FRANCOISE C.*

Mini nouvelle : fondée sur un sujet restreint, récit rapide et resserré, cachet oral avec unton d'humour, de tendresse, de tristesse....



Une galette sans partage

Plateau décoré de coquillages, tasse de porcelaine remplie du meilleur café, fromage blanc renversé dans une coupelle moderne, grand verre d'eau de cristal, elle porte le plateau dehors dans la douceur du matin calme. Le régime commence ; quel régime? Une reprise en main qui concerne son poids et son allure, reprise en corps faudrait-il dire...mais il y aurait tant à dire ; et elle a compris qu'il ne faut pas dire mais faire....faire comme il dit, lui, le médecin qui a eu la bonté de sortir son livre en poche pour venir en aide à l'humanité en surcharge pondérale!
Rentrer préparer la galette. Ne pas se poser de question, se souvenir à peine de la difficulté à trouver son de blé et son d'avoine et de cette première fois où elle entra dans une maison de produits de régime, bio s'entend. Compter les cuillères, tout le monde sait compter jusqu'à 2 ; séparer le blanc du jaune et ne garder que le blanc....pensez donc un aliment protide pur, sans une once de glucide ou de ces lipidesque l'organisme n'aura qu'à puiser dans les cellules de son corps. Là, embarras du choix, le temps qu'il choisisse ou butine d'une cuisse à une fesse, parions que quelques grammes de lipide fileront en déchet dans les reins. Donc, le blanc mélangés au sons d'avoine et de blé. Et le jaune, si rond, si brillant, si...appétissant, oeuf de ferme oblige? Le jeter à la poubelle sans état d'âme ; morbleu, il faut savoir ce que l'on veut : penser aux populations affamées qui sont légion ou appliquer au pied de la lettre les préceptes qui vont l'obliger dans quelques semaines à reprendre tous ses pantalons..jusqu'au jour où elle jettera aux orties le 46 pour un 38 certes mal taillé, confection chinoise oblige....Elle l'enfilera sans être obligée de rentrer le ventre, quel ventre d'ailleurs le jour béni où ce scénario ses réalisera. Blanc d'oeuf et une grosse cuillerée de fromage blanc..... à O%, inutile de le rappeler: poseur de principes et demandeur d'obéissance mais ne la prenez pas pour une idiote avec ce genre de précision qui deviendrait indécence si vous insistiez plus que nécessaire. Mélanger, bof, ça ressemble à du plâtre délayé mais ne nous fions pas aux apparences ni aux préjugés ; une galette façon blinis qui cuit dans la poële spécialement réservée à cet effet. Ce matin, facile, elle est seule ; personne ne viendra la lui subtiliser pour préparer un oeuf au plat au beurre ou mieux à la graisse de foie d'oie. Où la cachera-t-elle quand ils arriveront tous, vacanciers joyeux et affamés, ne respectant rien du cadre immuable qu'elle s'est fixé ou plutôt qu'il lui a intimé l'ordre de s'imposer. Cette galette à vie...à vie? Avide comme elle est! Et l'envie de remettre l'ensemble enfoui au fin fond du placard. Voilà, elle le ressortira sous leurs yeux médusés et cachera la poële à sa plce. La galette est cuite, posée sur la coupelle assortie à la tasse. Mais voilà que le café est froid! Pensez donc on ne cuisine pas si vite une première fois. Il faut le jeter et recommencer. Oui, gaspillage, gaspillage de nourriture, gaspillage calorique, gaspillage d'illusions penseront les mauvais esprits.
Et elle, à l'idée de leur clouer le bec, s'en étire d'aise jusqu'aux bouts des doigts. La bague qui lui boudine l'annilaire tombera un jour dans la pâte de la galette. Quel galant l'y trouvera?


Françoise, jeu du 26 mai 2008.




Pascale Madame Martin-Debève
Rédigé par Pascale Madame Martin-Debève le 30/05/2008 à 08:11

FRANCOISE C.*

05/05/2008




Le bâton : long morceau de bois rond qu'on peut tenir en main ; sitôt écrit, sitôt nuancé ; long mais aussi court, à taille de celui qui l'utilise ; taille, quelle taille? au couteau Layolle ou Opinel, selon la culture des hommes porteurs de couteaux dans leur poche, décoré en creusant l'écorce, en jouant sur les noeuds, les excroissances, volutes, dessins géométriques....on le prête à qui on fait confiance ; morceau de bois rond choisi sur un noisetier aux branches rectilignes, détaché au couteau, au sécateur si nécessaire pour ne pas blesser l'arbre plus qu' indispensable....attention aux contre façons plastique moulées quelque part là-bas où on exploite les ouvriers, plus encore les ouvrières ; on peut le tenir en main ; oui, c'est sûr sinon il change de nom: gourdin, trique, matraque ; mais aussi bambou, canne, jonc.

bâton de vieillesse pour servir d'appui
bâton de maréchal et son autorité
bâton de chaise, à mener pour une vie folle
bâtons dans les roues pour devenir un vrai empêcheur de tourner en rond
à bâtons rompus pour ne pas se taire

Que faire de ses rimes riches
bâton
chaton
menton
maton
pâton
raton
tâtons

Détaché de la branche, à tâtons, si c'est au plus profond d'un vallon, le bâton prolonge le bras, en harpon, pour décrocher jambon ou soulever jupon.
Dépouillé de son écorce, décoré, épointé, il accompagne le randonneur ou soutient le bras de l'aïeul.
Brandi par le gamin qui se rêve chevalier, le voilà gourdin qu'il lui faudra abandonner pour calligraphier en lettres bâtons ou compter par dizaines en fagots de bûchettes.

Méfie-toi, chaton, si tu y mets la patte, tu auras du bâton; et toi, petit raton ne grignote pas le pâton qui attend la cuisson, tu pourrais recevoir la trique, être éliminée sans façon.
Après avoir mené une vie de bâton de chaise, l'âge venant, on lui attribuera son bâton de maréchal. S'en contentera-t-il?
Il aurait tant voulu écrire à bâtons rompus ; voilà que la consigne lui met des bâtons dans les roues. Il ne lui reste plus qu'à finir en chansons.

Plonge-le dans l'eau, il sera brisé
Fiche-le en terre, il bourgeonnera
Pars au pays basque, c'est un makila
Au fond du cachot, le voilà matraque
Au bord du sillon, le voilà tuteur
Si c'est de la craie, choisis-là couleur
Badine d'osier, pense à t'échapper
Avec l'africain, tape le tambour
Et quand il se brise
Change à ta guise
mais danse toujours.


Françoise avril 2008





Pascale Madame Martin-Debève
Rédigé par Pascale Madame Martin-Debève le 05/05/2008 à 19:52

FRANCOISE C.*

05/05/2008

Mots à insérer : amitié : ardeur, allumer; moiteur, moralité; indice, ironique; travail, télévision; institut, invisible; éphémère, étude.
jokers : pluie, au, avec.




Quel pays émergent? Quelle ville de ce pays? Le sait-il seulement , Alexandro, où est installée la zone dans laquelle il vit?
Etudes brillantes dans un institut international, uniforme classique qu'il porte avec désinvolture, une belle maison, tous les accessoires nécessaires pour travailler, jouer sur des claviers virtuels, et aussi une mère prévenante et affectueuse, un père qui essaie de tenir son rôle, pas de fausse note à dénoncer seulement un malaise indéfinissable entre eux, mais encore une poignées de camarades pour amitié, jeux et sorties à l'abri des murs et des caméras de surveillance, des gardiens qui patrouillent, se font discrets croient-ils, de telle sorte qu'on ne voit qu'eux et leur façon de poser les limites, de les refouler s'ils s'aventurent aux limites de la zone.
Il a l'air de trouver sa vie réussie mais comment interpréter le regard soudain fixe, sourire ébauché qu'il porte sur son environnement?
Une pluie torrentielle s'est abattue sur le secteur, on a l'impression qu'il faut se frayer un chemin à travers la moiteur d'un rideau épais et pourtant impalpable. Le ciel se déchaîne, des gouttes épaisses cinglent les passants de la zone qui se hâtent vers leurs foyers. Des rafales de vent indice sept à huit s'engouffrent dans les jardins les plus impeccables , secouent le vieil autobus arrêté juste derrière le mur et éteignent quelques secondes ou de plus longues minutes les caméras au dessus du mur d'enceinte et de sa couronne de barbelés. Une bourrasque plus violente et les supports d'un lourd panneau sont arrachés du sol et tombent à l'intérieur du mur d'enceinte, déactivant le circuit de surveillance. Branle bas de part et d'autre; trois jeunes adolescents du bidonville se ruent hors du bus et, avec une ardeur décuplée par l'impulsion désespérée qui les a poussés à se lancer dans cette folle aventure, courent le long des supports couchés au dessus du mur, sautent dans un jardin, cherchent à crocheter une première porte, s'introduisent de jardins en jardins, de vérandas en vérandas à la recherche d'une entrée à forcer; les vigiles ont tôt fait de rétablir les circuits, d'appeler les hommes les plus influents de la zone; ceux-ci se précipitent fusils et pistolets aux poings. Deux des jeunes adolescents tombent mortellement atteints, sans sommation, le troisième reste introuvable malgré toutes les caméras réactivées et les patrouilles avec chiens qui sillonnent la zone. Les copains d'Alexandro proposent d'organiser leur propre circuit de chasse mais son père le contraint à rentrer avec lui. Sous la pression de son épouse, lui-même restera dans la cuisine, relié par téléphone au groupe des poursuivants. L'atmosphère s'alourdit de tout ce qui plombe chaque instant de leur vie actuelle. Alexandro éteint la télévision qu'il n'avait allumée que pour s'en évader fusse pour un temps éphémère. Porter un regard distancié, ironique ou réprobateur sur cette chasse à l'homme inconcevable, sur le refus de ces hommes de prévenir les forces de police et la décision de faire justice eux-mêmes, citoyens aux plus hautes responsabilités sociales, à la moralité imaginée sans faille,quel désarroi! Quelle nécessité aussi pour comprendre comment lui, en son âme et conscience, doit réagir pour lui-même, pour la relation à ses parents, à ses amis, à l'ensemble des êtres humains auxquels il n'avait guère pensé avant cette tragique soirée. Il a besoin d'être seul. Il descend au garage par l'escalier intérieur, veut mettre de l'ordre dans le fatras de son matériel sportif et découvre le troisième garçon accroupi derrière les étagères. Un garçon comme lui, certes plus brun, plus sale, plus mal habillé mais fierté et appréhension muette soutiennent son regard, ne quémandent rien.
« Tu as faim? » s'entend-il demander. L'autre répond d'un battement de paupières. Alexandro remonte, Julio n'est pas inquiet, il a lu dans les yeux d'Alexandro qu'il ne dirait rien là-haut. Il faudra s'expliquer, se parler, se convaincre mutuellement, chercher uns solution qui confirme à chacun sa dignité d'homme. Ni l'école de la rue, ni l'école supérieure, ni les préceptes éducatifs ni les exemples parentaux ne les aideront dans cette recherche. Pourtant dès ce premier instant, ils savent l'un comme l'autre qu'ils doivent mener à bien cette tâche pour devenir les adultes qu'ils veulent être.


Françoise pour le 5 mai 2008...




Pascale Madame Martin-Debève
Rédigé par Pascale Madame Martin-Debève le 05/05/2008 à 19:49

FRANCOISE C.*



Pastiche de « n'allez pas Julie vous rouler dans l'herbe.... »

Allez donc Geneviève snober dans l'arène
Quand Mr Chopera fourgue ses taureaux
Epargnez vous donc l'jeu de trouble fête
Et allez danser dans le caniveau

Et si vous sentez vos tracas, mairesse
Répondez-lui donc d'un air provoquant
Mon bel hidalgo, trouvez moi jolie
Ou Simon Cazas vous remplacera.

Refrain:
Seins arrogants, genoux dévoilés
Faites donc la femelle
Permettez la fumette
Toutes sortes d'orgies et autres félonies.
Mais n'allez pas, Geneviève,
Hausser vos prétentions
Avant d'autres élections.

Un matin, Geneviève, avec vos complices
Devant la mairie vous lirez la liste
Qui annulera, retour socialiste,
Toutes vos options, toutes vos prétentions

Seront effacés vos quelqu' mois d'régence
Sera renvoyée la nouvel' engeance
Vous devrez alors revenir dans l'ombre
Et y entraîner tous vos co-listiers

Refrain


Françoise C jeu avril 2008...


Pascale Madame Martin-Debève
Rédigé par Pascale Madame Martin-Debève le 05/05/2008 à 19:46

FRANCOISE C.*

15/04/2008



PEINDRE : porte, poudre ; étonné, enchanté ; immobile, instable ; nectar, noctambule ; doute, danser ; routine, ravi ; écarlate, envol ; jokers : partout, rose, dans.





Chanteuse flamenca

Immobile dans sa robe noire informe, elle se prépare à chanter. Un regard étonné qui ne voit sans doute rien de la réalité qui l’entoure.
Il est rentré vers son monde, ses images intérieures et les habite avec une telle force qu’un reflet ravi, enchanté irradie son visage, modifie sa silhouette qui pourtant semble ne pas bouger. Il se communique à ses mains aux ongles écarlates ; en un geste presque imperceptible, ses doigts miment l’envol des forces qui l’habitent. On sent l’élan qui la porte.
Les premières paroles vous happent. Elles évoquent tout un parcours tissé de routine quotidienne pour survivre, des racines immuables qui n’empêchent pas les jeunes de mener une vie instable, noctambule, à la recherche de quel nectar, quelle poudre dont on lui a dépeint les ravages.
Et vous, entraînés dans son sillage, vous la suivez partout o^vous n’irez jamais mais qui existe là, comme un mirage que vous pourriez atteindre en tendant la main. Il y a ceux qui se mettent à frapper « les palmas », ceux qui se lèvent pour danser, ceux qui l’interpellent ou la soutiennent de quelques syllabes scandées dans son rythme à elle.
Moi, je ne peux pas. Toutes mes émotions, le plus intime de ce que je peux ressentir et accompagner de l’autre me submerge et m’interdit de bouger.
Elle, Inès, elle sait, elle sent que je la suis dans le rose parfois, plus souvent le noir de ses évocations. Nos regards s’accrochent et bien au-delà du langage, nous partageons une complicité essentielle.


Françoise pour le 14 avril 2008





Pascale Madame Martin-Debève
Rédigé par Pascale Madame Martin-Debève le 15/04/2008 à 23:17

FRANCOISE C.*

L'école, enfer ou paradis? vous êtes institutrice, dans une grande ville, un petit village..Vous êtes élève...vous visez à une époque précise...racontez.



La semaine dernière, sa mère l'a amené à la commission, à Dax. Elle l'a grondé parce qu'il n'arrive jamais à prononcer ce nom de ville avec sa fin de syllabe qui siffle mais jamais de la bonne façon. Des hommes, des femmes l'ont regardé avec des airs très différents mais qui faisaient plutôt peur; une seule femme s'est adressée à lui, en l'appelant par son prénom mais c'était trop surprenant et trop doux pour qu'il entende vraiment la question.
Celui qui commandait-il n'en avait pas l'air pourtant avec ses lunettes qui lui faisaient plisser le nez et sa façon de demander l'avis de tous ces gens bien habillés mais pas le sien à lui- a dit: lundi à l'école et à la cantine à l'essai.
L'essai, il ne sait pas où ça se trouve mais sa mère lui a expliqué qu'il irait à l'école comme tous les enfants et qu'il avait intérêt à bien se tenir parce qu'on l'enverrait ailleurs, très loin si la maîtresse n’est pas contente de lui.
Premier jour, c'est sa mère qui le conduit à la maternelle. Ca maîtresse et l'autre dame l’accueillent. Il a un porte-manteau tout exprès pour lui avec sa photo et deux écritures. Comment ont-elles eu sa photo? Il faudra qu'il demande à son père qui sait bien plus de choses que sa mère quand il est de bonne humeur. La maîtresse lui dit que les deux étiquettes, c'est son nom et son signe qui veut dire lui mais avec un dessin plus facile. C'est vrai que c'est plus facile, peut-être qu'il arrivera lui aussi à le dessiner si on lui donne plusieurs feuilles pour recommencer.
Autour de lui, les autres enfants ont chacun porte-manteau et étiquettes comme lui mais il est le seul dont la mère donne une poche de vêtements à la maîtresse « au cas où » disent-elles d'un air entendu. Ça ne lui plaît pas, il va essayer d'être comme les autres, propre....déjà, il vient à l'école comme tout le monde, il sait dire bonjour, merci, oui, non, demander s'il a besoin, répondre si on lui demande et répéter les mots qui ne sont pas trop difficiles. L'école, c'est fait pour apprendre, il apprendra le reste et peut-être qu'il saura bientôt chanter comme son petit voisin.
Il s'applique à la ronde, rate le ballon mais court très bien pour le rattraper et le renvoie vers un autre dans la bonne direction.
En classe, il a su faire des tours très hautes avec les cubes, a eu le droit de les renverser e d'en rire, il a partagé le garage avec deux autres garçons et feuilleté un livre qu'il a pensé à poser sur la bonne étagère quand il a eu fini.
La peinture, il ne voulait pas, même avec la grande chemise boutonnée dans le dos; il a ses beaux habits et s'il les tâche, sa mère sera fâchée, si fâchée qu'il croira encore qu'elle ne va pas continuer à s'occuper de lui et le mettra en pension.
Pension, il ne sait pas ce que c'est mais un jour son père lui a montré les murs de la prison, expliqué qui était dedans et allez savoir pourquoi pension et prison, lui, il trouve que c'est deux mots presque pareils.
Juste avant la récréation de l'après-midi, il s'appliquait tant à faire les traits demandés qu'il a oublié de demander à aller aux cabinets. La dame l'a changé, la maîtresse a amené les autres dans un coin, personne ne l'a grondé et lui, ça lui adonné encore plus honte.
Un mois plus tard; des moments où il est content avec les autres, les jeux, le travail quelquefois bien difficile mais ça, impossible de se contrôler. Tous les jours, la dame doit le laver et le changer, les autres se bouchent le nez, la maîtresse et la dame se fâchent ou ont l'air si triste que c'est pire encore. Quand elle vient, sa mère n'en dit rien, elles la regardent, attendant une excuse, une explication mais non, elle ne dit rien.
Un jour, la maîtresse laisse ce qu'elle était en train de faire, le prend par la main, se tourne vers la dame: « vous, occupez-vous des autres! » sur un tel ton que chacun comprend qu'il y a intérêt à filer doux. Elle lui montre comment se déshabiller, défaire les boutons, enlever les chaussures, les chaussettes puis pantalon et slip. Elle fait semblant de faire comme lui mais ne l'aide à aucun moment. Et, bon, le voilà lavé et rhabillé tout seul pour la première fois de sa vie. Elle prend les vêtements sales, les mets dans une double poche. A 16h30, elle lui donne la poche: « tiens, tu donneras ça à ta mère ». Et lui, en gambadant jusqu'au portail: « je porte un cadeau à ma mère... »
Que c'est-il passé à la maison et surtout dans la vie de Jean-Pierre. Il n'eut plus jamais à être changé à l'école.
Il va aller à une autre commission à Dax qu'il ne sait pas mieux prononcer. Si la dame lui demande encore son avis, il dira qu'à l'école, il veut continuer à y aller.



Françoise pour le 7 avril 2008.




Pascale Madame Martin-Debève
Rédigé par Pascale Madame Martin-Debève le 09/04/2008 à 22:37

FRANCOISE C.*

05/04/2008

L'école, enfer ou paradis? vous êtes institutrice, dans une grande ville, un petit village..Vous êtes élève...vous visez à une époque précise...racontez.







La semaine dernière, sa mère l'a amené à la commission, à Dax. Elle l'a grondé parce qu'il n'arrive jamais à prononcer ce nom de ville avec sa fin de syllabe qui siffle mais jamais de la bonne façon. Des hommes, des femmes l'ont regardé avec des airs très différents mais qui faisaient plutôt peur; une seule femme s'est adressée à lui, en l'appelant par son prénom mais c'était trop surprenant et trop doux pour qu'il entende vraiment la question.
Celui qui commandait-il n'en avait pas l'air pourtant avec ses lunettes qui lui faisaient plisser le nez et sa façon de demander l'avis de tous ces gens bien habillés mais pas le sien à lui- a dit: lundi à l'école et à la cantine à l'essai.
L'essai, il ne sait pas où ça se trouve mais sa mère lui a expliqué qu'il irait à l'école comme tous les enfants et qu'il avait intérêt à bien se tenir parce qu'on l'enverrait ailleurs, très loin si la maîtresse n’est pas contente de lui.
Premier jour, c'est sa mère qui le conduit à la maternelle. Ca maîtresse et l'autre dame l’accueillent. Il a un porte-manteau tout exprès pour lui avec sa photo et deux écritures. Comment ont-elles eu sa photo? Il faudra qu'il demande à son père qui sait bien plus de choses que sa mère quand il est de bonne humeur. La maîtresse lui dit que les deux étiquettes, c'est son nom et son signe qui veut dire lui mais avec un dessin plus facile. C'est vrai que c'est plus facile, peut-être qu'il arrivera lui aussi à le dessiner si on lui donne plusieurs feuilles pour recommencer.
Autour de lui, les autres enfants ont chacun porte-manteau et étiquettes comme lui mais il est le seul dont la mère donne une poche de vêtements à la maîtresse « au cas où » disent-elles d'un air entendu. Ça ne lui plaît pas, il va essayer d'être comme les autres, propre....déjà, il vient à l'école comme tout le monde, il sait dire bonjour, merci, oui, non, demander s'il a besoin, répondre si on lui demande et répéter les mots qui ne sont pas trop difficiles. L'école, c'est fait pour apprendre, il apprendra le reste et peut-être qu'il saura bientôt chanter comme son petit voisin.
Il s'applique à la ronde, rate le ballon mais court très bien pour le rattraper et le renvoie vers un autre dans la bonne direction.
En classe, il a su faire des tours très hautes avec les cubes, a eu le droit de les renverser e d'en rire, il a partagé le garage avec deux autres garçons et feuilleté un livre qu'il a pensé à poser sur la bonne étagère quand il a eu fini.
La peinture, il ne voulait pas, même avec la grande chemise boutonnée dans le dos; il a ses beaux habits et s'il les tâche, sa mère sera fâchée, si fâchée qu'il croira encore qu'elle ne va pas continuer à s'occuper de lui et le mettra en pension.
Pension, il ne sait pas ce que c'est mais un jour son père lui a montré les murs de la prison, expliqué qui était dedans et allez savoir pourquoi pension et prison, lui, il trouve que c'est deux mots presque pareils.
Juste avant la récréation de l'après-midi, il s'appliquait tant à faire les traits demandés qu'il a oublié de demander à aller aux cabinets. La dame l'a changé, la maîtresse a amené les autres dans un coin, personne ne l'a grondé et lui, ça lui adonné encore plus honte.
Un mois plus tard; des moments où il est content avec les autres, les jeux, le travail quelquefois bien difficile mais ça, impossible de se contrôler. Tous les jours, la dame doit le laver et le changer, les autres se bouchent le nez, la maîtresse et la dame se fâchent ou ont l'air si triste que c'est pire encore. Quand elle vient, sa mère n'en dit rien, elles la regardent, attendant une excuse, une explication mais non, elle ne dit rien.
Un jour, la maîtresse laisse ce qu'elle était en train de faire, le prend par la main, se tourne vers la dame: « vous, occupez-vous des autres! » sur un tel ton que chacun comprend qu'il y a intérêt à filer doux. Elle lui montre comment se déshabiller, défaire les boutons, enlever les chaussures, les chaussettes puis pantalon et slip. Elle fait semblant de faire comme lui mais ne l'aide à aucun moment. Et, bon, le voilà lavé et rhabillé tout seul pour la première fois de sa vie. Elle prend les vêtements sales, les mets dans une double poche. A 16h30, elle lui donne la poche: « tiens, tu donneras ça à ta mère ». Et lui, en gambadant jusqu'au portail: « je porte un cadeau à ma mère... »
Que c'est-il passé à la maison et surtout dans la vie de Jean-Pierre. Il n'eut plus jamais à être changé à l'école.
Il va aller à une autre commission à Dax qu'il ne sait pas mieux prononcer. Si la dame lui demande encore son avis, il dira qu'à l'école, il veut continuer à y aller.


Françoise mars 2008




Pascale Madame Martin-Debève
Rédigé par Pascale Madame Martin-Debève le 05/04/2008 à 21:54

FRANCOISE C.*

05/04/2008

REVES : regard, rencontre; éclat, envie; vertige, vagabond; emprise, espace; secret, sauvage
JOKERS : : vent, air, par.




Un coin de rue empli de décombres. Crasseux dans son vieux pardessus dont personne ne pourrait dire la couleur, un chapeau informe tombe sur ses yeux rougis par le froid et l'alcool frelaté de la bouteille vide qu'il brandit dans un geste qu'on ne sait d'invite ou de menace. Le vagabond est allongé dans une encoignure, espace qu'il a aménagé à l'aide d'une vieille couverture effrangée et d'un caddie d'enfant rempli de victuailles douteuses et de bouteilles poisseuses. Il interpelle l'autre d'une voix si peu articulée qu'il serait difficile de dire si l'envie d'une rencontre le pousse à cet éclat de voix, si le regard étranger l'agresse ou lui ouvre une possibilité d' échange. A son air sauvage, on imagine qu'il veut le tenir à distance mais qui connaît le secret de sa déchéance, qui peut mesurer le vertige qui brouille ses idées, qui peut ignorer l'amorce d'une demande de partage sous l'emprise d'un tel sentiment de solitude qu'il pourrait bien devenir capable de lui faire une place à cet autre qui l'implore, cheveux au vent. Que pourrait-il partager? Il y a si longtemps qu'il n'a plus ni envie ni rêve, si longtemps qu'il a renoncé à vouloir vivre, à vouloir mourir. Il est le premier abasourdi de s'entendre proposer: « un mégot contre le reste de mon litron et viens te coller à côté , j'm'en vais te faire un p'tite place ».

Françoise, mars 2008.




Pascale Madame Martin-Debève
Rédigé par Pascale Madame Martin-Debève le 05/04/2008 à 21:52

FRANCOISE C.*

19/03/2008

Monde Françoise; à partir de trois mots: oser, rose, Eros


O

O cercle parfait, cerceau, en rester bouche bée d'étonnement, de confusion, de surprise choquée

S

Comment la volute du s vient-elle s'y appuyer? si c'est un escargot, fais lui montrer ses cornes pour poser la question: lui, hermaphrodite où donc est son plaisir? que peut-il en exprimer? vers quels sentiers sinueux essaie-t-il de nous entraîner?
Imprimé en serpent pour qui sont-ils sifflant sur nos certitudes?

e

La boucle du e va-t-elle en rester muette ou bien porter chapeau, gravement, aigu pour transpercer quelques idées reçues, circonflexe pour nous gendarmer?

Ou va-t-elle s'associer au c pour un bec, au l pour le gel, au n pour s'y fondre: en de vent, de dent....si tu veux mais jamais lentement, au t pour lier autre mot ou idée, au z pour que voyant cela tu fronces le nez?

r

Et puis e a choisi le r qui l'adoucit en [é], r qui seul nous gratterait plutôt la gorge.

Oui, voilà un mot qui se permet d'oser s'habiller pour dire ce qu'il est! mais voilà qu'il trébuche et se retrouve en vrac.

Aussitôt bouton de rose éclot hors du cocon serré, écarte les sépales, déplie en douceur les pétales pour offrir son parfum et coller quelques grains de pollen à qui pointe son nez.

Il y pointe son nez et d'un coup sec le cueille pour l'offrir à sa belle. Éphémère est la fleur du jardin, éphémère la fleur coupée et peut-être éphémère la visite d'Eros trop vite interpellé.

D'où sort-il celui-là?

De Mars et de Vénus picorés en désordre [e,r,s].

Pourquoi un os dont on ne sait que faire?

Chanter en ré sur un mode mineur?

Fondre son or ...mais à qui le donner?

Faut-il mettre au rebut une lettre oubliée [o]

Une lettre doublée [s]

Et cinq lettres inutiles dont on ne sait que faire [m, a, v, n, u]:
Nu, vu, mu ou ma, va, na ?
Non, tout ça ne tient pas!

Oh la! Landais n'est-ce pas une histoire qui surviendrait à Sore?



Françoise C jeu du 17 mars 2008.




Pascale Madame Martin-Debève
Rédigé par Pascale Madame Martin-Debève le 19/03/2008 à 23:45

FRANCOISE C.*

Insertion de quelques mots à intervalles réguliers soit
1/ l'enfant avait les yeux si clairs
2/
3/ c'était bizarre




L’enfant aux yeux clairs


Cinquième étage, deux fenêtres ; l’une donne sur le Sacré Cœur, de l’autre on aperçoit la tour Eiffel. Si on choisit bien sa place, ces deux emblèmes de Paris, là, sous vos yeux.
Cet après-midi, le paysage importe peu. La mère vient de rentrer et s’immobilise devant le porte vêtements mi-incrédule, mi-décontenancée :
-« Je perds les eaux ! »
La petite fille la regarde, complètement interloquée. L’enfant avait les yeux si clairs que tout ce qu’elle éprouvait semblait se refléter dans ses prunelles : un iris d’un bleu si pâle qu’il semblait plus un miroir tendu aux autres qu’un reflet de ses propres sentiments.
Comment avait-elle compris la moindre bribe de cette scène ? Elle savait que son petit frère allait naître ; le berceau tendu de plumetis bleu était préparé derrière le paravent de la chambre de ses parents. Sa grand-mère avait déjà amené ses vêtements de nuit et sa mère préparé les deux valises : la petite noire à roulettes avec le nécessaire pour quelques jours et les trois livres offerts pour l’occasion, la moyenne avec les affaires de bébé : bodies à manches longues, pyjamas de couleurs variées, le burnous bleu marine qui a été le sien quand elle était petite, deux paquets de couches, une petite trousse de toilette dans laquelle elle a rangé la brosse à cheveux de la famille aux poils si doux qu’elle se demande toujours comment elle a pu servir aux cheveux si drus de Yaya puis à la chevelure frisée serrée de sa mère.
Un bébé, ça, elle y était préparée, parfois ravie et impatiente, d’autres fois déjà jalouse de la place qu’il occupait avant même de naître.
Mais de l’eau…des eaux disait maman. On aurait dit qu’elle faisait pipi, habillée, immobilisée au milieu de l’entrée. Ce n’était pas la honte qui lui donnait cet air décontenancé mais un genre de stupéfaction qui ajoutait au désarroi de l’enfant.
Des éclats de rire, une cavalcade bruyante dans l’escalier des étages, tout un monde quotidien qui rappelait qu’elle ne rêvait pas, que maman ne savait que faire, qu’elle ne la voyait pas vraiment à elle, sa petite fille.
Des eaux pour un si petit bébé. Souvent ces dernières semaines, sa mère lui avait fait sentir le bébé à venir bouger dans son ventre ; elle avait pu caresser doucement sa tête sous la peau tendue et rire des coups de pieds annoncés. Etait-il noyé par une telle quantité de liquide ? ce n’était ni le chagrin ni la panique qu’elle sentait chez sa mère mais un sentiment qui l’emplissait de confusion, qui la faisait se sentir exclue.
Une telle immobilité comme si toutes les personnes présentes s’étaient brusquement transformées en automates, c’était vraiment bizarre.
Elle arriva enfin à détourner son regard de la mère en entendant sa grand-mère :
-Mais enfin, tu arrives juste de la visite chez le médecin ; tu as bien dû éprouver quelques symptômes ! pourquoi ne t’es-tu pas fait conduire à la maternité par le chauffeur de taxi, nous aurions amené tes affaires ! maintenant, il faut faire vite…
-maman ! répond seulement Jocelyne avec un spasme dans la voix qui lave encore plus le regard de l’enfant.
-eh bien ! heureusement que je suis là. Clémence, quand tu es née j’étais à Paris et je suis la première à t’avoir vue juste après ta maman et ton papa. Tu sais tous les bébés à naître sont des bébés nageurs. Ils grandissent, mangent, boivent, font pipi et dorment dans une eau qui leur convient parfaitement comme des dauphins. Ils savent faire partir l’eau quand leur heure d’arriver parmi nous est arrivée. Souvent ça ne se passe qu’au dernier moment mais quelques fois, ils ne préviennent pas. Ce Léandre sera un vrai coquin. Maman va partir avec yaya à la maternité, nous on téléphonera à papa puis nous irons promener au square pour voi roù les poussettes roulent le mieux.
Grand-mère est déjà au téléphone, maman change ses bas et ses chaussures, Clémence tourne son regard vers Marie. La vie revient dans ses yeux tandis qu’elle la fixe. Marie soutient son regard et lui insuffle tout ce qu’elle peut de tranquillité.
-Moi aussi, quand j’aurais un bébé dans le ventre, il nagera dans moi ?
-Bien sûr, comme tous les bébés.
-Marie, tu as vu, les lumières de la Tour Eiffel viennent de s’allumer…Si on allait plutôt à la piscine ?
Françoise, février , jeu du 18 février 2008.






Pascale Madame Martin-Debève
Rédigé par Pascale Madame Martin-Debève le 11/03/2008 à 07:54