II faut choisir : ça dure ou ça brûle ; le drame, c'est que ça ne puisse pas à la fois durer et brûler. Albert Camus

Alors que Michel Onfray rassemble encore toutes ses forces pour démontrer que Freud est un imposteur, on pourrait se demander si sa prochaine cible ne sera pas les inventeurs du rock :-). Car le rock n'est-il pas un peu l'abolition du surmoi ?! C'est encore à cause de Freud tout "ça" !
Après "Rock'n philo" de Francis Métivier, je me suis plongée dans le livre "Culture Rock" de Denis Roulleau, attirée par les couleurs très "pop" et vitalisantes de la couverture. Je n'ai pas été déçue d'avoir traversé les mythes (au sens de Roland Barthes) de cette révolution culturelle. Aisément accessible, cette encyclopédie est composée de 250 entrées par ordre alphabétique, dans une ligne graphique très Rock & Folk. On peut y entrer par n'importe quelle lettre, l'effet psychédélique est assuré !


La culture rock, un mode de pensée aussi révolutionnaire que la psychanalyse ?
"Il y a des gens rock qui ne jouent pas du rock and roll : Jean-Paul Sartre n'a rien à voir avec le rock et pourtant il est rock ! C'est pour cela que, finalement, je crois qu'il s'agit d'une culture.", disait bizarrement Pete Townshend de The Who. Sartre, un philosophe rock and roll ? Ce n'est pas l'image la plus spontanée que nous avons de l'auteur de la Nausée, mais comme l'esprit rock est très ambivalent, le maître du paradoxe pourrait y faire figure d'icône !

Le rock irrigue tellement de domaines (littérature, cinéma, mode, graphisme...), qu'il est difficile d'en saisir un système de pensée. Une ligne directrice semble néanmoins se dégager nettement : se rebeller contre tout système, le pouvoir de la négation (attention nous frôlons le nihilisme). Dans le livre "Culture Rock", le rock se découvre (sans tout à fait se dévoiler) par des mots qui se lisent comme des tatouages de l'histoire du rock : Androgynie, Beat Generation (J. kerouac, A. Ginsberg et W. Burroughs), Charles Bukowski, Canal plus, Censure, Contre-culture, Comics, Deezer, Festivals, Flyers, Indépendant, les Inrockuptibles, Ipod, Jean, Libération, Logo, lunettes noires, MTV, Myspace, Boris Vian, Vinyle, pédale Wah-wah, the Wall... La mythologie du rock nous enivre. Si bien qu'à la fin, on a envie de jouer à un quizz : rock ou pas rock ? Exemples, les réseaux sociaux, c'est rock ou pas rock ? Twitter c'est rock, mais Facebook, avec ses avalanches de portraits "photoshopés", est bien trop lisse pour se prêter aux aspérités d'une guitare enragée. Entre Paris et Londres, quelle est la ville la plus rock ? Londres sans la moindre hésitation... Entre le journal Libération et Le Monde... Libé l'emporte largement. Mais pourquoi ? Pour comprendre, j'attends maintenant un livre sur la pensée rock and roll !

En attendant que sorte ce prochain livre, voici mon pronostic en philosophie (sans réfléchir) :
Les philosophes les plus rocks : Nietzsche et Schopenhauer
Les philosophes les moins rocks : Kant et Rousseau (quoiqu'encore Rousseau peut avoir un côté très naïf and folk !)

C'est bien évidemment discutable ! So, let's rock Kant...

"Culture rock, l'encyclopédie", Denis Roulleau, Flammarion, 2011.

Rédigé par Marjorie Rafécas le Dimanche 11 Novembre 2012 à 15:52 | Commentaires (2)

« Le rock réveille, la philosophie éveille », pouvons-nous lire sur le dos du livre de Francis Métivier, paru tout récemment cette année, intitulé « Rock’philo ». Quand on aime à la fois le rock et la philo, il paraît alors difficile de passer à côté de ce livre original développant le concept de la pensée acoustique cher à Nietzsche.


Rock’n philo, mieux comprendre le rock grâce à la philo…
Au départ, je m’attendais plutôt à un livre utilisant les refrains du rock pour expliquer les grands concepts philosophiques, or c’est tout à fait l’inverse : c’est l’éclairage philosophique qui fait enfin comprendre des morceaux de rock très populaires que nous avons écoutés passionnément, un peu comme des bovins, sans jamais en saisir vraiment le sens… C’est le cas par exemple de « I’m a loser baby » de Beck, répéter sans cesse que l’on est un loser aurait dû nous interloquer. N’est-ce pas une chanson un peu masochiste ?! Pourtant, le message qui s’en dégage est bien plus fin qu’il n’y paraît. On y décèle le concept du moi haïssable de Blaise Pascal, ce moi minable qui nous pousse alors à nous plonger nerveusement dans le divertissement. Le Grunge véhicule un message de dévalorisation de soi, pour nous aider à mieux le dépasser. « Smells like teen spirit » de Nirvana met aussi en exergue cette cyclothymie du « moi ». Ainsi, grâce à ces chansons, on saisit tout le paradoxe du narcissisme. Si l’on n’arrive pas d’ailleurs à dépasser ce narcissisme propre à l’adolescence, l’autodestruction s’enclenche. C’est ce qui s’est produit avec Kurt Cobain, et plus récemment avec Amy Winehouse. Ainsi, se traiter de loser permettrait-il de tuer métaphoriquement son « moi idéalisé » pour ensuite apprendre à mieux se connaître ? A méditer… Les chansons servent toujours de catharsis pour nous aider à progresser et à sortir de nos schémas de pensée obsessionnels. On peut même s’inspirer du « pixisme », philosophie qui consisterait « à mettre en œuvre une musique et un texte d’une excentricité paradoxale qui n’a d’autre but que de révéler des évidences intellectuellement simples »… Ce qui ressemble au fond à la philosophie de Cioran, qui savait jouer excellemment avec le paradoxe « J’exècre cette vie que j’idolâtre ». Le rock, c’est au fond tout un programme philosophique !

Notons que ce livre permet également d’enrichir sa culture musicale. L’auteur a en effet une aisance toute particulière pour analyser les notes, les sons, la mélodie et traduire la musique en concepts rationnels, ce qui nous permet de mieux saisir l’alchimie du rock.

Un conseil : lire les chapitres en écoutant les titres de rock cités. C’est bien plus prenant, et surtout on comprend alors mieux ce qu’explique l’auteur grâce à la puissance de la musique !

Morale de l’histoire : peut-on être un vrai rocker sans être vraiment philosophe ?! -:) Une question à poser à Mick Jagger…

Le livre :
Rock’n Philo, de Francis Métivier
Editions Bréal, 2011

Rédigé par Marjorie Rafécas le Lundi 12 Septembre 2011 à 12:09 | Commentaires (0)

Bonne nouvelle : la musique n'est pas inutile !


Ecouter de la musique, un moyen simple pour doper son cerveau de bonne humeur et de dopamine. Nietzsche avait raison…
Je viens de terminer l'ouvrage "De la note au cerveau, l'influence de la musique sur le comportement" (2010), de Daniel Levitin, un neuroscientifique reconnu mondialement et ayant travaillé également dans l'industrie musicale ; son profil scientifique très original nous propose un livre érudit et intelligent. Oui, je sais qu'il est rare d'employer le qualificatif d'"intelligent" pour un livre, mais il faut reconnaître que parfois il n'y a pas d'autre mot pour décrire la finesse d'analyse et de sensibilité d'un auteur. Le début est assez technique, notamment sur le plan musical, mais à partir de la p. 213, où sont évoqués le cerveau reptilien et la rencontre avec Francis Crick, les chapitres prennent une cadence plus rythmée et passionnante.

Bonne nouvelle : la musique n'est pas inutile ! Même si pour certains scientifiques, la musique ne serait que pure tarte à la crème, futile et comparable à une charlotte aux fraises éveillant nos oreilles gustatives, la musique est bel et bien "utile" car elle régule nos émotions et fait jaillir dans notre cerveau une véritable "chorégraphie de neurotransmetteurs". La musique permet en effet de produire de la dopamine par le biais du noyau accumbens, neurotransmetteur qui est associé au système du plaisir, et qui intervient également dans les coups de foudre amoureux ! "La satisfaction et le plaisir liés à la musique découlent de l'augmentation de la dopamine dans le noyau accumbens, à laquelle participe le cervelet en régulant les émotions grâce à ses connexions avec le lobe frontal et le système limbique".

Autre scoop non négligeable qui intéressera les célibataires : la musique a joué un rôle dans la sélection sexuelle. Darwin écrit dans la "Descendance de l'homme" : "j'en conclus que les notes et le rythme de la musique furent acquis par les ancêtres mâle et femelle de l'humanité afin de séduire le sexe opposé". Car la musique génère des émotions puissantes, pour cette raison, elle a été utilisée instinctivement pour séduire. La musique a ainsi précédé le langage, comme la queue du Paon. D'ailleurs preuve encore actuelle, que la musique est un excellent moyen de séduction : le nombre de partenaires d'une rock star peut être cent fois supérieur à celui du mâle moyen ! Il faut savoir que la créativité artistique plaît aux femmes car elle promet des "bons"gènes, alors que la richesse permet avant tout d'assurer une bonne éducation aux futurs rejetons. Ainsi, les meilleurs géniteurs ne font pas toujours les meilleurs pères… D'ailleurs à la phrase de Schopenhauer, "l'homme peut sans peine engendrer en une années plus de 100 enfants, s'il a sa disposition un nombre égal de femmes, tandis qu'une femme, même avec un pareil nombre d'hommes ne pourrait toujours mettre au monde qu'un enfant dans l'année", on pourrait rajouter "surtout si l'homme en question est une rock star" !

Nietzsche avait donc raison : sans la musique, la vie serait une erreur… D'ailleurs, Nietzsche, dans son livre La Naissance de la tragédie, a eu une intuition de génie d'opposer Dionysos, l'être débordant de vie, de mouvement, de puissance créatrice, à Apollon, symbole de la mesure, de la sérénité et la maîtrise rationnelle. Car cet antagonisme se retrouve finalement dans les neurotransmetteurs de nos cerveaux, comme entre la dopamine et la sérotonine ou l'ocytocine.

Bien entendu, il existe plusieurs façons d'écouter la musique ; l'écoute par le cerveau gauche ne produit pas le même effet que par le cerveau droit. Les parties du cerveau qui participent aux circuits de l'écoute musicale sont nombreuses et très différentes. Il a été découvert de nombreux sentiers pour parvenir au plaisir musical.

La musique est avant tout une affaire de connexions et créatrice de lien social. Dommage qu'elle ne soit pas prise plus au sérieux pour limiter les frustrations et les comportements violents…

De la note au cerveau, Daniel Levitin, Editions Héloïse d'Ormession, 2010.

Rédigé par Marjorie Rafécas le Mercredi 25 Août 2010 à 00:17 | Commentaires (1)

C'est ce que vous suggère le livre de Balthasar Thomass, paru récemment dans la collection "Vivre en philosophie" des éditions Eyrolles.


Et si cet été, au lieu de s'affiner pour frimer sur la plage, on apprenait à s'affirmer avec Nietzsche ?!
J'avais déjà évoqué dans un article précédent son essai très instructif, Etre heureux avec Spinoza (cliquer sur Etes-vous-joyeux-comme-Nietzsche-Spinoza-ou-Bergson). Cette fois-ci, Balthasar s'est intéressé à la philosophie volcanique et impétueuse de Nietzsche, ayant tué le plus grand des idoles : Dieu.

Contrairement à la philosophie de Spinoza, il va falloir souffrir pour être heureux ! On entre dans la cadence très paradoxale de Nietzsche, où souffrir rime avec plaisir. Nietzsche ose affirmer "il y a même des cas où une espèce de plaisir dépend d'une séquence rythmique de petites excitations douloureuses". "C'est par exemple le cas du chatouillement". Nietzsche, pourtant très prude, va même jusqu'à dire "c'est le cas du chatouillement sexuel du coït". Ainsi, le paradoxe de la souffrance semble trouver son reflet dans la métaphore de la sexualité… Une mise en pratique de la philosophie de notre cher Nietzsche semble à première vue finalement assez simple :-). Mais, attention, cela n'est que la partie I du mode d'emploi, le plus prenant restant la partie II du livre "se désintoxiquer de la morale". Comme le fait remarquer Balthasar Thomass "il ne faut pas choisir ses valeurs par dépit". Ainsi, s'affirmer, cela consiste avant tout à assumer ses goûts.

Attention aussi aux revanchards et aux pleurnicheurs : on ne peut pas prétendre être Nietzschéen si l'on passe son temps à ruminer et à se plaindre. Le ressentiment freine la puissance et le bonheur. Nietzsche est sans concession avec les décadents, les dégénérés et les "ratés". Sa philosophie est allergique à la faiblesse : l'échec doit rendre plus fort. Plus étonnant, les théories de Nietzsche permettent même de s'inventer des filiations imaginaires pour se sentir mieux et devenir ce que l'on est : il s'inventait lui-même des origines polonaises pour s'éloigner de la lourdeur allemande de l'époque. Une théorie intéressante au vu de la crise identitaire que certains de nos contemporains traversent.

Mais attention, B. Thomass vous prévient : "Etre libre", c'est aussi "être plus fragile". Il faut apprendre à "jardiner" ses passions, ce qui met forcément votre patience à rude épreuve. Cela revient en fin de compte à trouver l'ordre ou le désordre dans lequel vous souhaitez faire valser vos passions. Dionysos ou Apollon, c'est une question de dosage. Harmonie ou dissonance ? A vous de tester votre équilibre.


C'est pour cela qu'il est plus difficile d'être heureux avec Nietzsche qu'avec Spinoza. Pour Spinoza, la tristesse est signe que vos passions ne vous dirigent pas vers la bonne voie. Alors que pour Nietzsche, rien n'est sûr, puisqu'il faut souffrir pour être heureux !
En revanche, pour grandir et s'affirmer, Nietzsche reste la référence des adolescents et de tous ceux qui veulent vraiment se connaître et se réaliser. Car pour s'affirmer, il faut accepter ses désirs profonds, tuer ses idoles et créer sa propre éthique – et surtout refuser les valeurs qui mettent en avant la souffrance, la faiblesse et le nihilisme.
Bref, un long programme en perspective digne d'un surhomme !

S'affirmer avec Nietzsche, Balthasar Thomass, 2O1O, Editions Eyrolles.
Et si cet été, au lieu de s'affiner pour frimer sur la plage, on apprenait à s'affirmer avec Nietzsche ?!

Rédigé par Marjorie Rafécas le Lundi 9 Août 2010 à 22:52 | Commentaires (1)

Tout comme Schopenhauer, Michel Houellebecq n'a pas mérité sa mère. Est-ce par le ricochet de ce point commun que l'auteur des Particules élémentaires est manifestement touché par le philosophe Allemand le plus pessimiste de l'histoire ? Nul ne peut l'affirmer sans risquer de faire de la psychologie de comptoir. Mais, pourquoi préférer Schopenhauer à Nietzsche ? Probablement parce que Houellebecq, bien que romancier, n'aime pas se raconter des histoires. Il est finalement trop "pur" et un inconditionnel de la vérité.


Ennemis publics de M. Houellebecq et B-H Lévy : et si Houellebecq troquait enfin son Schopenhauer pour Spinoza ?!
De Nietzsche, voici ce qu'il en dit : "il a inauguré en philosophie ce qu'on pourrait appeler l'ère de la déloyauté. Car qu'est-ce une philosophie qui laisse glisser au second plan la question de la vérité ? On en revient, il me semble, à peu près aux sophistes". Ce qui n'est pas faux, car à force de jouer avec des aphorismes contradictoires, Nietzsche n'est pour certains philosophes ni plus ni moins qu'un sophiste, certes talentueux, posant les bonnes questions et les bons soupçons, sans toutefois proposer d'issue sérieuse… Schopenhauer, avec ses théories sombres et fatalistes, apparaît alors plus "honnête" selon Houellebecq. Le réalisme défaitiste est-il plus honnête que le réalisme optimiste ? Vaste débat incessant et passionnant duquel la philosophie n'est jamais sortie.

En dehors de ces digressions sur Schopenhauer, j'ai trouvé très intéressant l'échange de Houellebecq et de BHL sur les effets de la célébrité, qui attise la "meute" et sa vengeance terrible. Houellebecq évoque ses ennemis dans la métaphore de la meute. "Dans nos sociétés occidentales, un individu peut parfaitement se mettre à l'écart du groupe. Mais tôt ou tard, la meute se réveille, se met en chasse, et finit par le rattraper." La meute est "composée d'individus médiocres, conscients et honteux de l'être". BHL se montre moins pessimiste, il rappelle que la meute est avant tout peureuse et faible. Pour mieux illustrer ses propos, il utilise Spinoza à bon escient. Pourquoi la meute est-elle faible ? Parce qu'elle se nourrit de passions négatives. "Elle est animée par l'envie, la raillerie, le ressentiment, la haine, la rancune, la méchanceté, la colère, la dérision, le mépris, tout ce que Spinoza appelle les passions tristes et dont il a établi, de manière définitive, qu'elles ne donnent pas de la force mais de la faiblesse". BHL en profite pour faire un clin d'œil à la campagne électorale de Nicolas Sarkozy "il a fait une campagne typiquement "passions tristes" et qu'avec des passions tristes, dit Spinoza, vous réussissez sur le court terme, mais vous échouez forcément sur le long terme". Rappelons au passage que Nietzsche s'est également toujours méfié de la foule, qu'il appelait "canaille", et a constamment mis en garde contre les effets du ressentiment.

Enfin, Michel, il faut que vous vous ressaisissiez ! Même si les passions vraies et tristes sont plus honnêtes que les passions fausses et gaies, il est temps de troquer Schopenhauer pour Spinoza !

Pour terminer plus précisément sur ce livre épistolaire entre BHL et Houellebecq, "Ennemis publics", j'avoue avoir été agréablement surprise par ces échanges plutôt profonds et sincères. Je n'avais pas du tout aimé la promotion et le marketing utilisés pour le lancement de ce livre, principalement fondés sur la "peopolisation". Que les éditeurs jouent le rôle de la meute est certes regrettable, que l'économie de marché leur sert souvent d'excuse pour masquer leur manque de créativité… Tout ceci est vrai, mais ne doit pas faire oublier l'essentiel : le contenu d'un livre. J'ai appris à mieux connaître Houellebecq, et ai fait connaissance avec BHL, car j'avoue n'avoir jamais eu la force de lire un de ces livres, à cause de son style trop alambiqué. D'ailleurs, en matière de style, on peut même être surpris dans ce livre par BHL, lorsqu'il décrit sa rencontre avec Aragon, il oublie ses hésitations philosophiques et décrit avec verve et humour cette rencontre très surréaliste.

Autre et dernier point positif du livre : il ne donne pas envie d'être célèbre ! Finalement, on se sent mieux, loin de la meute de foin…

Rédigé par Marjorie Rafécas le Dimanche 15 Novembre 2009 à 16:01 | Commentaires (0)

LIVRES PHILous

Lundi 21 Septembre 2009
Descartes était-il assez cartésien pour vivre en France ?


Je viens de terminer un petit livre sympathique, idéal pour les trajets d'une demi-heure, 50 pages, petit format, un concentré d'humour, dénommé "Descartes et le cannabis", de Frédéric Pagès, l'auteur révélé par Botul…. Pourquoi Descartes est-il parti s'installer en Hollande ? Pour fumer le cannabis ? Après l'investigation de cette idée très fumeuse, Frédéric Pagès ne trouve aucun signe d'incandescence dans la biographie de Descartes, mis à part une certaine tendance aux grasses matinées… Notre philosophe de la méthode cartésienne aimait dormir et travailler dans son lit. Soit. Mais n'aurait-il pas pu le faire en France ? Frédéric Pagès nous rappelle qu'en 1628, l'air en France était irrespirable : "tout n'est que tyrannie et moinerie".
Qu'en est-il aujourd'hui ? Frédéric Pagès fait dire à son personnage fictif hollandais "Aujourd'hui, ce grand pays cartésien sent le fagot à nouveau attiré par la tyrannie et la moinerie. Vous rêvez toujours de monarchie solaire." "Le bon sens est la chose la moins bien partagée entre la France et la Hollande". A propos de Descartes : "Je comprends son départ, son bras d'honneur à la France, son adieu à cette mondanité parisienne qui happe l'intellectuel et le transforme en saltimbanque. La liberté de penser n'est pas que celle que vous octroie l'Etat, mais celle que vous prenez vous-même par rapport à vous-même, à vos maîtres et à vos semblables".
Les Français pas assez libres intérieurement pour penser ?
Question de bon sens ?,
Saluons la conclusion de F. Pagès : "Finalement, quand on fait le bilan, il serait moins grave pour la grandeur française d'admettre que Descartes est venu en Hollande pour tâter du cannabis" !

Rédigé par Marjorie Rafécas le Lundi 21 Septembre 2009 à 22:45 | Commentaires (1)

Il y a un an, je lisais avec un sincère amusement "la vie sexuelle d'Emmanuel Kant" d'un certain Jean-Baptiste Botul, philosophe de tradition orale et chauffeur de taxi. Il y décrit un Emmanuel Kant constipé, hypocondriaque, dédaignant la sexualité de peur d'y perdre son énergie vitale… Un essai pétulant d'humour qui peut expliquer les œuvres monstrueuses de notre philosophe ruminant l'impératif catégorique. Je me suis alors interrogée, mais qui est donc ce Jean-Baptiste Botul ?


Quand la philosophie crée des personnages aussi attachants que Jean-Baptiste Botul, on a envie de prendre le taxi !
Dans le livre, on apprend qu'il s'agit de la retranscription d'une conférence en mai 1946, au Paraguay… et que l'auteur est décédé.
Intriguée par cet auteur, en mars 2009 je récidive : j'achète un livre de Botul sur Nietzsche, intitulé "Nietzsche et le démon de midi". Là encore, il s'agirait de la retranscription d'une plaidoirie de Botul face à un syndicat de taxis qui lui reproche d'avoir kidnappé une jeune fille mineure dans son taxi pendant 6 heures. Pour appuyer sa défense, il compare la jeune fille, dénommée Héloïse à Lou Andréas-Salomé, celle qui séduisit le grand Nietzsche. Lou y est semblable à la Lolita de Nabokov, et Nietzsche a l'air aussi misérable qu'un personnage de Houellebecq… Toute la défense de Botul est axée sur le démon de midi de Nietzsche. Un démon de midi qui en dit long sur la lente descente en enfer du philosophe allemand. Nietzsche n'aurait-il pas créé le surhomme par désespoir ? A cause d'un chagrin d'amour non digéré ? Zarathoustra n'est décidément pas aussi crédible que le botulisme…
Car, Botul, notre cher chauffeur de taxi n'a jamais existé ! C'est un personnage créé par Frédéric Pagès.
Dommage car je commençais vraiment à m'attacher à ce cher Botul ! Un philosophe drôle, insolent et pertinent !

Maintenant, à vous de découvrir, mais qui est vraiment Frédéric Pagès ???

Et méfiez-vous du démon de midi…

Nietzsche et le démon de midi, Jean-Baptiste Botul, Mille et une nuits.
La vie sexuelle d'Emmanuel Kant, Jean-Baptiste Botul, Mille et une nuits.


Pour en savoir plus sur le botulisme : http://botul.free.fr/

Rédigé par Marjorie Rafécas le Lundi 27 Juillet 2009 à 00:06 | Commentaires (3)

"Les philosophes et l'amour" est un essai sorti en 2008, coécrit par deux journalistes au Nouvel Observateur, Aude Lancelin et Marie Lemonnier, toutes deux diplômées en philosophie. Il est vrai qu'amour et philosophie ne font pas toujours bon ménage. Entre Schopenhauer qui ne voit dans l'amour que la reproduction de la souffrance, et Kant qui perçoit la sexualité comme une menace de perdre son énergie vitale, on préfère encore la douceur platonicienne et savourer son banquet.


Les philosophes et l'amour : pourquoi Eros hérisse tant les philosophes ?!


Pour illustrer la relation entre l'amour et la philosophie, les auteurs du livre évoquent 12 philosophes : Platon, Lucrèce, Montaigne, Rousseau, Kant, Kierkegaard, Schopenhauer, Nietzsche, le couple Heidegger et Arendt, ainsi que le couple Sartre et Simone de Beauvoir. Le problème en philosophie est que l'amour n'est jamais clairement défini, il est tantôt désir, passion, amitié, voire générosité. De surcroît, il est dénué d'émotions et s'essouffle à grands renforts de conceptualisation. Ce livre était donc un pari difficile : il n'est pas aisé de parler d'amour de façon abstraite, surtout lorsque les philosophes sont aussi discrets sur leur vie intime !


Ce qui m'a fait sourire est que pour mieux étayer la philosophie de Schopenhauer et de Rousseau, les auteurs ont spontanément utilisé à plusieurs reprises notre grand écrivain pessimiste du moment : Michel Houellebecq. Grâce à ses romans, on peut en effet mieux pressentir certaines théories philosophiques. Pour Rousseau, une citation de la Possibilité d'une île est utilisée pour décrire son énergie "L'opposition entre érotisme et la tendresse m'apparaissait avec une parfaite clarté comme l'une des pires saloperies de notre époque, comme l'une de celles qui signent, sans rémission l'arrêt de mort d'une civilisation". Quant à Schopenhauer, on ne peut que s'attendre à plus défaitiste : "Quand l'amour physique disparaît, tout disparaît ; un agacement morne, sans profondeur, vient remplir la succession des jours", citation tirée également de la Possibilité d'une île.

Plus constructif, Nietzsche se montre moins récalcitrant à l'idée de l'amour. Il suggère seulement qu'avant d'épouser quelqu'un, il faut juste s'assurer : "Crois-tu pouvoir t'entretenir avec cette femme jusqu'à ta vieillesse ?". Ainsi, le mariage serait une longue conversation.

Personnellement, je n'ai pas vraiment appris de nouvelles choses sur les philosophes traditionnels tels que Kant ou Schopenhauer, mais j'ai bien apprécié la description des couples existentialistes, Heidegger/Arendt et Sartre/Beauvoir. Leur conception de l'amour est en effet peu commune. Ils tentent le pari difficile de concilier liberté et amour. Ont-ils réussi ? A vous d'en juger…

Seul reproche que l'on pourrait faire à ce livre : le parallèle entre la vie intime des philosophes et leurs théories n'est pas toujours très réussi. Mais, reconnaissons que ce n'est pas un exercice facile !

"Les philosophes et l'amour, aimer de Socrate à Simone e Beauvoir", Aude Lancelin et Marie Lemonnier, PLON, 2008.


Rédigé par Marjorie Rafécas le Mercredi 25 Février 2009 à 08:44 | Commentaires (0)

LIVRES PHILous

Lundi 26 Février 2007

A qui appartient le bonheur?

Dans le roman de 99frs (Grasset 2000), on apprend qu'il appartient à Nestlé...


99 frs ou 15 euros...
Il n'est pas besoin de disserter sur la qualité littéraire de ce livre, ce qui compte c'est l'agitation qu'il suscite :

- Premièrement, on remarque que Platon a plus de succès sur les panneaux publicitaires que sur les bancs du lycée, car le mythe de la caverne n'est plus un mythe... Les concepts philosophiques (qui soulignons-le : ne coûtent rien!) servent aux slogans. Lacoste ne s'est pas gêné : le "deviens ce que tu es" de Nietzsche s'est vu avalé par un crocodile... Voilà une utilisation lucrative de la philosophie!!!
- Deuxièmement, le marketing en littérature fonctionne. Les titres de Beigbeder ne sont pas des titres ronflants, ils sont comme des slogans qui viennent intercepter le lecteur distrait. Faire d'un titre un slogan, la méthode de Beigbeder n'a pas failli. C'est intéressant...

Mais pour certains, la méthode "Beigbederienne" qui consiste à descendre le monde de la pub afin de gagner des millions, est culotté et a comme un côté de plumitif... En attendant, personne n'avait pensé à proposer une lecture à 99 frs, ou un amour qui dure 3 ans. Or, le public semble apprécier les chiffres multiples de trois!

On lui reproche de jouer au cynique mondain qui n'assume pas ses aigreurs. Mais serait-ce l'un des premiers écrivains qui écrit un livre pour "porter plainte?" (pour reprendre une expression dans "l'Amour dure trois ans") Seulement voilà, lorsque cette plainte permet de gagner quelques millions, la tirelire vire en délire puisque le livre n'est pas "authentifié" par la vie de l'écrivain. Cependant, depuis quand doit on vivre comme on écrit?

Pourtant, pour des personnes comme Marc Laimé qui a écrit "comment être millionnaire sans se fatiguer : l'affaire F. Beigbeder" (http://www.uzine.net), il semblerait que la fonction d'écrivain soit incompatible avec la richesse.

F.B aurait gagné des millions grâce à la start up de son frère.... Et alors???

Pourquoi les écrivains (ou autres plumitifs, si votre vision de l'écrivain correspond à un vieil idéal romantique...), devraient-ils demeurer pauvres?

Pourquoi cette idéologie fataliste, cette image de l'écrivain épuisé, parasite incompris etc... etc...??

Cela rappelle finalement une critique dédiée envers un autre écrivain (auquel on refuse d'ailleurs le titre de philosophe) : Voltaire, le spéculateur. Apparemment, on ne peut pas être dénonciateur et spéculateur. Non, être un "Zola Trader", c'est pas crédible... L'écrivain devrait être un HERO... Combien de fois n'a-t-on pas critiqué la philosophie de Sartre au motif que l'auteur n'était qu'un lâche... Ne confondons pas l'auteur et son oeuvre. Même si Beigbeder n'est pas au goût de l'Académie française, prenons ces livres comme des cafés bien serrés, qui nous secouent un peu. On a besoin de caféine littéraire, la littérature ne rime pas toujours avec des mots hautement soporifiques... Certes ce n'est pas des scénarios extraordinaires, certes les personnages sont prévisibles, certes le style est un peu facile, mais on aime bien!!! Parfois, le lecteur a juste besoin que l'on critique sa routine et qu'on l'aide à mépriser ce qui est méprisable...


Plus qu'une critique de l'argent, 99 frs dénonce le bonheur factice que véhicule la pub. La fabrication d'un bonheur industriel est un leurre. D'ailleurs, plus on est malheureux, plus on consomme, c'est l'instinct de survie compulsif! La publicité utilise des clichés qui nous séduisent, mais ce ne sont que les ombres, les plagiats d'un bonheur inconscient (voilà où l'on retrouve le mythe de la caverne...). La pub n'est pas que platonicienne, elle est aussi donjuanesque : elle prône le changement pour mieux déployer la force du consumérisme. Les gens qui ne changent pas, soit les nostalgiques, sont des ringards! Bien sûr, la nostalgie fait partie des clichés publicitaires : la confiture de l'enfance, ou le chocolat de Grand Mère, mais cela ressemble plus à la fable du corbeau et du renard, qu'à la véritable réminiscence de l'enfance... Bien sûr la pub peut beaucoup nous en apprendre sur nous, et servir de thérapie du désir... Mais pour cela, il ne faut pas être dupe.

Par conséquent, 99frs est un livre qui fait sourire. Seul reproche : il est clair qu'il est bourré de clichés faciles : des patrons bêtes et méchants, des femmes à problème un peu chosifiées, des Etats Unis drogués de vieux riches... Quant à la critique selon laquelle F.Beigbeder aurait imité le style de Bret Easton Ellis, personnellement je ne trouve pas. Bien sûr il y a du cynisme... Mais F.Beigbeder a plus un style de "publicitaire" empoigné de slogans, avec des phrases qui font l'effet d'onomatopée, des flashs de mots qui se renvoient la balle.

En tout cas, deux remarques qui restent à la lecture de ses livres :

- Notre société n'a pas intérêt à ce que l'on soit seul car "je suis seul donc je pense". Et plus on réfléchit, moins on consomme...

- Le concept du "prince charmant" est indétronable : la quête de l'absolu, même si ce concept n'a pas été créé par la pub, elle l'exploite sans vergogne...

Maintenant, à nous de voir quelle est la frontière entre le bonheur conceptuel et le bonheur consommable....


Quelques citations amusantes
"Pourquoi courons-nous après la beauté? Parce que ce monde est laid à mourir"
"Tout le monde a la même bouche"
Cette phrase n'a à première vue aucune pertinence, mais vu sous l'angle de la chirurgie esthétique, il est clair que le consumérisme a comme un goût de clonage... Que le conventionnel dérive sur nos corps, et nous voilà très proches de remettre en cause la combinaison aléatoire des gênes, cette combinaison qui nous permet pourtant d'être unique...

Rire c'est comme "du mécanique plaqué sur du vivant" (Bergson) Les larmes c'est l'inverse : "du vivant plaqué sur du mécanique", "un robot qui tombe en panne, un dandy gagné par le naturel".
C'est vrai que l'artifice s'achève là où commencent les larmes...

"Ce qui est étonnant, ce n'est pas que notre vie soit une pièce de théâtre, c'est qu'elle comporte si peu de personnages"
Cette réalité contraste étonnamment avec le monde donjuanesque dans lequel la télé voudrait nous faire vivre. On ne vit pas dans un monde peuplé de gens, mais que de quelques noms...

(article publié en 2002)

l[]l

Tags : 99 frs beigbeder
Rédigé par Marjorie Rafécas le Lundi 26 Février 2007 à 21:36 | Commentaires (0)

LIVRES PHILous

Lundi 26 Février 2007

Le journal de Bridget Jones (oeuvre de Helen Fielding), Miroir de la psychologie de la femme moderne??

Suivi du deuxième volume : the edge of reason.....

L’âge de raison, y aurait-il un rapport avec celui de Sartre?


photo du film le journal du Briget jones
photo du film le journal du Briget jones


Non! aucun! sa voix mêlée à la sonnerie du téléphone sous un faux air de bouddhiste zen, son nez fourré dans les guides pratiques dont aucun ne possède la recette miracle... Des mots comme enfoiré affectif, célibattante, marié et fier de l’être, des mots qui finalement jouent un rôle important dans la vie d’une femme!!!

Une Rebecca, au caractère et aux jambes imbuvables, insolente comme une juriste imbus d’elle même, bref la « pouf », qui court après un Marc qui lui a son cœur coté en bourse ! Et finalement, c’est la petite Bridget avec ses 59 kg, son chardonney plein le foie, et ses clopes plein le bec, qui l’emportent!!! Un peu comme dans ses séries américaines où les méchants superficiels sont punis, sauf que là... Notre héroïne se fait passé pour une fille légèrement idiote, certes courageuse, et délicieuse dans sa bêtise!

Mais derrière la trame de ce scénario, comment ne pas reconnaître l'incroyable "Cendrillon", une cendrillon certes modernisée, ayant transformé ces cendres en mégots de cigarettes, et ses vilaines soeurs en méchants patrons. Seule différence : Bridget a une mère et pas n'importe laquelle : elle roucoule de jaune...

Bridget est plus le prototype de la trentaine que de la vingtaine, mais cette classe d'âge se retrouve dans beaucoup d'autres romans anglo-saxons comme "Croqueuse de Céréales" de Joan Conway où la trame est similaire sauf que le récit n'est pas présenté sous une forme de journal intime.

Qu'apporte le psychologie de Bridget? En fait c'est un peu la célébration du côté compulsif, cyclothymique de la femme, se réfugiant derrière un hypothétique coup de téléphone, dans une vie en forme de rébus, avec beaucoup d'intuitions et de prémonitions... Préférant probablement ses rêves à la réalité. Mais, fantasmes ne signifient pas forcément passivité!!

(Marjorie Rafecas, marjorierff@hotmail.com )

Quelques citations amusantes :

" C’est ahurissant la manière dont le monde des dames de la bourgeoisie parvient à tout aplanir et à tout intégrer, à transformer la complexité et le chaos ambiants en quelque chose de charmant, d’inoffensif et d’aseptisé, un peu comme un détergent colore tout en rose dans la cuvette des WC."

"J’avais oublié ce sentiment que le monde se résume à une horrible histoire toujours recommencée : au départ on croit que les gens sont biens et ensuite ils se révèlent mauvais et pourris. "

(publié en 2002)

Tags : bridget jones
Rédigé par Marjorie Rafécas le Lundi 26 Février 2007 à 21:31 | Commentaires (0)

Recherche






Profil
Marjorie Rafécas
Marjorie Rafécas
Passionnée de philosophie et des sciences humaines, je publie régulièrement des articles sur mon blog Philing Good, l'anti-burnout des idées (http://www.wmaker.net/philobalade), ainsi que sur La Cause Littéraire (https://www.lacauselitteraire.fr). Je suis également l'auteur de La revanche du cerveau droit co-écrit avec Ferial Furon (Editions du Dauphin, 2022), ainsi que d'un ouvrage très décalé Descartes n'était pas Vierge (2011), qui décrit les philosophes par leur signe astrologique.




Infos XML

RSS ATOM RSS comment PODCAST Mobile

Paperblog : Les meilleurs actualités issues des blogs