La chronique économique du 28 décembre 2010 de Bénédicte Tassart
Et aujourd'hui, ce n'est plus un écart, même plus un grand écart : c'est un fossé énorme. Pendant les trente glorieuses, l'enrichissement des français a été collectif, tout le monde a profité de la croissance. Mais, depuis 10 ans, depuis le début des années 2000, on assiste à un enrichissement incroyable des plus fortunés, grâce aux produits financiers et à l'immobilier. Entre 2004 et 2007, les 0, 01% des français les plus riches ont gagné 40% de plus, soit 360.000 euros supplémentaires en moyenne, c'est l'équivalent de 30 ans de S.M.I.C ! 30 ans de S.M.I.C en trois ans. Et le krach boursier que nous venons de subir n'est déjà plus qu'un mauvais souvenir pour eux. Les plus gros patrimoines de notre pays se sont encore engraissés de 20% cette année. Dans un pays où l'on compte 8 millions de pauvres, dans un pays symbole du pacte social, la déchirure fait mal. Car la France n'est pas le pays le plus inégalitaire du monde, loin de là, mais on y tolère moins qu'ailleurs ces écarts de revenus.
Alors, quelles pistes pour tenter de remédier à ce fossé ?
On commence à réfléchir, du moins certains, pas tous. Le silence des plus riches, comme Bernard Arnault, le patron de L.V.M.H, est assourdissant. Mais du côté du patronat, Marc Ladreit de la Charrière, fondateur de Fimalac, veut militer pour un capitalisme de solidarité où les patrons redistribuent une partie de leur bonus. On entend aussi de plus en plus parler d'un revenu maximum, une idée en vogue chez les Verts, notamment, mais pas seulement. Quelques-uns, à l'U.M.P, y réfléchissent. Pourquoi ne pas limiter le salaire des patrons avec un écart de 1 à 20 avec leurs employés ?
Mais en France, on pense toujours que la redistribution par l'impôt est plus efficace que la charité. La fiscalité, vous le savez, c'est l'un des grands chantiers promis par le président de la république pour l'année prochaine. On va voir si Nicolas Sarkozy revient sur le paquet fiscal qu'il a généreusement accordé aux plus aisés en 2007. On va voir ce que devient l'idée d'abandonner l'impôt sur la fortune pour le remplacer par une tranche d'imposition plus élevée. Il y a apparemment urgence !
RTL, 28 décembre 2010
Alors, quelles pistes pour tenter de remédier à ce fossé ?
On commence à réfléchir, du moins certains, pas tous. Le silence des plus riches, comme Bernard Arnault, le patron de L.V.M.H, est assourdissant. Mais du côté du patronat, Marc Ladreit de la Charrière, fondateur de Fimalac, veut militer pour un capitalisme de solidarité où les patrons redistribuent une partie de leur bonus. On entend aussi de plus en plus parler d'un revenu maximum, une idée en vogue chez les Verts, notamment, mais pas seulement. Quelques-uns, à l'U.M.P, y réfléchissent. Pourquoi ne pas limiter le salaire des patrons avec un écart de 1 à 20 avec leurs employés ?
Mais en France, on pense toujours que la redistribution par l'impôt est plus efficace que la charité. La fiscalité, vous le savez, c'est l'un des grands chantiers promis par le président de la république pour l'année prochaine. On va voir si Nicolas Sarkozy revient sur le paquet fiscal qu'il a généreusement accordé aux plus aisés en 2007. On va voir ce que devient l'idée d'abandonner l'impôt sur la fortune pour le remplacer par une tranche d'imposition plus élevée. Il y a apparemment urgence !
RTL, 28 décembre 2010
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Tassart
Créer un "revenu minimum" était le combat des années 1980 ; instituer "un revenu maximum" pourrait bien devenir, à gauche, celui de la décennie à venir.
Alors que la précampagne présidentielle de 2012 est lancée, la répartition des richesses redevient un sujet majeur. De Martine Aubry (PS) à Eva Joly (Europe Ecologie- Les Verts), en passant par Jean-Luc Mélenchon (Parti de gauche) ou Olivier Besancenot (NPA), tous cherchent le moyen de réduire les inégalités de salaires et de revenus qui se sont creusées en France ces dix dernières années.
La crise est passée par là. Quand toute l’économie est mise au régime sec, les écarts de rémunérations ne passent plus. "Les niveaux atteints ne parlent plus aux gens. Ils ont l’impression que l’économie perd sa boussole et que la machine est devenue folle", souligne Jérôme Fourquet, directeur de l’institut Ipsos, qui sent monter cette incompréhension dans les études d’opinion.
En librairie, l’ouvrage des sociologues Monique Pinçon-Charlot et Michel Pinçon "Le Président des riches" (éditions Zones), connaît un franc succès. Plus de 88 000 exemplaires auraient déjà été -vendus. Les actions ludiques lancées par le groupe d’activistes "Sauvons les riches", qui dénonce le mode de vie des plus riches sont regardées avec sympathie. La page Facebook intitulée "Quel montant pour le revenu maximum" connaît une forte consultation.
Les revues militantes s’emparent, elles aussi, du sujet. Le mensuel de sensibilité communiste Regards en fait sa "une" de décembre en demandant "Avons nous besoin des riches ? "
"POINT LIMITE"
L’annonce, la semaine dernière, que le smic ne connaîtrait pas de coup de pouce, a déclenché à gauche une salve d’indignation. Olivier Besancenot a dénoncé un "smic de misère", le comparant aux 3,3 millions d’euros qui seraient la rémunération annuelle moyenne des dirigeants d’entreprises du CAC 40. "200 fois le salaire d’un smicard, c’est édifiant !", s’est-il exclamé. Martine Aubry a enchaîné en notant qu’"il faut qu’un smicard travaille quatre vies pour gagner ce que gagne en un an un patron du CAC 40". "On atteint un point limite de la décence. Il faut que la gauche indique le cap d’une civilisation morale", insiste Patrick Bessac, porte-parole du PCF.
Mais comment faire payer les riches ? Pour certains, ce ne serait qu’une question de "volonté politique". "Il faut reprendre les 10 % de richesse nationale passés de la masse salariale aux plus hauts revenus", exige M. Besancenot qui veut rétablir le taux de 65 % d’imposition pour la tranche supérieure de l’impôt sur le revenu.
Jean-Luc Mélenchon, député européen du Parti de gauche (PG), affirme qu’au-dessus de 350 000 euros annuels, il "prend tout". Comment ? en prolongeant le barème de l’impôt sur le revenu par la création d’une dizaine de nouvelles tranches dont le taux irait de 40 % à 100 %. "Il ne doit pas y avoir de revenus plus de vingt fois supérieur au salaire médian (1 600 euros en 2010) ", souligne Martine Billard, coprésidente du Parti de gauche
Les mots changent, les taux varient mais la demande est identique chez les écologistes. Ici, on parle de "revenu maximum fixé à 30 fois le revenu médian". "Personne ne doit gagner plus de 500 000 euros annuels ou 40 000 euros par mois ", précise Pascal Canfin, eurodéputé et conseiller économique d’Europe Ecologie-Les Verts. Cette ponction pourrait passer par trois voies : la fixation par la loi d’un "salaire forfaitaire maximum", la réintégration des revenus du patrimoine dans l’impôt sur le revenu, ou la création d’une tranche pour les revenus de plus 500 000 euros les taxant à "au moins à 70 %".
Le Parti socialiste s’y est mis, lui aussi mais avec plus de précaution. Les propositions contenues dans son texte sur "l’égalité réelle", présenté le 11 décembre, sont encore peu précises. Des pistes cependant existent : réforme de l’impôt sur le revenu, fiscalisation des stock-options au même titre que les salaires, et, surtout, plafonnement des rémunérations qui seraient "comprises dans une échelle de l’ordre de un à 20" dans les entreprises où l’Etat est actionnaire.
TAXATION SUR DIX ANS
Il faudra attendre la campagne des primaires pour savoir où les socialistes situent le curseur. On peut cependant tabler sur une surenchère. Interrogé lors de l’émission "Dimanche Soir politique" (France Inter, iTélé, Le Monde) Arnaud Montebourg a estimé que c’est "aux très grandes fortunes", de payer les conséquences de la crise. Le député de Saône-et-Loire, candidat aux primaires, propose une taxation sur les patrimoines pendant au moins dix ans. Et pour modifier la répartition entre salaires et profits dans l’entreprise, il propose une loi d’indexation des salaires sur la productivité. "C’est cette loi du partage des profits qu’il va falloir que tous les pays européens, sans exception, imposent", estime-t-il.
Sylvia Zappi Article paru dans l’édition du 21.12.10
La crise est passée par là. Quand toute l’économie est mise au régime sec, les écarts de rémunérations ne passent plus. "Les niveaux atteints ne parlent plus aux gens. Ils ont l’impression que l’économie perd sa boussole et que la machine est devenue folle", souligne Jérôme Fourquet, directeur de l’institut Ipsos, qui sent monter cette incompréhension dans les études d’opinion.
En librairie, l’ouvrage des sociologues Monique Pinçon-Charlot et Michel Pinçon "Le Président des riches" (éditions Zones), connaît un franc succès. Plus de 88 000 exemplaires auraient déjà été -vendus. Les actions ludiques lancées par le groupe d’activistes "Sauvons les riches", qui dénonce le mode de vie des plus riches sont regardées avec sympathie. La page Facebook intitulée "Quel montant pour le revenu maximum" connaît une forte consultation.
Les revues militantes s’emparent, elles aussi, du sujet. Le mensuel de sensibilité communiste Regards en fait sa "une" de décembre en demandant "Avons nous besoin des riches ? "
"POINT LIMITE"
L’annonce, la semaine dernière, que le smic ne connaîtrait pas de coup de pouce, a déclenché à gauche une salve d’indignation. Olivier Besancenot a dénoncé un "smic de misère", le comparant aux 3,3 millions d’euros qui seraient la rémunération annuelle moyenne des dirigeants d’entreprises du CAC 40. "200 fois le salaire d’un smicard, c’est édifiant !", s’est-il exclamé. Martine Aubry a enchaîné en notant qu’"il faut qu’un smicard travaille quatre vies pour gagner ce que gagne en un an un patron du CAC 40". "On atteint un point limite de la décence. Il faut que la gauche indique le cap d’une civilisation morale", insiste Patrick Bessac, porte-parole du PCF.
Mais comment faire payer les riches ? Pour certains, ce ne serait qu’une question de "volonté politique". "Il faut reprendre les 10 % de richesse nationale passés de la masse salariale aux plus hauts revenus", exige M. Besancenot qui veut rétablir le taux de 65 % d’imposition pour la tranche supérieure de l’impôt sur le revenu.
Jean-Luc Mélenchon, député européen du Parti de gauche (PG), affirme qu’au-dessus de 350 000 euros annuels, il "prend tout". Comment ? en prolongeant le barème de l’impôt sur le revenu par la création d’une dizaine de nouvelles tranches dont le taux irait de 40 % à 100 %. "Il ne doit pas y avoir de revenus plus de vingt fois supérieur au salaire médian (1 600 euros en 2010) ", souligne Martine Billard, coprésidente du Parti de gauche
Les mots changent, les taux varient mais la demande est identique chez les écologistes. Ici, on parle de "revenu maximum fixé à 30 fois le revenu médian". "Personne ne doit gagner plus de 500 000 euros annuels ou 40 000 euros par mois ", précise Pascal Canfin, eurodéputé et conseiller économique d’Europe Ecologie-Les Verts. Cette ponction pourrait passer par trois voies : la fixation par la loi d’un "salaire forfaitaire maximum", la réintégration des revenus du patrimoine dans l’impôt sur le revenu, ou la création d’une tranche pour les revenus de plus 500 000 euros les taxant à "au moins à 70 %".
Le Parti socialiste s’y est mis, lui aussi mais avec plus de précaution. Les propositions contenues dans son texte sur "l’égalité réelle", présenté le 11 décembre, sont encore peu précises. Des pistes cependant existent : réforme de l’impôt sur le revenu, fiscalisation des stock-options au même titre que les salaires, et, surtout, plafonnement des rémunérations qui seraient "comprises dans une échelle de l’ordre de un à 20" dans les entreprises où l’Etat est actionnaire.
TAXATION SUR DIX ANS
Il faudra attendre la campagne des primaires pour savoir où les socialistes situent le curseur. On peut cependant tabler sur une surenchère. Interrogé lors de l’émission "Dimanche Soir politique" (France Inter, iTélé, Le Monde) Arnaud Montebourg a estimé que c’est "aux très grandes fortunes", de payer les conséquences de la crise. Le député de Saône-et-Loire, candidat aux primaires, propose une taxation sur les patrimoines pendant au moins dix ans. Et pour modifier la répartition entre salaires et profits dans l’entreprise, il propose une loi d’indexation des salaires sur la productivité. "C’est cette loi du partage des profits qu’il va falloir que tous les pays européens, sans exception, imposent", estime-t-il.
Sylvia Zappi Article paru dans l’édition du 21.12.10
Période de reconstruction et d’inquiétude, la saison 2010 des assemblées d’actionnaires présente un tableau plus apaisé sur le front de la question des rémunérations de dirigeants après plusieurs années qui ont vu se creuser un écart préoccupant entre l’entreprise et l’opinion. Mais il est remarquable que les actionnaires, qui dans d’autres domaines ont voulu soutenir les dirigeants dans la crise, ont maintenu leur critique des plans de rémunération proposés en 2010 en rejetant une dizaine de plans collectifs.
Etrangement, la France, qui était il y a quelques années encore en avance sur les questions de gouvernance, est restée à l’écart du débat concernant le vote annuel des actionnaires sur la politique de rémunération, vote aussi appelé « Say on Pay », généralisé au Royaume-Uni, aux Pays-Bas et en Suisse, adopté en 2009 en Allemagne et enfin en 2010 en Belgique et aux Etats-Unis par l’importante loi Dodd Frank. La crise semble avoir eu raison de nombreux abus comme de leurs critiques les plus virulents, mais les actionnaires des sociétés françaises restent vigilants comme le démontrent les statistiques 2010 de vote aux assemblées générales.
Deux dossiers illustrent ce recul du débat public sur les rémunérations en 2010 : celui de la Société Générale, dont les retraites et indemnités de départ des dirigeants, et au premier chef le PDG Frédéric Oudéa, auront été silencieusement mais fortement critiquées. Le second dossier, à peine entendu, fut celui de Renault qui a tardivement avoué, en juin 2010, la rémunération complémentaire considérable de son Président, Carlos Ghosn, chez Nissan Motors - environ 8 M€ - alors que le rapport Renault n’avouait que 1,2 M€. Ce sont aussi, là encore, deux nouvelles démonstrations que les recommandations de modération et d’autorégulation du patronat ne règlent pas le problème et que peut-être seul l’arbitrage des actionnaires est en mesure de contenir les excès.
Pour les premiers dirigeants du CAC 40, la rémunération totale moyenne baisse de 14%, de 20% à échantillon constant avec une médiane stable, ceci après deux années de baisse moyenne plus fortes de 25% en 2008 et 17% en 2007, tandis que les autres dirigeants du SBF 120 ont vu, eux, leur rémunération baisser de 14% en 2009 contre 17% en 2008.
Toutefois la part salariale progresse de 5% au niveau du CAC 40 et stagne au niveau du SBF 120, et c’est sans surprise la part actionnariale, c’est-à-dire la dotation d’options et d’actions gratuites, qui se réduit en moyenne de 46% et explique l’essentiel de la baisse. L’AMF relève, d’ailleurs, en juillet 2010 que 21 sociétés sur les 56 disposant d’une politique d’attribution d’options ou d’actions n’ont procédé à aucune attribution à leurs dirigeants au titre de l’exercice 2009, et 50% seulement des sociétés observées ont accordé de nouvelles actions gratuites ou options en 2009 contre 63% en 2008.
La part salariale fixe, variable et « accessoire » dans le total perçu par les présidents exécutifs se renforce donc encore pour le CAC 40 : de 54% en 2007 à 61% en 2008 puis 76% pour 2009, et pour le SBF 120 (hors CAC 40) de 56 % en 2007 à 64% en 2008 puis 72% en 2009, puisque les bonus qui avaient baissé de 26% en 2008 ont cru en moyenne de 13% pour le CAC 40 et beaucoup moins pour les moindres capitalisations. A échantillon constant, cette part variable croît à 35% du total perçu alors que la part fixe qui, malgré un montant absolu quasi-constant, prend elle aussi une part encore plus forte du total - passant de 24% à 30% - aux dépens de la part des incitations à long terme.
En ce qui concerne les rémunérations des présidents exécutifs du SBF 120 versées en période de crise, la formule 30-35-35 fait place à une formule proche de 35-40-25 soit environ 35% de fixe, 40% de prime et 25% d’incitation actionnariale à long terme.
Pour 2009, les patrons exécutifs du CAC 40 ont donc perçu un total moyen de 3,1 M€ contre 3,6 M€ en 2008 et 4,7 M€ en 2007 : ce montant moyen n’excède donc plus notre plafond Proxinvest du socialement acceptable de 240 fois le SMIC (4,3 M€) et se compare à un total perçu par les autres premiers dirigeants de l’indice SBF 120 hors CAC 40 à 1,6 M€ (contre 1,8 M€ en 2007). L’écart avec la moyenne perçue par les autres dirigeants du SBF 250 est notable : un dirigeant du CAC 40 gagne encore presque cinq fois le montant reçu par un patron des 130 dernières capitalisations de l’indice : la pente reste impressionnante.
Préoccupation des investisseurs reprise par l’AMF, la rémunération des présidents non exécutifs, les « chairmen », échappe toujours au contrôle de l’assemblée générale. Ces rémunérations d’administrateur à caractère exceptionnel demeurent parmi les plus élevées en Europe avec 928 000 € pour le CAC 40 en 2009, juste après leurs voisins latins : selon nos observations en 2008, les présidents français reçoivent quatre fois plus que leurs homologues allemands et néerlandais. A contrario, les administrateurs français du CAC 40, avec chacun 71 177 € en moyenne et 54 904 € en médiane, ressortent moins bien lotis que leur président et moins rémunérés que leurs homologues européens et se situent au douzième rang des rémunérations sur les seize pays que comprend l’étude 2008 des 300 premières capitalisations européennes (indice FTSE Eurofirst 300). Il serait de meilleure pratique que, à l’instar de tous ses collègues administrateurs non-exécutifs, le Président d’un conseil d’administration français ne se voit rémunérer qu’en jetons de présence, autorisés par l’assemblée générale au regard de l’article L.225-45 du Code de Commerce) et le législateur serait donc bien inspiré de revoir l’article L225-47 al.1 sur lequel se fonde les grandes sociétés françaises pour justifier l’absence de vote sur le sujet.
Les équipes dirigeantes dans leur ensemble (comités exécutifs, directoires…) voient une évolution contrastée : au niveau du CAC 40, c’est encore une baisse de 20% en 2009 de leur rémunération totale après la baisse de 14% en 2008, soit un total réduit à 1,4 M€ dont environ 1,1 M€ de part salariale et environ 400 000 € d’actionnarial tandis que les 80 autres sociétés de l’indice SBF 120 connaissent une baisse de 11%, après -17% en 2008, avec des chiffres évidemment plus modestes d’environ 600 000 € de part salariale et 200 000 € d’actionnarial.
Les critères de performance, mieux renseignés et donc mieux analysés dans le présent rapport, se sont généralisés sur les plans actionnariaux avec une répartition très nette de ces derniers : critères comptables internes pour les bonus annuels d’une part et critères externes de performance boursière pour les plans actionnariaux d’autre part. Comme les années précédentes, la transparence progresse donc mais la responsabilité régresse.
Alors que tous les pays, dont les Etats-Unis, ont, soit par la loi soit par le code de bonne gouvernance, adopté le principe de mise au vote annuel de la politique de rémunération, la France se refuse à soumettre les rémunérations des dirigeants à l’approbation de l’assemblée et au premier chef les rémunérations des présidents non exécutifs qui échappent ainsi à tout contrôle, au mépris de la loi. Le rejet en 2009 par les conseils d’administration de Total, Sanofi-Aventis, Cap Gemini, et cette année de Société Générale, de résolutions externes de très grands actionnaires demeure à nos yeux une violation de la loi et de la hiérarchie normale des contrôles.
Le second point d’importance concerne la transparence nécessaire des retraites chapeau relevée justement par le rapport de l’AMF sur l’application des recommandations AFEP/MEDEF. Proxinvest et ses collègues de l’European Corporate Governance Service (ECGS) sont donc conduits à rejeter tout plan de retraite sur-complémentaire présenté au vote qui serait mal documenté ou qui excéderait le plafond de 20% de la rémunération salariale moyenne au cours des trois dernières années. Il conviendrait également d’obliger les sociétés à communiquer le coût individuel annuel de cet élément de rémunération différée.
Le troisième point prioritaire pour Proxinvest est la meilleure lisibilité des critères de performance applicables aux bonus et aux plans actionnariaux : trop souvent les critères ne sont aucunement communiqués ou ne le sont que partiellement. On ne peut pas suivre l'AMF lorsqu’elle admet complaisamment la pleine recevabilité de critères de performance qualitatifs, « tout à fait légitimes », même s'ils restent confidentiels, pour la détermination de la partie variable de la rémunération. Proxinvest rejettera tout plan actionnarial n’offrant pas des critères de performance lisibles et mesurés sur long terme (minimum trois ans).
Pour 2011, Proxinvest et ses partenaires de l’ECGS ont défini leur politique de vote sur le contrôle des rémunérations et appellent le législateur ou l’AFEP-MEDEF à veiller à l’introduction d’un vote annuel sur la politique de rémunération en France afin de rendre les administrateurs plus responsables dans la définition de la politique de rémunération.
Paris, le 14 décembre 2010
Etrangement, la France, qui était il y a quelques années encore en avance sur les questions de gouvernance, est restée à l’écart du débat concernant le vote annuel des actionnaires sur la politique de rémunération, vote aussi appelé « Say on Pay », généralisé au Royaume-Uni, aux Pays-Bas et en Suisse, adopté en 2009 en Allemagne et enfin en 2010 en Belgique et aux Etats-Unis par l’importante loi Dodd Frank. La crise semble avoir eu raison de nombreux abus comme de leurs critiques les plus virulents, mais les actionnaires des sociétés françaises restent vigilants comme le démontrent les statistiques 2010 de vote aux assemblées générales.
Deux dossiers illustrent ce recul du débat public sur les rémunérations en 2010 : celui de la Société Générale, dont les retraites et indemnités de départ des dirigeants, et au premier chef le PDG Frédéric Oudéa, auront été silencieusement mais fortement critiquées. Le second dossier, à peine entendu, fut celui de Renault qui a tardivement avoué, en juin 2010, la rémunération complémentaire considérable de son Président, Carlos Ghosn, chez Nissan Motors - environ 8 M€ - alors que le rapport Renault n’avouait que 1,2 M€. Ce sont aussi, là encore, deux nouvelles démonstrations que les recommandations de modération et d’autorégulation du patronat ne règlent pas le problème et que peut-être seul l’arbitrage des actionnaires est en mesure de contenir les excès.
Pour les premiers dirigeants du CAC 40, la rémunération totale moyenne baisse de 14%, de 20% à échantillon constant avec une médiane stable, ceci après deux années de baisse moyenne plus fortes de 25% en 2008 et 17% en 2007, tandis que les autres dirigeants du SBF 120 ont vu, eux, leur rémunération baisser de 14% en 2009 contre 17% en 2008.
Toutefois la part salariale progresse de 5% au niveau du CAC 40 et stagne au niveau du SBF 120, et c’est sans surprise la part actionnariale, c’est-à-dire la dotation d’options et d’actions gratuites, qui se réduit en moyenne de 46% et explique l’essentiel de la baisse. L’AMF relève, d’ailleurs, en juillet 2010 que 21 sociétés sur les 56 disposant d’une politique d’attribution d’options ou d’actions n’ont procédé à aucune attribution à leurs dirigeants au titre de l’exercice 2009, et 50% seulement des sociétés observées ont accordé de nouvelles actions gratuites ou options en 2009 contre 63% en 2008.
La part salariale fixe, variable et « accessoire » dans le total perçu par les présidents exécutifs se renforce donc encore pour le CAC 40 : de 54% en 2007 à 61% en 2008 puis 76% pour 2009, et pour le SBF 120 (hors CAC 40) de 56 % en 2007 à 64% en 2008 puis 72% en 2009, puisque les bonus qui avaient baissé de 26% en 2008 ont cru en moyenne de 13% pour le CAC 40 et beaucoup moins pour les moindres capitalisations. A échantillon constant, cette part variable croît à 35% du total perçu alors que la part fixe qui, malgré un montant absolu quasi-constant, prend elle aussi une part encore plus forte du total - passant de 24% à 30% - aux dépens de la part des incitations à long terme.
En ce qui concerne les rémunérations des présidents exécutifs du SBF 120 versées en période de crise, la formule 30-35-35 fait place à une formule proche de 35-40-25 soit environ 35% de fixe, 40% de prime et 25% d’incitation actionnariale à long terme.
Pour 2009, les patrons exécutifs du CAC 40 ont donc perçu un total moyen de 3,1 M€ contre 3,6 M€ en 2008 et 4,7 M€ en 2007 : ce montant moyen n’excède donc plus notre plafond Proxinvest du socialement acceptable de 240 fois le SMIC (4,3 M€) et se compare à un total perçu par les autres premiers dirigeants de l’indice SBF 120 hors CAC 40 à 1,6 M€ (contre 1,8 M€ en 2007). L’écart avec la moyenne perçue par les autres dirigeants du SBF 250 est notable : un dirigeant du CAC 40 gagne encore presque cinq fois le montant reçu par un patron des 130 dernières capitalisations de l’indice : la pente reste impressionnante.
Préoccupation des investisseurs reprise par l’AMF, la rémunération des présidents non exécutifs, les « chairmen », échappe toujours au contrôle de l’assemblée générale. Ces rémunérations d’administrateur à caractère exceptionnel demeurent parmi les plus élevées en Europe avec 928 000 € pour le CAC 40 en 2009, juste après leurs voisins latins : selon nos observations en 2008, les présidents français reçoivent quatre fois plus que leurs homologues allemands et néerlandais. A contrario, les administrateurs français du CAC 40, avec chacun 71 177 € en moyenne et 54 904 € en médiane, ressortent moins bien lotis que leur président et moins rémunérés que leurs homologues européens et se situent au douzième rang des rémunérations sur les seize pays que comprend l’étude 2008 des 300 premières capitalisations européennes (indice FTSE Eurofirst 300). Il serait de meilleure pratique que, à l’instar de tous ses collègues administrateurs non-exécutifs, le Président d’un conseil d’administration français ne se voit rémunérer qu’en jetons de présence, autorisés par l’assemblée générale au regard de l’article L.225-45 du Code de Commerce) et le législateur serait donc bien inspiré de revoir l’article L225-47 al.1 sur lequel se fonde les grandes sociétés françaises pour justifier l’absence de vote sur le sujet.
Les équipes dirigeantes dans leur ensemble (comités exécutifs, directoires…) voient une évolution contrastée : au niveau du CAC 40, c’est encore une baisse de 20% en 2009 de leur rémunération totale après la baisse de 14% en 2008, soit un total réduit à 1,4 M€ dont environ 1,1 M€ de part salariale et environ 400 000 € d’actionnarial tandis que les 80 autres sociétés de l’indice SBF 120 connaissent une baisse de 11%, après -17% en 2008, avec des chiffres évidemment plus modestes d’environ 600 000 € de part salariale et 200 000 € d’actionnarial.
Les critères de performance, mieux renseignés et donc mieux analysés dans le présent rapport, se sont généralisés sur les plans actionnariaux avec une répartition très nette de ces derniers : critères comptables internes pour les bonus annuels d’une part et critères externes de performance boursière pour les plans actionnariaux d’autre part. Comme les années précédentes, la transparence progresse donc mais la responsabilité régresse.
Alors que tous les pays, dont les Etats-Unis, ont, soit par la loi soit par le code de bonne gouvernance, adopté le principe de mise au vote annuel de la politique de rémunération, la France se refuse à soumettre les rémunérations des dirigeants à l’approbation de l’assemblée et au premier chef les rémunérations des présidents non exécutifs qui échappent ainsi à tout contrôle, au mépris de la loi. Le rejet en 2009 par les conseils d’administration de Total, Sanofi-Aventis, Cap Gemini, et cette année de Société Générale, de résolutions externes de très grands actionnaires demeure à nos yeux une violation de la loi et de la hiérarchie normale des contrôles.
Le second point d’importance concerne la transparence nécessaire des retraites chapeau relevée justement par le rapport de l’AMF sur l’application des recommandations AFEP/MEDEF. Proxinvest et ses collègues de l’European Corporate Governance Service (ECGS) sont donc conduits à rejeter tout plan de retraite sur-complémentaire présenté au vote qui serait mal documenté ou qui excéderait le plafond de 20% de la rémunération salariale moyenne au cours des trois dernières années. Il conviendrait également d’obliger les sociétés à communiquer le coût individuel annuel de cet élément de rémunération différée.
Le troisième point prioritaire pour Proxinvest est la meilleure lisibilité des critères de performance applicables aux bonus et aux plans actionnariaux : trop souvent les critères ne sont aucunement communiqués ou ne le sont que partiellement. On ne peut pas suivre l'AMF lorsqu’elle admet complaisamment la pleine recevabilité de critères de performance qualitatifs, « tout à fait légitimes », même s'ils restent confidentiels, pour la détermination de la partie variable de la rémunération. Proxinvest rejettera tout plan actionnarial n’offrant pas des critères de performance lisibles et mesurés sur long terme (minimum trois ans).
Pour 2011, Proxinvest et ses partenaires de l’ECGS ont défini leur politique de vote sur le contrôle des rémunérations et appellent le législateur ou l’AFEP-MEDEF à veiller à l’introduction d’un vote annuel sur la politique de rémunération en France afin de rendre les administrateurs plus responsables dans la définition de la politique de rémunération.
Paris, le 14 décembre 2010
Mission accomplie pour les jeunes socialistes suisses
Mission accomplie! La JS a récolté plus de 125'000 signatures pour l'initiative 1:12 l'année passée. Ainsi, nous avons bouclé l'initiative en 13 mois seulement. Un grand merci à tous et toutes nos militant-e-s en toute la Suisse ! Nous remercions également de tout cœur nos organisations partenaires : le PS, les Verts et les jeunes vert-e-s et les syndicats de l'USS.
Notre initiative 1:12 est aujourd'hui plus importante que jamais. Car les managers continuent comme si de rien n'était : Le Crédit Suisse vient d'annoncer une perte de plusieurs millions - et en même temps ils ont encore augmenté les bonus des managers. Ceux et celles qui payent pour ça sont les travailleurs et travailleuses normaux/normales : Ce que se servent les profiteurs, manque à tout les autres.
L'initiative 1:12 est la seule réponse aux arnaqueurs. Et ce sont plus de deux milles jeunes qui ont tout donné pendant une année parce qu'ils et elles sont persuadé-e-s qu'ensemble nous pouvons faire bouger tout et qu'ensemble nous allons lutter par la suite. Les arnaqueurs dans ce pays doivent profiter de leur dernier hiver au chaud !
Nous aimerions fêter ce succès: Suite à l'Assemblée des Délégué-e-s le 13 novembre à Bienne aura lieu la fête finale de l'1 :12. Tous et toutes sont cordialement invité-e-s.
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Notre initiative 1:12 est aujourd'hui plus importante que jamais. Car les managers continuent comme si de rien n'était : Le Crédit Suisse vient d'annoncer une perte de plusieurs millions - et en même temps ils ont encore augmenté les bonus des managers. Ceux et celles qui payent pour ça sont les travailleurs et travailleuses normaux/normales : Ce que se servent les profiteurs, manque à tout les autres.
L'initiative 1:12 est la seule réponse aux arnaqueurs. Et ce sont plus de deux milles jeunes qui ont tout donné pendant une année parce qu'ils et elles sont persuadé-e-s qu'ensemble nous pouvons faire bouger tout et qu'ensemble nous allons lutter par la suite. Les arnaqueurs dans ce pays doivent profiter de leur dernier hiver au chaud !
Nous aimerions fêter ce succès: Suite à l'Assemblée des Délégué-e-s le 13 novembre à Bienne aura lieu la fête finale de l'1 :12. Tous et toutes sont cordialement invité-e-s.
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Changer la vie : programme de gouvernement du parti socialiste
1.1.1. Un nouveau droit du travail
i) Les conventions collectives et les accords d'entreprise devront fixer un écart maximum des salaires.
Et parmi les "110 propositions du candidat Mitterrand de 1981
31 - Le SMIC sera relevé. Son montant sera fixé après négociations avec les organisations syndicales. La nouvelle hiérarchie des salaires inscrite dans les conventions collectives sera respectée. Les prestations familiales seront revalorisés de 50 % en deux étapes. Les indemnités de chômage seront fortement augmentées.
1.1.1. Un nouveau droit du travail
i) Les conventions collectives et les accords d'entreprise devront fixer un écart maximum des salaires.
Et parmi les "110 propositions du candidat Mitterrand de 1981
31 - Le SMIC sera relevé. Son montant sera fixé après négociations avec les organisations syndicales. La nouvelle hiérarchie des salaires inscrite dans les conventions collectives sera respectée. Les prestations familiales seront revalorisés de 50 % en deux étapes. Les indemnités de chômage seront fortement augmentées.
Programme commun de gouvernement de la gauche
Chapitre 1 : les salaires, l'emploi et les conditions de travail
Des grilles hiérarchiques uniques recouvrant l'ensemble des qualifications et fixant pour chaque niveau un salaire minimum garanti seront introduites dans les conventions collectives et les accords d'entreprise. L'écart maximum des salaires sera fixé suivant les mêmes modalités. L'amplitude de la hiérarchie réelle des salaires ne tiendra compte que des critères de qualification, de responsabilité et d'ancienneté. Les avantages d'une mensualisation véritable seront généralisés.
Chapitre 1 : les salaires, l'emploi et les conditions de travail
Des grilles hiérarchiques uniques recouvrant l'ensemble des qualifications et fixant pour chaque niveau un salaire minimum garanti seront introduites dans les conventions collectives et les accords d'entreprise. L'écart maximum des salaires sera fixé suivant les mêmes modalités. L'amplitude de la hiérarchie réelle des salaires ne tiendra compte que des critères de qualification, de responsabilité et d'ancienneté. Les avantages d'une mensualisation véritable seront généralisés.
Au moment où l’on demande aux catégories les plus modestes d’accepter des régressions sociales majeures au nom de la compétitivité, il est inacceptable de voir se constituer des fortunes sur la base de pures logiques spéculatives et rentières. Tant pour des raisons de justice sociale que d’ordre public et de politique de santé, il faut donc stopper la dérive folle des très hauts revenus.
Quel est en effet l’argument principal des dealers dans une cité de banlieue quand ils cherchent à convaincre un jeune d’entrer dans un réseau de revente ? « Pourquoi te fatiguer à gagner en un mois ce que tu peux gagner en une journée ? Regarde au JT, on a encore eu l’exemple d’un grand patron qui rafle un paquet énorme de stocks options ou augmente son salaire de 30 % alors que sa boîte est en difficulté… Telle est la loi de la jungle dans laquelle nous sommes. » Au-delà d’un certain seuil, les inégalités de revenu ou de fortune sont des incitations à l’incivisme et à la délinquance. C’est encore plus vrai à l’échelle mondiale. Quand la fortune de deux cent vingt-cinq personnes est égale au revenu de deux milliards et demi d’êtres humains (chiffres officiels du PNUD), le cocktail explosif de l’humiliation et de la misère constitue un réservoir de choix pour les fondamentalismes, les intégrismes et les terrorismes de toute nature. Problème d’ordre public donc, mais aussi problème de santé mentale. Au-delà d’un certain niveau de fortune, il se met en place un phénomène psychique de déréalisation. C’est ce processus qui se produit chez nombre de sportifs, d’artistes, de PDG, de présentateurs de TV, etc., qui « disjonctent » et, circonstance aggravante, entraînent souvent les collectifs ou les entreprises dont ils sont membres ou responsables dans leur propre délire. Le cas Messier-Vivendi en est un exemple patent. Outre des raisons de justice sociale évidentes – rien ne peut justifier que des êtres humains soient à la rue quand d’autres ne savent pas quoi faire de leur argent –, une réforme de ce type devrait être proposée conjointement par le ministère de l’Intérieur et le ministère de la Santé. Plusieurs modalités sont envisageables. L’une d’entre elles, libérale dans ses modalités d’application, consisterait à proposer un processus en deux temps.
1. Le Parlement délibère du niveau maximal d’inégalités réelles (et non statistiques) compatibles avec l’idée que la collectivité se fait de ses propres valeurs. Il définit ainsi un seuil de revenu minimal et un seuil de revenu (personnel) maximal. Les deux revenus sont liés selon le principe thermostatique : quand il y a excès d’un côté, insuffisance de l’autre, on crée une boucle de rétroaction positive. Si l’on veut augmenter le RMA (revenu maximal acceptable personnel), il faut augmenter aussi les minima sociaux. Dans le cas où le Parlement refuserait de définir un plafond, il doit assumer publiquement la réalité du niveau d’inégalités. Reconnaître par exemple, qu’au pays de la Déclaration des droits de l’homme, l’inégalité effective est aujourd’hui dans un rapport de un à mille et au-delà. Aux États Unis, comme le rappelle Alain Caillé, le rapport entre les salaires les plus bas et ceux des PDG est passé entre 1970 et 2000 d’un rapport de 1 à 39 à un rapport de 1 à 1000, soit une multiplication par 25.
2. Le plafond maximal personnel étant défini, tout revenu supérieur peut être, au choix, versé dans l’ISF ou, si l’on démontre l’utilité sociale de ce supplément de revenu, affecté à une fondation. La fondation peut être en effet un bon cadre pour répondre de manière très libérale à cet objectif très radical. Dans ce cas, les personnes dont le revenu dépasse le RMA disposeraient de la première partie de l’année fiscale pour déposer un projet de fondation associant la personne concernée et la collectivité. La fondation peut d’ailleurs porter le nom de cette personne si cela peut satisfaire son ego, mais comme dans toute fondation, la collectivité y est représentée et les objectifs affichés doivent correspondre à des critères d’utilité publique ou sociale (au sens large : y compris écologique).
Il faudra, bien entendu, répondre à l’argument du risque d’évasion fiscale qu’une telle mesure ne manquera pas de susciter. Ce projet devrait donc être couplé avec d’autres propositions concernant la lutte contre les paradis fiscaux, défendues notamment par ATTAC. Mais on peut d’ores et déjà dire que ceux qui sont cyniques et inciviques au point de refuser une telle mesure sont peu utiles à leur pays. Dans une économie de la connaissance et à l’heure de la révolution de l’intelligence, la qualité de l’intelligence est directement liée à la qualité d’écoute et de générosité. L’autisme et le cynisme ne sont guère propices à la fécondité de l’intelligence collective. Leur « délocalisation » volontaire ne serait pas pour le coup un drame national…
Extrait d'un article de Patrick Viveret intitulé "Au-delà de la richesse monétaire" et paru dans le numéro 26 de la revue du Mauss en 2005
1. Le Parlement délibère du niveau maximal d’inégalités réelles (et non statistiques) compatibles avec l’idée que la collectivité se fait de ses propres valeurs. Il définit ainsi un seuil de revenu minimal et un seuil de revenu (personnel) maximal. Les deux revenus sont liés selon le principe thermostatique : quand il y a excès d’un côté, insuffisance de l’autre, on crée une boucle de rétroaction positive. Si l’on veut augmenter le RMA (revenu maximal acceptable personnel), il faut augmenter aussi les minima sociaux. Dans le cas où le Parlement refuserait de définir un plafond, il doit assumer publiquement la réalité du niveau d’inégalités. Reconnaître par exemple, qu’au pays de la Déclaration des droits de l’homme, l’inégalité effective est aujourd’hui dans un rapport de un à mille et au-delà. Aux États Unis, comme le rappelle Alain Caillé, le rapport entre les salaires les plus bas et ceux des PDG est passé entre 1970 et 2000 d’un rapport de 1 à 39 à un rapport de 1 à 1000, soit une multiplication par 25.
2. Le plafond maximal personnel étant défini, tout revenu supérieur peut être, au choix, versé dans l’ISF ou, si l’on démontre l’utilité sociale de ce supplément de revenu, affecté à une fondation. La fondation peut être en effet un bon cadre pour répondre de manière très libérale à cet objectif très radical. Dans ce cas, les personnes dont le revenu dépasse le RMA disposeraient de la première partie de l’année fiscale pour déposer un projet de fondation associant la personne concernée et la collectivité. La fondation peut d’ailleurs porter le nom de cette personne si cela peut satisfaire son ego, mais comme dans toute fondation, la collectivité y est représentée et les objectifs affichés doivent correspondre à des critères d’utilité publique ou sociale (au sens large : y compris écologique).
Il faudra, bien entendu, répondre à l’argument du risque d’évasion fiscale qu’une telle mesure ne manquera pas de susciter. Ce projet devrait donc être couplé avec d’autres propositions concernant la lutte contre les paradis fiscaux, défendues notamment par ATTAC. Mais on peut d’ores et déjà dire que ceux qui sont cyniques et inciviques au point de refuser une telle mesure sont peu utiles à leur pays. Dans une économie de la connaissance et à l’heure de la révolution de l’intelligence, la qualité de l’intelligence est directement liée à la qualité d’écoute et de générosité. L’autisme et le cynisme ne sont guère propices à la fécondité de l’intelligence collective. Leur « délocalisation » volontaire ne serait pas pour le coup un drame national…
Extrait d'un article de Patrick Viveret intitulé "Au-delà de la richesse monétaire" et paru dans le numéro 26 de la revue du Mauss en 2005
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"La première mesure à prendre pour lutter contre l’esprit de démesure qui s’est abattu sur le monde ces trente dernières années est de poser qu’aucun être humain n’est autorisé à jouir de richesses potentiellement infinies."
En 1797, Thomas Paine, le principal champion et théoricien des droits de l’homme, dédie au Directoire un libelle dont l’argumentation reste plus actuelle que jamais. Se demandant si «l’état de société… a augmenté ou diminué le bonheur de la race humaine en général», il conclut que la question politique première est de savoir comment rendre la civilisation préférable à l’état de nature aux yeux de la grande majorité des êtres humains. Qui peut douter que ce sera là la question première du XXIe siècle également : comment éviter qu’une partie de l’humanité, rendue d’autant plus pauvre que l’autre sera toujours plus riche, ne préfère systématiquement «l’état de nature», autrement dit la guerre de tous contre tous, à l’état de société ?
Au-delà des multiples réponses particulières possibles à ce défi, il importe d’appréhender le problème ainsi posé dans sa plus grande généralité. Il réside très probablement dans le fait que les fondements de notre conception héritée de la démocratie se révèlent de plus en plus inadaptés à l’état du monde globalisé. Ces fondements utilitaristes sont organisés à partir de la question : «A quoi ça [me] sert ?» Dès lors, la démocratie est vue comme le fruit d’une libre association entre des individus mutuellement indifférents, cherchant tous à maximiser leur avantage individuel. Le but en est la recherche du plus grand bonheur du plus grand nombre, et le moyen, la croissance économique.
Cette interprétation utilitariste de la démocratie pose trois séries de problèmes :
1) A mesure que l’idéal démocratique se mondialise il rend de plus en plus insupportables l’inégalité et la dissymétrie entre les anciens dominants occidentaux - qui sont souvent les anciens colonisateurs - et les autres pays, nations, cultures ou civilisations. Sans une reconnaissance de l’égale dignité de tous les peuples et de toutes les cultures, plus facile à dire qu’à réaliser, on n’évitera pas la guerre de tous contre tous.
2) L’acceptation de la démocratie de marché a été largement conditionnée par une croissance économique sans précédent qui offrait à tous la perspective d’une mobilité sociale ascendante. Or en Occident les ressorts de cette forte croissance sont désormais brisés. La question, redoutable, sera de savoir si l’idéal régulateur démocratique va pouvoir y rester vivace en présence d’une croissance faible ou quasi nulle.
3) Enfin, tout le monde voit bien que là où la dynamique de la croissance reste encore puissante, dans les Bric et les pays émergents, rien n’assure qu’elle sera facteur de démocratisation effective et pérenne. Et surtout, tout porte à croire qu’elle ne sera possible qu’un temps relativement bref, au prix et en raison d’une dégradation dramatique et irréversible de l’écosphère. On le sait, il faudrait plusieurs planètes pour rendre possible l’universalisation du standard de vie occidental.
Tout ceci se résume en une question dramatiquement simple : l’espoir utilitariste porté par l’Occident depuis des siècles aura été celui d’un dépassement du conflit entre les hommes par l’accroissement de la prospérité matérielle. Une telle croissance sans limites devient désormais de plus en plus problématique : saurons-nous, en l’absence d’une croissance infinie, trouver les moyens de vivre ensemble, démocratiquement et d’une vie digne, sans nous massacrer les uns les autres ?
Que pourrait donc signifier le projet de trouver à la démocratie des fondements non utilitaristes, anti-utilitaristes, ou supra anti-utilitaristes ? Dans l’Essai sur le don (1924), Marcel Mauss établit que les sociétés archaïques ne reposaient nullement sur le marché ou le troc, l’achat, la vente ou le contrat mais sur ce qu’il appelle la triple obligation de donner, recevoir et rendre. Sur l’obligation, autrement dit, de rivaliser de superbe et de générosité pour être reconnu comme pleinement humain. Ce qu’expose Marcel Mauss est donc une conception politique du don, et réciproquement. Le don - mieux vaudrait dire le défi du don - est cet opérateur paradoxal qui permet aux guerriers de transformer les ennemis en alliés, de passer de la guerre à la paix, donc, et, complémentairement, de la mort et de la stérilité à la vie et à la créativité. Si le don a cette vertu pacificatrice, c’est parce qu’il symbolise la reconnaissance que les hommes en conflit se donnent de leur valeur humaine réciproque. Il affirme qu’avant de produire et échanger des biens matériels utiles, il faut commencer par faire la paix en s’accordant mutuellement une reconnaissance première inconditionnelle.
C’est ce que devra apprendre à faire une idéologie politique d’un nouveau type qu’il est possible d’identifier par provision sous l’étiquette de «convivialisme». Libéralisme, socialisme ou communisme auront été autant de modalités d’une philosophie politique utilitariste faisant de la croissance indéfinie de la prospérité matérielle la réponse par excellence à l’aspiration démocratique. Le convivialisme pose la question de savoir comment «bien vivre ensemble» et comment faire vivre la démocratie même s’il n’y a pas ou plus de croissance économique continue. Il s’affronte donc directement à la question cruciale de notre temps qui est celle des moyens de lutter contre la démesure, l’ubris : comment l’humanité peut-elle apprendre à s’autolimiter ? Le principe de base du convivialisme et de la lutte contre l’illimitation consiste dans l’affirmation de la «commune humanité» et de la «commune socialité» de tous les êtres humains. Sa prise au sérieux implique la subordination de toute mesure politique au respect prioritaire de la dignité humaine, matérielle et morale. Le principe de commune humanité a deux corrélats nécessaires : éviter que certains ne tombent dans un état de sous-humanité, et que d’autres n’aspirent à basculer dans un état de suprahumanité.
Concrètement, le premier corrélat rejoint la proposition développée par Thomas Paine dans son libelle. Le seul moyen, écrivait-il, de convertir l’immense majorité des humains à la certitude que la civilisation est préférable à l’état de nature est de leur accorder sans condition un revenu minimum leur permettant d’échapper à la misère. Généralisons : dans la société conviviale à édifier, la source première de la légitimité des Etats et des gouvernements résidera dans leur capacité à assurer effectivement aux citoyens les conditions matérielles de leur existence de base, proportionnées à la situation générale du pays ou de la région, quelles que soient leur race, leur religion ou leurs croyances.
Symétriquement, la première mesure à prendre pour lutter contre l’esprit de démesure qui s’est abattu sur le monde ces trente dernières années est de poser qu’aucun être humain n’est autorisé à jouir de richesses potentiellement infinies. Ce propos n’est en lui-même porteur d’aucun égalitarisme radical ou dogmatique. C’est au débat démocratique qu’il appartiendra de déterminer quel est l’écart de richesse et de revenus désirable et acceptable. Mais il suffit de constater que l’écart de revenu entre les cent patrons américains les mieux payés et leurs salariés de base a été multiplié par 25 depuis 1970 pour se convaincre qu’il y a de la marge. Posons donc que, pour les pays occidentaux, le retour le plus rapide possible aux normes d’égalité-inégalité qui prévalaient encore dans les années 70 doit désormais devenir une priorité absolue.
Seule l’affirmation du principe inconditionnel de commune humanité et l’institution conjointe d’un revenu minimum et d’un revenu maximum peut nous donner de vraies chances d’éviter la double catastrophe qui nous guette à brève échéance : celle d’une dégradation dramatique et irréversible de l’environnement naturel et celle du déchaînement de la guerre de tous contre tous.
Par ALAIN CAILLÉ
Libération, le 9 novembre 2010
Au-delà des multiples réponses particulières possibles à ce défi, il importe d’appréhender le problème ainsi posé dans sa plus grande généralité. Il réside très probablement dans le fait que les fondements de notre conception héritée de la démocratie se révèlent de plus en plus inadaptés à l’état du monde globalisé. Ces fondements utilitaristes sont organisés à partir de la question : «A quoi ça [me] sert ?» Dès lors, la démocratie est vue comme le fruit d’une libre association entre des individus mutuellement indifférents, cherchant tous à maximiser leur avantage individuel. Le but en est la recherche du plus grand bonheur du plus grand nombre, et le moyen, la croissance économique.
Cette interprétation utilitariste de la démocratie pose trois séries de problèmes :
1) A mesure que l’idéal démocratique se mondialise il rend de plus en plus insupportables l’inégalité et la dissymétrie entre les anciens dominants occidentaux - qui sont souvent les anciens colonisateurs - et les autres pays, nations, cultures ou civilisations. Sans une reconnaissance de l’égale dignité de tous les peuples et de toutes les cultures, plus facile à dire qu’à réaliser, on n’évitera pas la guerre de tous contre tous.
2) L’acceptation de la démocratie de marché a été largement conditionnée par une croissance économique sans précédent qui offrait à tous la perspective d’une mobilité sociale ascendante. Or en Occident les ressorts de cette forte croissance sont désormais brisés. La question, redoutable, sera de savoir si l’idéal régulateur démocratique va pouvoir y rester vivace en présence d’une croissance faible ou quasi nulle.
3) Enfin, tout le monde voit bien que là où la dynamique de la croissance reste encore puissante, dans les Bric et les pays émergents, rien n’assure qu’elle sera facteur de démocratisation effective et pérenne. Et surtout, tout porte à croire qu’elle ne sera possible qu’un temps relativement bref, au prix et en raison d’une dégradation dramatique et irréversible de l’écosphère. On le sait, il faudrait plusieurs planètes pour rendre possible l’universalisation du standard de vie occidental.
Tout ceci se résume en une question dramatiquement simple : l’espoir utilitariste porté par l’Occident depuis des siècles aura été celui d’un dépassement du conflit entre les hommes par l’accroissement de la prospérité matérielle. Une telle croissance sans limites devient désormais de plus en plus problématique : saurons-nous, en l’absence d’une croissance infinie, trouver les moyens de vivre ensemble, démocratiquement et d’une vie digne, sans nous massacrer les uns les autres ?
Que pourrait donc signifier le projet de trouver à la démocratie des fondements non utilitaristes, anti-utilitaristes, ou supra anti-utilitaristes ? Dans l’Essai sur le don (1924), Marcel Mauss établit que les sociétés archaïques ne reposaient nullement sur le marché ou le troc, l’achat, la vente ou le contrat mais sur ce qu’il appelle la triple obligation de donner, recevoir et rendre. Sur l’obligation, autrement dit, de rivaliser de superbe et de générosité pour être reconnu comme pleinement humain. Ce qu’expose Marcel Mauss est donc une conception politique du don, et réciproquement. Le don - mieux vaudrait dire le défi du don - est cet opérateur paradoxal qui permet aux guerriers de transformer les ennemis en alliés, de passer de la guerre à la paix, donc, et, complémentairement, de la mort et de la stérilité à la vie et à la créativité. Si le don a cette vertu pacificatrice, c’est parce qu’il symbolise la reconnaissance que les hommes en conflit se donnent de leur valeur humaine réciproque. Il affirme qu’avant de produire et échanger des biens matériels utiles, il faut commencer par faire la paix en s’accordant mutuellement une reconnaissance première inconditionnelle.
C’est ce que devra apprendre à faire une idéologie politique d’un nouveau type qu’il est possible d’identifier par provision sous l’étiquette de «convivialisme». Libéralisme, socialisme ou communisme auront été autant de modalités d’une philosophie politique utilitariste faisant de la croissance indéfinie de la prospérité matérielle la réponse par excellence à l’aspiration démocratique. Le convivialisme pose la question de savoir comment «bien vivre ensemble» et comment faire vivre la démocratie même s’il n’y a pas ou plus de croissance économique continue. Il s’affronte donc directement à la question cruciale de notre temps qui est celle des moyens de lutter contre la démesure, l’ubris : comment l’humanité peut-elle apprendre à s’autolimiter ? Le principe de base du convivialisme et de la lutte contre l’illimitation consiste dans l’affirmation de la «commune humanité» et de la «commune socialité» de tous les êtres humains. Sa prise au sérieux implique la subordination de toute mesure politique au respect prioritaire de la dignité humaine, matérielle et morale. Le principe de commune humanité a deux corrélats nécessaires : éviter que certains ne tombent dans un état de sous-humanité, et que d’autres n’aspirent à basculer dans un état de suprahumanité.
Concrètement, le premier corrélat rejoint la proposition développée par Thomas Paine dans son libelle. Le seul moyen, écrivait-il, de convertir l’immense majorité des humains à la certitude que la civilisation est préférable à l’état de nature est de leur accorder sans condition un revenu minimum leur permettant d’échapper à la misère. Généralisons : dans la société conviviale à édifier, la source première de la légitimité des Etats et des gouvernements résidera dans leur capacité à assurer effectivement aux citoyens les conditions matérielles de leur existence de base, proportionnées à la situation générale du pays ou de la région, quelles que soient leur race, leur religion ou leurs croyances.
Symétriquement, la première mesure à prendre pour lutter contre l’esprit de démesure qui s’est abattu sur le monde ces trente dernières années est de poser qu’aucun être humain n’est autorisé à jouir de richesses potentiellement infinies. Ce propos n’est en lui-même porteur d’aucun égalitarisme radical ou dogmatique. C’est au débat démocratique qu’il appartiendra de déterminer quel est l’écart de richesse et de revenus désirable et acceptable. Mais il suffit de constater que l’écart de revenu entre les cent patrons américains les mieux payés et leurs salariés de base a été multiplié par 25 depuis 1970 pour se convaincre qu’il y a de la marge. Posons donc que, pour les pays occidentaux, le retour le plus rapide possible aux normes d’égalité-inégalité qui prévalaient encore dans les années 70 doit désormais devenir une priorité absolue.
Seule l’affirmation du principe inconditionnel de commune humanité et l’institution conjointe d’un revenu minimum et d’un revenu maximum peut nous donner de vraies chances d’éviter la double catastrophe qui nous guette à brève échéance : celle d’une dégradation dramatique et irréversible de l’environnement naturel et celle du déchaînement de la guerre de tous contre tous.
Par ALAIN CAILLÉ
Libération, le 9 novembre 2010
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Déjà en 2001, Patrick Viveret faisait deux "propositions hétérodoxes" dont un revenu personnel maximal.
5.282 Pour un revenu personnel maximal indexé sur les revenus minimaux
motifs : Comme le notait Keynes il y a des limites à l’inégalité des profits au delà desquels le capitalisme lui même entre dans une zone dangereuse. Plus fondamentalement une société ne peut durablement prétendre transmettre des valeurs éthiques et civiques à ses enfants si elle donne en permanence le spectacle de fortunes dont l’ampleur et la rapidité est sans rapport avec le risque, l’effort, le mérite ou le service rendu. Il ne faut pas s’étonner ensuite de retrouver cette même justification chez des dealers quand ils veulent convaincre des jeunes de gagner en une journée ce qu’ils mettraient péniblement un mois à obtenir dans un emploi normal. Il ne s’agit pas cependant de mettre en cause la possibilité de fortunes dont l’essentiel de l’usage produit une forme d’utilité collective (créations d’emplois, d’infrastructures , de services etc.). On sait en effet que le contre argument souvent entendu à l’idée de toute limitation des fortunes et le suivant : grâce à cet argent nous créons de l’emploi, de l’activité, nous entretenons un patrimoine culturel ou artistique etc. Un équilibre doit donc être trouvé entre l’exigence d’un plafonnement des revenus personnels et le fait d’utiliser des fonds pour un usage collectif. Le système des fondations peut être une voie d’équilibre entre ces deux exigences d’un processus de création infiniment moins dangereux et contestable que la création de monnaie bancaire destinée aux emprunts en vue d’achats d’actions sur les marchés financiers.
Proposition 34 à 36 : étude, expérimentation puis élaboration d’une loi fixant la fourchette maximale d’inégalités réelles entre les revenus personnels minimaux et maximaux. Au delà du seuil supérieur fixé les personnes disposant de fortunes peuvent créer des fondations à leur nom afin que cet argent soit utilisé pour répondre à un objet social reconnu (P35). La fondation reconnaît ainsi à la fois un droit symbolique et de pouvoir d’affectation au fondateur mais assure aussi la présence de la collectivité qui garantit que ces sommes sont destinées à l’objet social déclaré. Ce n’est que dans le cas où les personnes sont dans l’incapacité de montrer une quelconque utilité sociale de ces fortunes excédentaires qu’un mécanisme d’imposition sur la fortune plus lourd serait alors mis en œuvre.
Variante minimale : à tout le moins, et dans un premier temps, le Parlement devrait énoncer, après enquête, la fourchette réelle (et non moyenne) des inégalités monétaires au sein du pays. Dans l’hypothèse où il ne souhaite pas changer cette situation il devrait au moins assumer publiquement sa réalité comme un choix de société (P36).
Extrait (p. 93) du rapport de Patrick Viveret ayant pour titre "Reconsidérer la richesse"
On peut lire la totalité de ce rapport ci-dessous
motifs : Comme le notait Keynes il y a des limites à l’inégalité des profits au delà desquels le capitalisme lui même entre dans une zone dangereuse. Plus fondamentalement une société ne peut durablement prétendre transmettre des valeurs éthiques et civiques à ses enfants si elle donne en permanence le spectacle de fortunes dont l’ampleur et la rapidité est sans rapport avec le risque, l’effort, le mérite ou le service rendu. Il ne faut pas s’étonner ensuite de retrouver cette même justification chez des dealers quand ils veulent convaincre des jeunes de gagner en une journée ce qu’ils mettraient péniblement un mois à obtenir dans un emploi normal. Il ne s’agit pas cependant de mettre en cause la possibilité de fortunes dont l’essentiel de l’usage produit une forme d’utilité collective (créations d’emplois, d’infrastructures , de services etc.). On sait en effet que le contre argument souvent entendu à l’idée de toute limitation des fortunes et le suivant : grâce à cet argent nous créons de l’emploi, de l’activité, nous entretenons un patrimoine culturel ou artistique etc. Un équilibre doit donc être trouvé entre l’exigence d’un plafonnement des revenus personnels et le fait d’utiliser des fonds pour un usage collectif. Le système des fondations peut être une voie d’équilibre entre ces deux exigences d’un processus de création infiniment moins dangereux et contestable que la création de monnaie bancaire destinée aux emprunts en vue d’achats d’actions sur les marchés financiers.
Proposition 34 à 36 : étude, expérimentation puis élaboration d’une loi fixant la fourchette maximale d’inégalités réelles entre les revenus personnels minimaux et maximaux. Au delà du seuil supérieur fixé les personnes disposant de fortunes peuvent créer des fondations à leur nom afin que cet argent soit utilisé pour répondre à un objet social reconnu (P35). La fondation reconnaît ainsi à la fois un droit symbolique et de pouvoir d’affectation au fondateur mais assure aussi la présence de la collectivité qui garantit que ces sommes sont destinées à l’objet social déclaré. Ce n’est que dans le cas où les personnes sont dans l’incapacité de montrer une quelconque utilité sociale de ces fortunes excédentaires qu’un mécanisme d’imposition sur la fortune plus lourd serait alors mis en œuvre.
Variante minimale : à tout le moins, et dans un premier temps, le Parlement devrait énoncer, après enquête, la fourchette réelle (et non moyenne) des inégalités monétaires au sein du pays. Dans l’hypothèse où il ne souhaite pas changer cette situation il devrait au moins assumer publiquement sa réalité comme un choix de société (P36).
Extrait (p. 93) du rapport de Patrick Viveret ayant pour titre "Reconsidérer la richesse"
On peut lire la totalité de ce rapport ci-dessous
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L'excellente revue "Mouvements" a intitulé son dernier numéro "Pour en finir avec les riches (et les pauvres)" dans lequel il y a deux articles consacrés au salaire maximum. Voici donc le second écrit par Ruth Foxe Blader et Edward Castleton.
En septembre 2008 aux États-Unis, dans le bureau de chaque Sénateur et de chaque représentant du Congrès, le téléphone se mit à sonner sans interruption. Les sociétés de crédit immobilier et à la consommation Fannie Mae et Freddie Mac étaient nationalisées ; des banques et des groupes d’investissement comme Countrywide, Merril Lynch, Bear Stearns, Lehman Brothers, la Banque Wachiova, ou Washington Mutual avaient cessé d’exister. Mais peut-être aussi surprenant que le chaos sans précédent, depuis les années 1930, qui ravageait le système financier mondial, fut pour les représentants élus de la nation la nature unanime des appels qu’ils recevaient : « Pas de plan de soutien. Laissez les banques faire faillite ».
Cette demande considérée comme suicidaire par les économistes dominants, aussi bien de droite que de gauche, reflétait la volonté majoritaire du peuple américain. En une nuit ou presque un langage économique ésotérique, saturé de références à des choses aussi opaques que les « produits dérivés sur défauts de crédit » ou les « obligations adossées à des actifs », était révélé et largement diffusé par les médias aux masses profanes. Le nouvel idiome ressaisissait brutalement la vérité de la société américaine, à savoir que les 5 % des ménages américains les plus riches, dont le revenu annuel moyen avoisinait désormais les 300 000 dollars, avaient mis en place le cœur léger un système complexe de paris pour redistribuer à leur bénéfice les investissements faits par les travailleurs en vue de leur retraite. Et ceci alors même que les revenus des 0,1 % des ménages les plus riches étaient jusqu’à 181 fois supérieurs au revenu moyen des 90 % des ménages du bas de l’échelle. Dans le double contexte d’une catastrophe économique mondiale et de l’élection historique du président Obama, il devenait possible socialement de suggérer que certains Américains gagnaient trop.
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Cette demande considérée comme suicidaire par les économistes dominants, aussi bien de droite que de gauche, reflétait la volonté majoritaire du peuple américain. En une nuit ou presque un langage économique ésotérique, saturé de références à des choses aussi opaques que les « produits dérivés sur défauts de crédit » ou les « obligations adossées à des actifs », était révélé et largement diffusé par les médias aux masses profanes. Le nouvel idiome ressaisissait brutalement la vérité de la société américaine, à savoir que les 5 % des ménages américains les plus riches, dont le revenu annuel moyen avoisinait désormais les 300 000 dollars, avaient mis en place le cœur léger un système complexe de paris pour redistribuer à leur bénéfice les investissements faits par les travailleurs en vue de leur retraite. Et ceci alors même que les revenus des 0,1 % des ménages les plus riches étaient jusqu’à 181 fois supérieurs au revenu moyen des 90 % des ménages du bas de l’échelle. Dans le double contexte d’une catastrophe économique mondiale et de l’élection historique du président Obama, il devenait possible socialement de suggérer que certains Américains gagnaient trop.
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