 80 % », explique Jérôme Gleizes, membre du bureau exécutif d’EELV. François Hollande, quant à lui, se prononce aussi pour un écart maximal d’un à vingt entre le bas et le haut de l’échelle, à la différence près que la mesure serait limitée aux dirigeants d’entreprises dont l’État est présent au capital, ce qui limite singulièrement son champ.
Le président candidat feint de réagir
Dernièrement, c’est Nicolas Sarkozy lui-même qui est revenu à la charge sur le sujet, mercredi soir, sur France 2, au terme d’un quinquennat de promesses de moralisation des pratiques des dirigeants quasiment toutes avortées (voir ci-contre). Après l’augmentation de 34 % que se sont accordée les patrons du CAC40 en 2010, soit une rémunération moyenne de 244 Smic par personne (4,1 millions d’euros), selon une étude du cabinet Proxinvest, le président candidat pouvait difficilement ne pas faire mine de réagir… comme la droite le fait régulièrement sur le mode de l’indignation étonnée, sans que cela ne soit suivi d’effet. Exemple : François Fillon, le 20 juin 2011, qui se disait « choqué de voir des progressions de salaires pour quelques-uns totalement déconnectées de la réalité économique de l’entreprise et des négociations salariales ». Qu’a-t-il fait par la suite pour y mettre fin ? Rien.
Pourtant, il y a urgence à agir. « Entre 2004 et 2008, le revenu des 0,01 % des plus riches a augmenté en moyenne de 180 400 euros par an, alors que le revenu des 50 % des plus modestes connaissait une augmentation moyenne de 900 euros par an », expliquait la députée PCF Marie-George Buffet dans l’Humanité du 3 février. Une proposition nécessaire, donc, mais non suffisante, rappelait l’économiste de la CGT, Nasser Mansouri-Guilani, dans nos colonnes, le 11 septembre 2010 : « Il y a besoin d’un volet politique, c’est évident. Bien sûr, la loi peut décider d’un certain nombre de choses. Mais il faut partir des réalités de terrain. (…) Il y a des comités d’entreprise. Dans certains cas, il y a aussi des administrateurs salariés. Alors il faut utiliser ces droits et il faut lutter pour les élargir. Si l’on ne procède pas ainsi, en développant des luttes à partir des droits existants, en créant les rapports de forces dans l’entreprise, la loi ne suffira pas. »
L’Amérique l’a fait... il y a 60 ans !
En 1942, Franklin Roosevelt avait imposé qu’aucun revenu après impôts n’excède 25 000 dollars par an, l’équivalent de 315 000 dollars aujourd’hui, soit 8,5 fois le revenu médian et 25 fois le plus bas salaire à plein temps. De 1951 à 1964, le taux d’imposition de la tranche de revenus la plus élevée était de 91 % ! Un argument à méditer par ceux qui agitent la menace de la fuite des capitaux à l’étranger. À partir des années 1980, il a chuté pour osciller entre 28 et 35 %, en même temps que prospéraient les paradis fiscaux.
Sébastien Crépel, L'Humanité, 24 février 2012
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